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[Reportage] Trois jours en immersion avec la Chorale de Roanne à Marseille

Pendant plus de 48 heures, BeBasket a pu suivre la Chorale de Roanne à l'occasion de sa venue à Marseille pour y défier Fos-sur-Mer, lors de la 10e journée de Betclic ÉLITE. Entraînements, séances vidéos et même le vestiaire : le club ligérien nous a donné accès à toutes les coulisses de son déplacement. Voici le récit des trois jours en terre provençale de l'équipe de Jean-Denys Choulet.
[Reportage] Trois jours en immersion avec la Chorale de Roanne à Marseille
Crédit photo : Christophe Canet

« Tu nous suis pendant tout le déplacement ? », s’exclame Ronald March, à notre destination, avant de partir dans un grand éclat de rire. « Ben alors pourquoi n’es-tu pas venu jusqu’à Gravelines avec nous ? Si tu voulais vraiment faire les choses jusqu’au bout, il fallait aussi te farcir tout le voyage en train ! » Merci, mais non, trois jours à Marseille étaient déjà suffisants. Avec l’aimable autorisation de Jean-Denys Choulet, la Chorale de Roanne nous a ouvert toutes les portes de son match contre Fos-Provence, malgré le contexte pesant d’une rencontre déjà cruciale dans la lutte pour le maintien. « On n’a rien à cacher », clamait le coach, au moment de nous donner son feu vert. Et ils n’ont vraiment rien caché !

Jeudi 24 novembre

« Allez, on se réveille », exhorte Jean-Denys Choulet sur les coups de 19 heures, dans le rond central du Palais des Sports. L’entraînement s’apprête à démarrer mais les mines sont fatiguées, la faute à une longue journée de voyage. Victorieux la veille en Coupe de France à Gravelines, les Choraliens se sont réveillés à 6 heures pour traverser la France en train, de Lille Europe à Marseille Saint-Charles, via une escale à Lyon Part-Dieu. Alors qu’il vit ce qui devient une rareté personnelle, à savoir la découverte d’une nouvelle salle pour sa 23e saison dans l’élite, le technicien ligérien donne l’exemple en sifflant une canette de Red Bull avant le début des hostilités. « Moody n’en a pas bu assez lui », sourira-t-il quelques minutes plus tard. Car comme pour certains de ses coéquipiers, la courte nuit se ressent dans l’attitude du meneur américain.

« Celle-là ne marche que si c’est Stevie Wonder ou Gilbert Montagné en face »

Logique après 1 800 kilomètres avalés en 30 heures. Alors Jean-Denys Choulet n’a de cesse de pousser ses troupes. « Je sais que vous êtes fatigués mais let’s go guys ! » Après 50 paniers marqués sur des situations de pick and roll sans défense, une opposition est mise en place. Les Blancs d’un côté (Ona Embo – Foster – Moendadze – Gant – Morin), les Bleus de l’autre (Moody – March – Bruyas – Roos – De Sousa), le premier à trois points l’emporte. Mais pour valider un point, il faut marquer deux paniers d’affilée. « Ça sent la méningite ça », glisse l’assistant-coach Guillaume Quintard. Bingo : quelques instants plus tard, Yannis Morin se tourne vers le team manager, Frédéric Titre, qui tient les comptes. « On est à 1-1 là ? » Non, il y avait 1-0 pour son équipe, qui prendra régulièrement le dessus sur les Bleus. Derrière la ligne de fond, JDC oriente, conseille, pousse ses joueurs, appelle les systèmes, applaudit, s’agace aussi parfois. « Tu as les mains palmées ? », demande-t-il à Silvio De Sousa, quand celui-ci n’attrape pas un ballon. « On dirait un canard colvert », poursuit-il en rigolant. Quelques instants après, Yannis Morin expédie une passe dangereuse, interceptée par un adversaire. « Tu m’en fais une par match des comme ça ! Celle-là ne marche que si c’est si Stevie Wonder ou Gilbert Montagné en face. » Alors que la séance était censée s’étirer jusqu’à 20h30, l’opposition sera finalement interrompue à 20h10, après une petite alerte au niveau de l’épaule gauche de Kadri Moendadze. L’ailier avait déjà été impliqué dans une collision, au début de l’entraînement, avec JaKeenan Gant. « Pierrot, je crois que tu vas avoir un peu de boulot ce soir », lance Frédéric Titre au kiné, Pierre Vernet. Il s’occupera effectivement de l’épaule du Mahorais, d’une phalange d’Arthur Bruyas enflée suite à un dunk, du cou de Ronald March bloqué dans le train… « En post-voyage, il y a souvent des bobos donc il y a pas mal de soins à faire », souligne celui qui est chargé de la rééducation et de la réathlétisation. « Avant un match, il faut aussi faire les straps et les boissons. Surtout, le kiné a un rôle de confident. Les joueurs me parlent beaucoup, alors qu’ils ne vont pas directement aller voir le coach, donc je peux servir de relais. J’ai une part importante à jouer dans la psychologie du sportif. »

