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Les dessous du départ d’Édouard Choquet : « Après neuf ans, se retrouver jeté via un email envoyé à ton agent… »

Édouard Choquet aurait-il perdu toutes ses illusions sur le monde professionnel ? À cinq ans d’intervalle, après les promesses sans lendemain de Châlons-Reims en 2017, ses deux derniers départs se sont soldés dans l’amertume. « Je ne peux pas mettre les deux dans le même bateau puisque je n’ai fait qu’un an au CCRB », glisse-t-il, attablé dans un café jouxtant le Vieux-Port de Marseille, terminant son déjeuner au milieu d’une énième journée marathon. « Il n’y avait pas ce côté historique. Quand tu as fait neuf ans dans un club, se retrouver jeté via un email envoyé à ton agent, ça fait mal. » En un peu plus de deux semaines, l’émotion brute a eu le temps de redescendre, la vague de messages de soutien s’est atténuée mais l’ancien meneur emblématique de Fos-Provence reste dans une colère froide. « Ils se vantent d’être un club humain mais ce qu’ils ont fait avec moi n’est pas humain », souffle-t-il, après avoir raconté son départ imprévu.

Libéré cinq minutes avant la fin de la clause

L’histoire d’un choix sportif compréhensible, mais particulièrement mal géré par le club. Dans ses standards en Pro B l’an dernier avec Fos-sur-Mer (7,5 points à 44% et 4,7 passes décisives), Édouard Choquet s’est retrouvé face à ses limites sportives cette saison (3,5 points à 36% et 2,1 passes décisives). « Je n’ai pas trop senti le coup dès le début, j’ai eu du mal à cerner quel allait être mon rôle. Pour synthétiser, le début a été moyen, le milieu correct et la fin catastrophique. » Beaucoup moins adroit qu’à son habitude (31% à trois points, contre 43% l’an dernier), le Limougeaud a surtout fait les frais de l’arrivée de Deishuan Booker. « Il était incroyable et on gagnait. Qu’est-ce que tu voulais faire ? C’est un talent pur : tu te mets sur le côté, tu le regardes jouer et tu te tais. » D’où le caractère légitime de la décision sportive, surtout dans le contexte d’un changement d’ère avec l’arrivée de Rémy Valin sur le banc méridional. Seul hic : son contrat courait jusqu’au 30 juin 2023. Avec toutefois une option côté Fos-Provence pour le libérer de son engagement.

Cloué au banc sur les deux derniers mois de compétition (47 minutes en cumulé sur les 7 derniers matchs), le champion de France 2016 avait senti le vent tourner. « Plusieurs fois, on les a sollicités avec mon agent : « Si c’est en Pro B, qu’est-ce qui se passe ? Si c’est en Betclic ÉLITE, qu’est ce qui se passe ? » Le club répondait qu’il fallait attendre le coach. Je pense que les dés étaient pipés d’avance : le fait de ne pas avoir de réponse, ni oui ni non, c’est que c’est plutôt non. » Une partie de l’équation a été solutionné le 17 mai grâce à une victoire arrachée au Portel sur un coup de sifflet miraculeux de Nicolas Maestre : l’avenir s’écrira en Betclic ÉLITE pour Fos-sur-Mer.

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2011 – 2022, du jeune Édouard au vétéran Choquet sous les couleurs BYers
(photos : Sébastien Grasset)

La suite, c’est Édouard Choquet qui la raconte. « On a fini la saison le mardi soir. Ils avaient une deadline pour m’annoncer l’annulation éventuelle de mon contrat qui courait quatre jours après le dernier match, donc le samedi. Entre-temps, il y a l’annonce de l’arrêt de Rémi (Giuitta) mais personnellement, je n’ai pas d’info. Mon agent m’appelle le vendredi pour me dire que le club veut gagner du temps et prolonger la clause. Je réponds que c’est hors de question : soit ils me gardent, soit ils ne me gardent pas, mais on ne va pas attendre cinq jours de plus. Leur excuse est encore l’absence de coach. Mon agent me répond que c’est stupide, qu’on n’a pas d’autres options. Il me rappelle le lendemain et me convainc. J’avais simplement accepté de prolonger jusqu’au mercredi midi car je partais à Limoges lors du week-end de l’Ascension et je ne voulais pas apprendre que je n’étais pas conservé sans être sur place. Ça a peut-être été mon erreur, sûrement ont-ils interprété cela comme une proposition d’un autre club alors que je n’avais de plan B. Mercredi matin arrive, je suis à Marseille et je n’ai toujours eu personne au téléphone. À 11h55, je reçois un screenshot de mon agent qui a une discussion avec le président William Raffa : « Je t’envoie l’activation de la clause d’Édouard, nous n’avons pas de coach. » Je n’ai toujours eu personne au téléphone, pas de SMS, pas de mail, rien. J’étais super fâché. »

