Logo Bebasket
Recherche
Recherche
Logo Bebasket
  • À la une
  • Betclic Élite
  • Pro b
  • National
  • Coupes d'Europe
  • Équipe de France
  • Jeunes
  • Féminines
  • Interviews
  • Hooper
  • Camps

« Ce n’est que du kif » : la nouvelle vie de Florent Piétrus en Nationale 2

Véritable pan de l'histoire du basket français, Florent Piétrus a renoncé au monde professionnel pour terminer tranquillement en Nationale 2 avec Metz. Nous avons passé une soirée en sa compagnie.
Crédit photo : Let's Go Metz / Matthieu Henkinet

Rassurez-vous, Florent Piétrus n’a pas changé. Samedi dernier, à Prissé, il y est allé de sa petite faute technique au cœur de la deuxième mi-temps. « Pour flopping par contre », soupirait-il. « C’est à l’appréciation de l’arbitre ça, il peut très bien estimer que l’on a floppé alors que ce n’était pas le cas. » Le mystère restera entier sur la réalité ou non de ce flop mais ce coup de sifflet sera comptabilisé comme sa quatrième technique de l’automne, lui qui a déjà été suspendu à Tremblay le 6 novembre pour en avoir pris trois depuis le début de la saison. Toujours aussi enclin à parlementer avec les officiels, le Guadeloupéen n’a au moins rien perdu de sa verve avec le corps arbitral.

Pour le reste, tout est différent, ou presque. Après une dernière pige réussie à Orléans début 2020, à l’heure où un mystérieux virus chinois commençait à se propager dans le monde entier, Florent Piétrus (2,02 m, 40 ans) est devenu le plus gros CV de Nationale 2, rejoignant les rangs de Metz. « Est-ce qu’il est venu ici en préretraite ? Ah non, pas du tout », s’insurgerait presque son entraîneur Stéphane Frentzel. « Il n’est pas du tout dans cette optique là et ça ne correspond pas à sa mentalité. Il ne demande aucune indulgence par rapport à sa situation, il est vraiment un joueur comme les autres. Que ce soit physiquement, dans la façon dont il se prépare pour les entraînements ou en match, il reste très pro. »

Des adversaires surmotivés face à lui

Les joutes hebdomadaires des Canonniers n’ont certes pas grand chose à voir avec ce que l’intérieur a connu au cours des deux décennies précédentes mais il pouvait difficilement débarquer en dilettante en Moselle au vu de l’emploi du temps hebdomadaire de son club : un entraînement quotidien, et même deux les mardi et jeudi, soit un rythme soutenu pour de la quatrième division. Avec, dans le viseur, un objectif évident : débarquer en NM1 le plus tôt possible, idéalement dès cette saison. « Le club a de grosses ambitions, c’est pour ça que je suis venu ici », consent le Ministre de la Défense. D’où les signatures conjuguées de deux autres anciens pros : Loïc Akono, ex-fort meneur de Pro B, et Gary Florimont, en provenance directe de Jeep ÉLITE (Orléans). « Quand on affronte Metz, ça change de l’ordinaire en Nationale 2 », affirme Frédéric Brouillaud, l’entraîneur de Prissé-Mâcon.

Ce qui a pu jouer des tours aux Grenats depuis le début de saison. « On a vraiment ressenti qu’on était l’équipe à battre », avance Stéphane Frentzel. De fait, pourtant favori évident de la Poule D, Metz a démarré par quatre défaites lors des six rencontres initiales, battu par Gennevilliers (65-73), Charleville-Mézières (75-79), Lons-le-Saunier (70-81) et Récy-Saint-Martin (82-96). « On n’avait pas imaginé cela », admet Piétrus. « On prétendait vraiment à mieux, ça a été très compliqué. » Depuis, les Lorrains semblent lancés, désormais sur une série de quatre victoires de rang. « La route reste longue », prévient-il néanmoins, lui qui est également parfaitement conscient qu’il devra batailler chaque semaine face à des adversaires galvanisés à l’idée de croiser le fer avec une légende du basket français. « C’est quelqu’un que j’encourageais devant ma télévision donc c’est sûr qu’il y a plus de motivation contre lui », reconnait Aziz Dia, l’intérieur de l’ESPM, l’un de ses vis-à-vis direct samedi dernier. « C’est l’occasion de se mesurer à un exemple, à quelqu’un qu’on a toujours suivi. C’est excitant, il y a de l’adrénaline en plus. »

Samedi dernier, Metz passait un gros test face à l’Étoile Sportive Prissé-Mâcon, véritable bastion de la Nationale 2, invaincue à domicile depuis le début de saison. « Recevoir quelqu’un comme Florent Piétrus, c’est un évènement, un honneur et un plaisir », apprécie le président bourguignon Jean-Philippe Lachaize. Devant une affluence toutefois moindre qu’à l’accoutumée dans cette commune viticole (à cause du France – Nouvelle-Zélande en rugby ou du Beaujolais nouveau ?), l’homme aux 230 sélections démontre qu’il reste en parfaite forme physique en disputant… l’intégralité du premier quart-temps. Pour une contre-attaque conclue seul et un rôle de distributeur, sorte de plaque tournante de l’équipe messine, trouvant souvent les shooteurs comme Alexandre Karolak (22 points à 8/12) dans des positions ouvertes. « Le coach veut que j’ai le ballon entre les mains pour prendre les meilleures décisions possibles », explique-t-il. De plus en plus vocal à l’approche du money-time, Florent Piétrus semble surtout tenir un rôle de grand frère. Lorsque Alexandre Karolak met un pied en touche, il l’encourage : « Ce n’est pas grave, allez ! ». Lorsque le Mâconnais Thibault Chevigny trouve la cible au buzzer du troisième quart-temps alors que Stéphane Frentzel avait expressément demandé de ne pas laisser de shoot lointain, il rassure ses coéquipiers : « Bonne défense les gars, gros tir ! ». Lors de certaines situations défensives du quatrième quart-temps, on l’entendra également souvent crier « Parlez-vous les gars ! » depuis le banc…