Depuis la touche, Jean-Denys Choulet surveille le premier exercice de l’entraînement de la Chorale jeudi soir

 

Thanksgiving dans une chambre d’hôtel

En dévalant les marches du Palais des Sports, Jean-Denys Choulet partage sa satisfaction. « Vu que les mecs se sont levés à 6h du matin, ce n’était pas trop mal ce soir. » Le coach est le premier à quitter la salle, repartant à l’hôtel en longeant le Stade Vélodrome. L’occasion d’évoquer son beau-frère, Frédéric Kassoyan, Marseillais pur jus, footballeur formé à l’OM (1973/75) qui a ensuite fait une honnête carrière d’attaquant en deuxième division (45 buts en 117 matchs avec Avignon, Toulouse et Martigues).

Jean-Denys Choulet devant le Vélodrome, là où son beau frère jouait il y a presque 50 ans

Le dernier jeudi de novembre, de l’autre côté de l’Atlantique, c’est Thanksgiving, l’une des plus grandes fêtes de l’année. Un jour sans match en NBA, pour que chacun puisse le passer en famille, autour d’une dinde. Sur les bords de la Méditerranée, les Américains de la Chorale le célèbreront d’une toute autre façon… « Ce qu’on a fait pour Thanksgiving ? On s’est entraîné », soupire Ronald March. Avant qu’ils ne commandent tous un Uber Eats dans leur chambre. « On a bu un peu de vin aussi, mais c’était tout », ajoute le capitaine. L’envers du décor de la vie d’un basketteur professionnel américain à l’étranger…

Vendredi 25 novembre

Maxime Roos et Arthur Bruyas font face à la basilique Notre-Dame-de-la-Garde sur le Vieux Port

Aucun créneau d’entraînement n’étant disponible avant 19 heures, les Choraliens ont quartier libre d’ici là ! Enfin, pas tous, puisque Frédéric Titre doit trouver une laverie pour les maillots suite au match de Gravelines. La lessive effectuée, le team manager peut partir en vadrouille sur les plages du Prado, via la promenade Borély. Jean-Denys Choulet ira aussi respirer le bon air marin au même endroit, même si en fin connaisseur de Marseille (sa femme est originaire du quartier de Saint-Antoine), il aurait aimé emmener ses joueurs découvrir les calanques. Un membre de la délégation ligérienne franchira quand même les limites du Parc national : le kiné Pierre Vernin, arrivé en courant jusqu’au sommet de Marseilleveyre, l’un des plus beaux panoramas sur la ville et la Méditerranée. « Ça m’a fait changer d’avis sur Marseille », admet-il, et ce malgré une vilaine chute dans la descente. À quelques kilomètres de là, un quatuor s’aventure aussi dans les rues phocéennes, profitant de la douceur du climat provençal, grand soleil et 20 degrés au mercure en ce vendredi. Guillaume Quintard, Maxime Roos, Arthur Bruyas et Kadri Moendadze visitent ainsi le Mucem, musée emblématique de la cité phocéenne, et le Vieux Port. « Je n’allais pas dormir jusqu’à 15 heures », s’amuse l’ancien ailier d’Aix-Maurienne, tout à sa joie de n’avoir mangé que de la nourriture comorienne depuis qu’il a débarqué dans le Sud. « J’envoie des photos à ma femme, elle est deg’ ! On n’en trouve pas à Roanne alors qu’il y a beaucoup de restaurants ici. »