S’en suivront une discussion houleuse avec William Raffa, un appel à Rémi Giuitta, « car j’étais en train de péter un câble », qui tente de dédouaner le président en arguant sa méconnaissance des codes du milieu, un nouveau coup de fil du dirigeant – « pour s’excuser de la méthode mais j’ai senti que ce n’était pas sincère » – puis enfin une conversation cordiale avec Rémy Valin. Une fois certain qu’il ne faisait vraiment pas partie des plans du futur entraîneur, Édouard Choquet n’a alors plus de frein à dévoiler l’information. Le lendemain, il prend la plume et publie un long message sur Facebook. « Je savais que j’allais faire du buzz mais pas autant », sourit-il. « Mes réseaux sociaux ont explosé. Je pense être un très bon communicant, j’ai dit les choses telles qu’elles étaient. Eux ont été très mauvais de ce point de vue là. Leur communiqué du lendemain est catastrophique : ils parlent de SMS, d’appels, ça ne clarifie pas la chose. »

« Ne pas avoir été convoqué est une honte »

Si la décision sportive est tout sauf scandaleuse, surtout que Fos-Provence souhaitait d’abord embaucher Enzo Goudou-Sinha avant de trouver une bonne option de secours avec Milan Barbitch, Édouard Choquet ne digère pas la manière. « Le problème n’est pas le fond mais la forme, j’aurais aimé plus de transparence dès le début. Ne pas avoir été convoqué pour en parler est une honte. J’avais simplement mon ressenti : un président qui avait l’air de m’en vouloir pour diverses raisons, un coach qui ne me parlait plus depuis six mois, pas de temps de jeu. Ça sentait mauvais. William Raffa et Rémi Giuitta n’ont pas été honnêtes avec moi, on n’est plus des petits garçons dans une cour d’école. L’un dira qu’il ne prend pas de décision sur le plan sportif, l’autre dira qu’il a arrêté et qu’il ne prend plus de décision. La vérité est qu’aucun ne voulait me garder et qu’aucun n’a été capable de l’assumer car ils savaient que ça allait faire un tollé. Au final, ils l’ont fait de la pire des manières et ça s’est retourné 1 000 fois contre eux. On voit que les valeurs qu’ils vendent aux supporters et aux partenaires semblent être du flan. Je veux bien entendre sur le plan sportif mais il y a des notions humaines qui n’ont pas été prises en compte par un club qui vante pourtant partout sa BYers family. »

Ainsi, Édouard Choquet se retrouve prématurément à la croisée des chemins : l’heure d’une décision sur la suite à donner à son avenir professionnel. Hyperactif à côté de Parsemain (« ça m’a joué des tours, on a pu croire que je mettais le basket entre parenthèses »), il est au moins déjà bien préparé si le temps est venu de se reconvertir avec son entreprise QuanSports, une agence d’accompagnement d’athlètes. Mais cela n’était pas prévu aussi rapidement. Quinze jours plus tard, l’ancien meneur de l’ESSM Le Portel hésite toujours entre trois options. « J’oscille entre tenter un dernier truc ailleurs, rester dans la région pour profiter du basket local ou carrément arrêter. » L’ex All-Star pourrait ainsi constituer une bonne option pour une équipe de Pro B mais doute que le jeu en vaille la chandelle. « Ai-je envie d’aller faire une saison à Nantes, à Lille ou à l’autre bout de la France ? », s’interroge-t-il. « J’ai une famille, des projets, une problématique géographique qui fait que je ne sais pas à quel point je suis prêt à partir, une problématique professionnelle extrabasket qui fait que je construis des choses appelées à s’installer sur Marseille : ai-je envie de mettre tout ça en suspens pour une saison de Pro B ? C’est difficile. » Une seule destination lointaine pourrait faciliter la chose : Beaublanc, lui le fils d’un ancien président du CSP (Didier Choquet), lui le seul Limougeaud du circuit professionnel qui a déja vu la porte du Cercle Saint-Pierre se fermer devant ses yeux à deux reprises : en 2017, quand le club a privilégié Jean-Baptiste Maille, puis en 2019, au profit d’Ovidijus Varanauskas. Sauf que même lui est conscient que le train ne repassera pas une troisième fois cet été. « Limoges en tant que joueur, c’est trop tard », rejette-t-il.