Avant de devenir directeur sportif, une cure de jouvence à Metz :
« Je suis là pour m’amuser comme un gamin »

Vainqueur 92-79 en Saône-et-Loire, Metz aura bénéficié de 9 points à 2/4, 5 rebonds, 1 passe décisive et 5 fautes provoquées en 24 minutes de son joueur vedette, à créditer de 7,1 points de moyenne depuis le début de la saison. Complètement futile à ses yeux… « Pour être honnête, je m’en fous royalement de mes performances. Je ne me prends pas la tête par rapport à ça, je n’ai strictement rien à prouver à qui que ce soit, y compris à moi-même. » Toujours est-il que Florent Piétrus reste parfaitement crédible sur un terrain. « Physiquement, il est solide, toujours là : il leur apporte sa science du jeu et les tire vers le haut », souligne Frédéric Brouillaud. « Il reste droit dans ses bottes par rapport aux valeurs qu’il avait lors de sa carrière professionnelle », ajoute Stéphane Frentzel. « Flo est très précieux dans son intelligence de jeu et sur l’intensité qu’il peut mettre en défense. Lors de notre dernier match contre Joeuf-Homécourt, c’est lui qui a sonné la révolte défensive. » Parait-il même qu’il s’est jeté par terre pour sauver un ballon, tel un France – Espagne en demi-finale… « Ah ben oui, on m’a dit derby donc il fallait se mettre en condition derby », se marre-t-il. « Il me reste cette rage de vaincre. C’est quelque chose qui ne changera jamais, je me donnerai toujours à fond. »

Un ADN inchangé, peu importe le décor… En NM2, Florent Piétrus découvre un nouveau monde : les déplacements en bus le jour de la rencontre, la longue attente en tribunes pour que le match des jeunes se termine avant de pouvoir aller s’échauffer… « Et le fait de devoir prendre ton linge après l’entraînement pour laver chez toi », fait-il remarquer en rigolant. Un niveau de jeu différent aussi, bien sûr, notamment « dans l’approche, le côté tactique, la lecture et la connaissance du jeu. » Même si dans l’ensemble, l’ancien Palois est « très surpris par le niveau général de la Nationale 2 où ça pratique un bon basket », à l’image du leader Récy-Saint-Martin qui l’a impressionné dans « sa façon de jouer ensemble et son basket très collectif ». Exit aussi les belles salles pour débarquer dans des gymnases parfois beaucoup plus champêtres. « Quand c’est du revêtement plastique par terre, ça marque », sourit-il. « Mais en même temps, j’apprécie de revenir dans des salles comme ça, ça me rappelle mes années cadets. On trouve aussi des publics de connaisseurs, comme ici, à Prissé. »

Parallèlement, à Metz, Florent Piétrus est largement tourné vers sa reconversion. S’il a obtenu son diplôme d’État, elle ne se fera pas dans un costume d’entraîneur. « J’aime bien transmettre mais être coach, ce n’est pas fait pour moi, je n’ai pas cette fibre. » En revanche, le métier de directeur sportif l’attire beaucoup plus… « Oui, c’est vraiment ce que j’ai envie de faire », acquiesce-t-il, lui qui suit actuellement une formation  DU « développement sportif d’une structure professionnelle de basketball » à l’université de Grenoble. « J’aimerais aider un club à se structurer et à grandir. » De quoi pleinement justifier le choix de Metz qui vise la Pro B sous cinq ans… « Leur projet est très solide », d’autant plus que les Canonniers envisagent très sérieusement de créer un centre de formation, où le triple champion de France devrait être impliqué. « Cela ne verra que le jour que si on fait le travail sur le terrain, tout est conditionné par nos résultats sportifs. » Soit gagner pour permettre à Metz de prendre son envol, mais aussi gagner pour vraisemblablement arrêter de jouer… « Je ne sais pas si c’est ma dernière saison, cela dépendra de ce que je veux faire. Mais si on va en Nationale 1, c’est sûr que je ne suivrai pas. La NM2, là, c’est déjà limite vu notre rythme d’entraînements et mon temps de jeu (il sourit). Le haut-niveau, c’est terminé pour moi. Mais je suis vraiment investi dans le projet messin et j’espère l’amener au bout. »

D’ici là, Florent Piétrus profite pleinement du crépuscule de sa carrière et de ses tous derniers moments passés sur les parquets. « Mon mot d’ordre, c’est de prendre du plaisir. Je ne me prends plus du tout la tête, je tente beaucoup plus de choses et j’ai baissé mes exigences, tant envers moi-même que mes coéquipiers. Je suis là sans aucune pression. J’ai fait le bon choix en venant à Metz : je suis là pour profiter du basket et m’amuser comme un gamin. Ce n’est que du kif. » Histoire aussi de pouvoir continuer à faire du Florent Piétrus sur un terrain et à entretenir sa réputation. « Il reste un peu une fouine, c’est ça qui est bon », glisse Aziz Dia dans un sourire. Non vraiment, même en Nationale 2, il n’a pas changé…

À Prissé,

Commentaires


Veuillez vous connecter afin de pouvoir commenter ou aimer
Connexion