Des mauvaises surprises…

Autant de temps libre dans un déplacement n’est pas chose courante. Habituellement, les équipes arrivent la veille du match et ne dérogent pas au rituel hôtel – entraînement – dîner – shooting – sieste – collation – match. Là, le 1/16e de finale de Coupe de France à Sportica a changé la donne. « C’est très rare d’avoir deux jours sur place », acquiesce Moendadze. « Moi, ça m’arrange ! Ça tombait bien que ce soit Marseille car il y a une forte communauté mahoraise donc j’ai vu des amis. En plus, je voulais visiter la ville et franchement, c’est très beau ! »  Après deux jours d’affilée passés dans les transports, d’autres ont préféré opter pour un repos intégral. En arrivant à 17h30 dans le salon de l’hôtel, Ronald March ne s’en cache pas. « Je n’ai rien fait de la journée, à part traverser la rue. » Non pas pour trouver un travail, mais bien pour trouver à manger…

À de multiples égards, ce déplacement à Marseille sort de l’ordinaire, avec de nombreuses mauvaises surprises qui se multiplient concernant l’hôtel, un quatre étoiles situé dans le huitième arrondissement, aux portes des quartiers Sud, soit à quelques encablures des environs cossus de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Pas de restaurant, déjà, forçant tout ce beau monde à manger dehors, avec une enveloppe de 20 euros par repas. Ce soir-là, le staff s’est retrouvé dans un établissement thaïlandais. Les Ligériens se sont aussi heurtés à l’absence de parking. Ainsi, les deux minibus loués dans une agence proche de la gare resteront cloitrés au Palais des Sports pendant deux jours, contraignant la délégation à faire les allers-retours à l’hôtel à pied (15 minutes de marche), au grand dam de certains Américains. Idem, la location d’une salle vidéo coûtait 400 euros. Soit autant d’entraves pour Frédéric Titre, obligé d’improviser, alors que son poste requiert une anticipation permanente. « En juillet, quand le calendrier sort, il faut, par exemple, regarder si on ne va pas au Mans pendant les 24 heures ou à Monaco pendant la Formule 1 ou le tournoi de tennis. J’ai l’habitude d’aller dans les mêmes villes, dans les mêmes hôtels. On fait tout en bus d’ordinaire. Là, on est venu en train car on joue à 15h15, on peut repartir dans la soirée. Aussi, c’est très avantageux financièrement : nos billets retour nous coûtent 279 euros en tout. » Pas négligeable lorsqu’on dispose d’une enveloppe dédiée de 90 000 euros pour la saison…

Pas le bon maillot ? 50€ d’amende pour Stefan Moody

Pendant la séance vidéo, Jean-Denys Choulet expose trois systèmes fosséens

Pour la séance vidéo, la Chorale a finalement trouvé une solution de repli : la faire directement au Palais des Sports. « Au moins, on va bien voir », lance un joueur en découvrant les trois écrans de télévision connectés à l’ordinateur du coach. Pendant un petit quart d’heure, Jean-Denys Choulet fait défiler les slides, entrecoupés de graphiques et de pastilles vidéo, préparés à distance par son assistante Émilie Duvivier. Ce sont d’abord les statistiques qui sont présentées, l’occasion, par exemple, de prévenir qu’il est inutile de sortir fort à trois points sur le pivot Shevon Thompson mais qu’il serait contre-productif de l’envoyer sur la ligne des lancers-francs (82%). Tout y passe : la comparaison des statistiques collectives, les points par possession, la part de tirs pris par chaque joueur, les rebonds, les passes décisives, l’évaluation à la minute… Enfin, l’ancien entraîneur de Vrigne-les-Bois détaille trois systèmes fosséens, à l’aide d’images récoltés lors des trois dernières sorties de Betclic ÉLITE des BYers, et explique la tactique pour les contrecarrer. « On va la travailler à l’entraînement ensuite ! » Place à la défense méridionale. « Il y a vraiment des choses à faire ! » Dans la salle, personne n’intervient, tous semblent écouter.