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Avec Fos, Choquet a enrichi son palmarès d’un doublé Leaders Cup Pro B – championnat en 2021
(photo : Christophe Canet)

De fait, puisqu’il ne s’impose pas de limite de niveau, la deuxième option pourrait être la plus intéressante. Promu en Nationale 1, Hyères-Toulon avait le profil parfait et le joueur avait fait part de son intérêt pour aller travailler avec Laurent Sciarra. Mais ça, c’était avant la révélation des nouveaux divers problèmes du HTV. Puisqu’Avignon a été relégué, il ne reste plus que de la NM2 dans le secteur : Sapela, le SMUC, Aix-Venelles, voire Sorgues. Autant d’options encore un peu vague à ses yeux… « Je ne m’étais pas du tout projeté », soupire-t-il. « C’est pour cela aussi que j’en veux à Fos. Au-delà de la méthode, ce côté humain est dégueulasse car ils me connaissent depuis dix ans : ça concerne une famille installée dans la région avec deux enfants scolarisés et une infirmière libérale à Fos. Ils auraient pu me prévenir : « Pour ta famille, prévois tes arrières car ça va tomber. » Le savoir un ou deux mois avant, ça laissait le temps de se préparer, ce n’était pas la même démarche. Là, ça me tombe dessus alors que tous les recrutements sont déjà lancés. » Le temps fera sûrement son œuvre et une fois la déception digérée, Édouard Choquet appréciera la vision d’ensemble de son passage à Fos-sur-Mer : arrivé dans une équipe émergente de Pro B en 2011, il quitte les bords de la Méditerranée avec neuf étoiles sur le maillot, deux montées décrochées, deux trophées et la sauvegarde du club parmi l’élite du basket français. À terme, cela aura plus de valeur qu’un simple email…

La version de Fos-Provence :
« Une maladresse éventuelle ne doit pas jeter l’opprobre sur le club »

William Raffa, président du FPB : « La ligne de conduite du club était limpide depuis plusieurs semaines : aucune décision sportive ne serait prise tant que le nouveau coach serait en place. Est venue se rajouter à cela une fin de saison sous tension où l’on jouait notre survie en Betclic ÉLITE. Effectivement, il y avait un engagement avec Édouard de l’informer rapidement de notre position à son sujet. J’avais discuté avec son agent et on a prolongé la deadline qu’on s’était fixé car je n’avais pas de coach. À l’issue du délai, je n’en avais toujours pas. Mon objectif était de ne pas le bloquer plus longtemps. Dans mon esprit, il avait d’autres projets sportifs, des propositions auxquelles répondre. Je me suis dit : « Je n’ai toujours pas de coach, ça peut durer encore longtemps, je ne vais pas le laisser poireauter. » L’engagement moral était clair : « Par prudence, on te confirme qu’on ne te reconduit pas mais dès que le nouveau coach sera nommé, je te donne ma parole que la première chose qu’il fera sera de prendre contact avec toi afin d’échanger et qu’il te fasse part de son point de vue. Ce qui a été fait. Personnellement, je suis président, pas directeur sportif : je n’ai aucune légitimité à décider moi-même, malgré toute l’affection que je peux porter à un joueur comme Choquet, qui a beaucoup apporté au club. Nous avons fait un communiqué de presse qui exprime notre position par rapport à son poids dans notre histoire : malgré cela, en tant que président, je ne pouvais pas adopter une posture de reconduction automatique eu égard à son passé avec le club. Ce serait une décision irresponsable de ma part. J’ai mis cela entre les mains de l’expert technique, le coach. Or, quand la deadline est arrivée, je n’en avais pas. Je me suis dit que je n’allais pas le laisser attendre deux semaines de plus. Je l’ai libéré de cet engagement et je lui ai dit qu’on le faisait par prudence, il ne pourra pas me dire le contraire, et que si le nouveau coach estimait avoir besoin de lui, on repartirait avec lui sans aucun souci. Le club est conscient de sa déception, de sa frustration. Le club l’a écrit, et ce sont mes mots : si nous avons été maladroits dans le timing, j’en suis franchement, sincèrement, désolé. Je ne pense pas qu’une maladresse éventuelle doive avoir pour conséquence de jeter l’opprobre sur un club, une institution, où l’on a joué neuf ans. Le dossier est clos à mes yeux : je respecte Édouard Choquet et tout ce qu’il a fait au club en tant que joueur et en tant qu’homme. »

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