Écouter, c’est une chose. Comprendre, c’en est une autre. Dès la première mise en situation, Jean-Denys Choulet éructe. « Voilà, c’est exactement ce qui se me casse les couilles ! On dit un truc en vidéo puis on fait exactement l’inverse ! » Dans le viseur, les deux rookies, Kyle Foster et Silvio De Sousa, qui ont encore le plus grand mal à saisir toutes les subtilités tactiques du jeu à l’européenne. Une trappe était prévue vers la ligne médiane sur le meneur, censée autoriser seulement une longue passe (donc dangereuse), avec l’ailier-fort qui défend sur le pivot et le poste 2 sur le 3, mais le ballon arrive pourtant en haut dès la première tentative… Stefan Moody est lui plus rompu au jeu continental mais reste étourdi : l’ancien meneur de Minsk écopera d’une amende de 50 euros pour un défaut de code vestimentaire. Censé être dans l’équipe bleue, finalement reversé avec les blancs puisqu’il n’était venu qu’avec un t-shirt gris, l’Américain semble manquer de leadership, très peu loquace. Un silence qui contraste avec son homologue Renathan Ona Embo, beaucoup plus vocal. Le Parisien sera l’un des acteurs majeurs de la soirée, envoyant un swish de loin, dix secondes avoir été tancé à ce sujet par Jean-Denys Choulet. « Tu ne viens jamais pour shooter, jamais ! » Néanmoins mécontent de son adresse globale, le petit frère de Carl s’astreindra à une séance de tirs supplémentaire en compagnie de Guillaume Quintard après.

Sous l’oeil des deux coachs, une opposition pour conclure l’entraînement vendredi soir

D’une intensité relative, comme toujours en veille de match, l’entraînement est pourtant de qualité médiocre. « Les gars, je sais que ce n’est pas facile de s’entraîner le soir après n’avoir rien fait de la journée mais je vous demande juste de faire les choses sérieusement pendant cinq minutes », lance JDC en plein milieu. « On a vraiment besoin de cette victoire, c’est un match plus important que le BCM ! » Trois oppositions en mode « make it, take it » feront la maille pour ce vendredi. Ronald March râle sur « la chance » de l’équipe bleue mais la bonne humeur revient après le huddle. Silvio De Sousa lance un éternuement à faire sursauter le Palais des Sports, tout le monde rigole. « Quelqu’un pourrait-il me dire : à tes souhaits ? » , supplie-t-il. C’est finalement Stefan Moody qui s’exécutera, après de longues secondes, depuis l’autre côté de la salle. « Merci », sourit le fils de Jean-Jacques Conçeião, avant de s’engager dans un débat animé avec Renathan Ona Embo. « Arrête de flopper toi ! » Le meneur tricolore répond en remettant en doute la qualité de ses écrans, à grand renfort de mimes. À côté, Yannis Morin et Kadri Moendadze sont pliés. C’est finalement Kyle Foster qui viendra apporter l’argument décisif, au soutien de son poste 1.

Samedi 26 novembre
Avant le match

Un entre-deux programmé à 15h15 bouleverse encore les habitudes par rapport à un match à 20h. Alors contrairement aux usages, la deuxième séance vidéo est programmée avant le shooting matinal, soit à 9h30. Cette fois, Jean-Denys Choulet présente individuellement tous les joueurs de Fos-Provence, leurs qualités, leurs défauts, etc.« Attention aux rebonds offensifs avec Trevon Scott ! » Toutes les explications sont agrémentées de trois – quatre extraits vidéos, montrant les zones préférentielles de chacun, leur go-to-move, comment il faudrait les jouer, etc… « Tout le monde connait Johan Passave-Ducteil, il vous fera plein de feintes mais il faut exploiter son manque de mobilité en défense, particulièrement sur les picks. »

« Le seul jour où je leur fous la paix »

Des sourires après le shooting, surtout pour Arthur Bruyas, vainqueur du concours du milieu de terrain

Le Franc-Comtois se met ensuite en retrait lors du shooting. « Le matin du match, c’est le seul jour de la semaine où je leur fous la paix », nous explique-t-il. « C’est leur moment à eux, ils font leurs routines. » Avec, quand même, une petite touche personnelle avant les rencontres à domicile. « Je mets tout le temps de la musique ! Tout le temps. J’essaye de contenter tout le monde, donc je mets un peu de tout : du blues, du rock, de la musique africaine, du zouk, du reggae, pas trop de rap. C’est sympa, je pense qu’on a besoin de ça le matin du match. Parfois, il y en a qui dansent, quand tu leur mets Earth Wind & Fire. Je le fais aussi car c’est une question de culture : si je peux leur faire découvrir deux – trois choses en musique aux petits jeunes… » En revanche, domicile ou extérieur, le shooting se conclut toujours de la même façon : par un concours du milieu de terrain, où le perdant amènera le prochain petit-déjeuner. Cette fois, alors que Arthur Bruyas fut le premier à se mettre à l’abri, Renathan Ona Embo et Silvio De Sousa se sont disputés l’avant-dernière place. Et c’est bien le rookie angolais qui peut aller se préparer à passer une commande de croissants et pains au chocolat…

Samedi 26 novembre
Match

Assis au milieu du vestiaire, Maxime Roos engloutit une compote. D’autres privilégient une canette de Red Bull. Tout le monde revient progressivement d’une première séance d’échauffement et les tapes dans les mains s’enchaînent. Nous sommes à 35 minutes de l’entre-deux du match de la peur contre Fos-Provence. Assis à côté de Ronald March, Jean-Denys Choulet s’apprête à prendre la parole, dans sa voix grave chargée d’un anglais parfait.

« Silvio, je vais te demander un truc en plus… »

« Avant de parler de ce match, je voudrais revenir sur le dernier. Ce n’était pas facile à Gravelines mais vous avez fait le boulot, vous avez bien défendu. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que si vous décidez de défendre, vous pouvez arrêter n’importe qui ! Que si vous défendez ensemble, vous pouvez battre tout le monde, à domicile comme à l’extérieur. Aujourd’hui, c’est un match spécial. Si l’on veut rester en Betclic ÉLITE, et c’est pareil pour Fos, cette rencontre compte double. Si l’on veut faire mieux et atteindre les playoffs comme certains d’entre vous l’ont proclamé, il est plus qu’important de repartir avec cette victoire. Après, on recevra Cholet à la maison mais je ne m’en fais pas car je vous connais les mecs ! Je sais comment vous êtes ! Quand vous jouez des grosses équipes, vous êtes toujours à 200%, je n’ai rien besoin de vous dire. Maintenant, ce qu’on doit faire, c’est jouer Fos-sur-Mer comme si on affrontait l’ASVEL. » Sur son tableau, le technicien bisontin rappelle ensuite les trois systèmes révisés la veille à l’entraînement et énumère les clés de la rencontre. « Pas de balles perdues. Pas de tirs stupides à trois points. Placer Passave-Ducteil dans des situations de pick and roll. Stopper les contre-attaques, en faisant attention aux fautes antisportives. Jouer intelligemment en faisant circuler le ballon. On a fait un bon match en Coupe donc continuons. J’ai entendu certains de vous dire qu’il fallait deux – trois victoires d’affilée. Alors faisons-le ! »

Un dernier huddle avant de pénétrer sur le parquet

Enfin, Jean-Denys Choulet se tourne vers son pivot, De Sousa. « Silvio, je vais te demander un truc en plus. Tu ne vas pas jouer le prochain match donc cela signifie que tu vas te donner à 400% aujourd’hui. Mais 400% avec le cœur et les jambes sans la tête, cela ne voudrait rien dire. Pas de fautes offensives, une bonne défense, des rebonds, on a besoin de toi ! OK ? » D’une petite voix, l’Angolais lui répond. « Got you, coach. » Le capitaine Ronald March lance le cri de guerre (« 1, 2, 3, Together ! ») puis les joueurs se réunissent une dernière fois, entre eux, dans l’intimité du vestiaire, avant de prendre possession des planches du Palais des Sports.

Le banc roannais observe l’une des nombreuses trappes de la soirée, ici sur Garlon Green

Le long de sa ligne de touche, Jean-Denys Choulet sourit. Alors que les joueurs sont prêts à en découdre, la ville de Marseille rend hommage à Serguei Tatchian et l’ancienne maire Michèle Rubirola étire un peu trop son discours, retardant l’entre-deux. Ce sera la dernière trace de légèreté avant le buzzer final pour lui. À 8-7 pour les BYers, un dunk sur un rebond offensif de Garlon Green suscite les premiers signes d’agacement. Cinq minutes plus tard, Maxime Roos conteste la passe de Barbitch vers Thompson et l’intercepte. « Voilà ! », s’écrie le coach en se tournant vers ses titulaires rappelés sur le banc, alors que Fos avait déjà atteint son écart maximal de la soirée (16-9). Pris entre quatre yeux dans le vestiaire, Silvio De Sousa signe son entrée en jeu en envoyant Johan Passave-Ducteil au sol lors d’une lutte sous les panneaux pour aller égaliser (20-20) et reçoit les applaudissement appuyés de JDC. La Chorale se met à bien jouer et le banc s’anime, mais l’inconstance guette. La défense suspecte de Renathan Ona Embo ou l’individualisme de Ronald March contrarient le coach. « Passe cette putain de balle », crie-t-il, après un tir forcé de son capitaine. Ce qui n’empêche pas Roanne de virer à la mi-temps avec quatre points d’avance (36-40).

Recadrage à la mi-temps

Un étage sous le parquet, les 13 membres de la délégation ligérienne – et BeBasket, donc – attendent Maxime Roos, retenu par les caméras de France 3. En arrivant, l’ancien ailier de la JL Bourg effectue le traditionnel tour du vestiaire pour taper dans toutes les mains.« Honnêtement, on peut faire bien mieux que ça les gars », démarre Jean-Denys Choulet. « Ils n’ont scoré sur des contre-attaques ou sur des rebonds offensifs. » Feuille de stats en main, Guillaume Quintard égrène les chiffres, en même temps. « Huit rebonds offensifs en 20 minutes, c’est une blague ! », reprend l’entraîneur doubiste. « 10 points sur 36 à cause des rebonds offensifs ! Il faut que l’on défende mieux ! Mettez plus de pression sur la balle, comme Moody l’a parfaitement fait. Surtout quand c’est Barbitch en face, ce n’est pas un pur meneur. Ray (Ona Embo), tu ne peux pas rentrer et te mettre à courir trois mètres derrière les écrans. Défends sur ton mec coco, mets toi en pression, tu viens de rentrer ! Aussi, je crois que l’on peut plus courir, que l’on plus bouger le ballon. Ce n’est pas grave d’être maladroit ! On est à 36% à deux points et on n’est mené que de quatre points… » Deux fois d’affilée se trompe-t-il sur le score. Personne ne moufte la première fois. La deuxième, certains osent le reprendre. « C’est pareil, ça ne veut rien dire quatre points. Plus le temps va passer, plus ils vont avoir la pression. Alors défendons fort dès le troisième quart-temps ! » Avant de libérer les fauves, il rappelle une dernière fois le cœur de son message. « La clef, c’est le rebond offensif et stopper les contre-attaques ! »

La Chorale était en mission pour décrocher sa troisième victoire de la saison à Marseille (photo : Christophe Canet)

La seconde période reprend par un cas d’école : trois fois d’affilée, les Choraliens vont trapper Stephen Brown, comme travaillé à l’entraînement, pour compliquer la passe. Aucune interception n’en résulte, mais cela grippe tout de même l’attaque bucco-rhodanienne et Roanne s’envole (36-46). De fait, le banc est de plus en plus au soutien. « Merci mon gros ! » ou « Yes sir ! » peut-on y entendre. Les errances de la table de marque, d’abord signalées par Maxime Roos, qui met du temps à attribuer à Shevon Thompson sa quatrième faute, contribuent à faire redescendre l’enthousiasme, de même que la sortie colérique de Yannis Morin, contraint de se faire cinq points de suture à la lèvre suite à un coup involontaire de son ex-coéquipier Johan Passave-Ducteil. Son remplaçant Silvio De Sousa se signale dès son retour par une faute offensive évitable alors qu’il était en situation de mismatch sur Milan Barbitch. « À chaque fois, il va m’en faire une », peste son coach. Alors que la Chorale semble encore en contrôle (46-56), Jean-Denys Choulet lâche un juron suite à un nouveau dunk de Garlon Green consécutif à une contre-attaque très mal gérée par Stefan Moody puis crie « Mets le ! », vingt secondes après, sur une claquette ratée de De Sousa, malgré la faute de Scott. L’instinct de l’entraîneur qui sent le tournant raté ? La fin de troisième quart-temps est effectivement catastrophique avec un 0-7 pour ramener les BYers à 53-56…

La délivrance, au bout de l’angoisse…

« Deux victoires d’affilée, c’est bon pour le moral », savoure Jean-Denys Choulet (photo : Christophe Canet)

Au vu de l’enjeu, le stress s’accroît au bord du parquet. Critiqué par son coach pour sa défense dans les vestiaires, Ray Ona Embo se met en pression sur… Milan Barbitch et provoque la balle perdue du Provençal, comme prophétisé par JDC à la mi-temps. Le meneur jubile, le coach applaudit sa joie démonstrative. Une satisfaction de courte durée : Ron March a beau prendre les choses en main avec six points d’affilée, la Chorale n’arrive pas à endiguer le jeu rapide de Fos-Provence. « C’est pas possible », capte-t-on à la 36e minute, à 70-70. Au fur et à mesure des lancers-francs ratés, l’exaspération se lit de plus en plus dans l’attitude du double champion de France, dodelinant de la tête à chaque échec. La gestion douteuse de Stefan Moody donne des sueurs froides au banc ligérien (78-75, 40e minute) mais le meneur aux dreadlocks provoque lui-même le miracle en décrochant la prolongation d’un tir à plus de huit mètres (78-78). Accroupi au bord du terrain, comme souvent, Jean-Denys Choulet appelle lui-même la majorité des systèmes de son équipe au cours des cinq minutes supplémentaires. Les Roannais continuent de laisser filer des points faciles sur la ligne de réparation mais la défense est enfin au niveau. Kadri Moendadze étouffe Dylan Affo Mama, tandis que deux trappes, évidemment, permettent de voler deux ballons à Milan Barbitch. Alors que Kyle Foster s’apprête à tirer les deux lancers-francs de la victoire (83-85 à 6,5 secondes du buzzer final), Choulet se relâche enfin et gratifie Moendadze d’un grand sourire. Quand la sirène retentit, il lève les deux poings et félicite immédiatement son ailier tricolore. « Yes ! Yes ! », répète le facteur X du soir. Guillaume Quintard exulte aussi, Ronald March souffle, Yannis Morin applaudit. Seul Frédéric Titre se précipite pour plier serviettes et surmaillots, avant d’aller faire les valises. Il est 17h15 et le rush démarre pour aller attraper le TGV de 19h, timing rendu serré par la prolongation.

« Même si l’on n’avait gagné que d’un demi-point… »

Dans le vestiaire, l’atmosphère est beaucoup plus légère. Cette fois, les high-five n’ont pas valeur d’encouragement, mais de félicitations. « Il faut que l’on se dépêche, on a le train bientôt, donc je ne vais pas parler longtemps », interrompt Jean-Denys Choulet. Dans l’intimité de l’équipe, le technicien loue deux hommes : Kadri Moendadze, pour sa défense, et Kyle Foster, pour son sang-froid lors des lancers-francs décisifs.

Le discours de Jean-Denys Choulet, capté par les caméras de France 3, après la victoire

Quelques instants plus tard, en conférence de presse, il associera le jeune arbitre Jordan Waller (27 ans) à ses félicitations publiques. « L’arbitrage a été cohérent, et ça me fait plaisir. Je me dis que tout n’est pas perdu, ça m’a un peu réconcilié avec eux car on fait un boulot où l’on dépend beaucoup de ça. » Devant les journalistes, il aborde les sujets qui fâchent, son impuissance devant la maladresse aux lancers-francs (qui viennent pourtant conclure chaque séance d’entraînement), et la séquence problématique de Silvio De Sousa. « C’est simple, Silvio De Sousa nous a fait une Silvio De Sousa ! Passage en force, faute offensive, perte de balle, lay-up raté, lancers ratés… C’est malheureux car ce ne sont pas des tricheurs mais il en faut toujours un qui passe à travers. » Serviette sur la tête dans les vestiaires, le rookie angolais avait d’ailleurs conscience de ne pas avoir été à la hauteur de l’aparté d’avant-rencontre, visage fermé pendant le discours de son coach. Où l’heure était simplement au soulagement après un road-trip productif.« Même si l’on n’avait gagné que d’un demi-point, je n’en aurais rien eu à faire. Il fallait l’emporter, on l’a fait, cela nous fait deux victoires d’affilée. Concentrons-nous sur Cholet maintenant ! »  321 jours que la Chorale n’avait plus connu les joies d’une victoire à l’extérieur en Betclic ÉLITE… Mais pas le temps de savourer, ou presque. Dès lundi, tout recommence !

À Marseille,

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