Les souvenirs de Jamal Shuler : « Kareem Reid a sauvé ma carrière »
Entre 2014 et 2016, il était l’une des terreurs de la Pro A, au sommet de son art avec Nanterre et Monaco. Un arrière pas très grand (1,90 m) mais alerte, souple, félin, un acrobate en somme. Élu dans le meilleur cinq de la saison en 2015/16 (15,8 points à 39%, 3,9 rebonds et 2,9 passes décisives), l’équilibriste Jamal Shuler (36 ans) a marqué à son échelle la dernière décennie du championnat de France.
Agréable en dehors des parquets, il s’est surtout taillé un palmarès plus que respectable au cours de ses sept saisons tricolores : l’EuroChallenge remporté en 2015 avec Nanterre, agrémenté du trophée de MVP du Final Four, le doublé 2016 – 2017 en Leaders Cup avec l’AS Monaco (en étant élu MVP de la finale en 2016) puis le dernier Match des Champions de l’histoire, en 2017 sous les couleurs nanterriennes. Avant de basculer complètement vers le nouveau chapitre de sa vie, en Virginie, Jamal Shuler a jeté un dernier d’œil dans le rétroviseur en notre compagnie, deux mois après l’officialisation de l’arrêt de sa carrière professionnelle.
Jamal, vous avez annoncé votre retraite en janvier mais vous n’aviez pas joué depuis février 2021. Avez-vous simplement dévoilé votre décision tardivement ou est-ce que cela a contribué à votre départ ?
Non non, j’étais en pleine réflexion. J’attendais la bonne occasion pour revenir dans le circuit. Pour tout vous dire, j’avais même signé un contrat en Slovaquie mais j’ai finalement dû rester aux États-Unis pour des raisons familiales. Cela fait un an que je n’ai pas disputé un match officiel donc je savais que les équipes allaient se poser de plus en plus de questions sur mon état de forme, etc. Je suis en paix avec la décision d’arrêter.
« Je vais vous raconter une histoire que les gens ne connaissent pas »
Revenons en arrière. La France du basket a découvert votre nom en 2010/11 lors de votre passage à Vichy. Quels souvenirs gardez-vous de cette saison dans l’Allier ?
La première chose qui me vient à l’esprit, c’est un évènement que les gens ne connaissent pas. On peut dire que mon coéquipier Kareem Reid a sauvé ma carrière. Vichy voulait me couper pour faire venir un autre arrière et il est venu me voir : « Je sais que tu as une famille, j’ai une offre de Rouen, je vais l’accepter et j’ai dit au club de te donner une autre chance et de te conserver toi. » La JAV m’a finalement gardé et c’est quelque chose que je lui dois entièrement. Je lui dois presque ma longévité. Kareem Reid s’est sacrifié pour moi, il fallait le dire, personne n’était au courant. D’habitude, personne ne fait ça, personne ne va aller se sacrifier pour un autre. Après coup, il y a eu ce fameux tir (au buzzer du milieu de terrain à Limoges) et j’ai enchaîné plusieurs matchs à plus de 20 points. Lors de la dernière journée, on croit qu’on arrive à se maintenir grâce à notre victoire contre Chalon mais les résultats sont fous et tout le monde gagne.
En 2010, Vichy est allé chercher Jamal Shuler en Allemagne
(photo : Olivier Fusy)
Avez-vous déjà pensé à ce qui se serait passé si Vichy vous avait coupé ?
Qui sait ? Quand la JAV pensait à me remercier, j’avais quelques contacts en Allemagne ou en Belgique mais je suis ravi que les choses se soient déroulées comme ça. Quand j’ai appris que Vichy voulait me couper, ça a été une vraie gifle pour moi. À la base, j’avais été recruté comme stoppeur défensif et tout apport offensif de ma part ne serait que du bonus. Et lorsqu’ils négociaient mon départ, ils me disaient que je n’étais pas assez décisif offensivement, que je ne marquais pas assez. Or, je ne faisais que ce que l’on m’avait demandé au début ! Quelque chose a changé après ça, je suis devenu plus agressif.
« Si Cedrick Banks n’avait pas sauté… »
Et quid de ce tir à Beaublanc ? Le shoot le plus fou de votre carrière ?
Bien sûr ! Je suis passé de zéro à héros en quelques secondes. J’allais être celui qui avait coûté le match contre un concurrent direct à cause de son 0/2 aux lancers-francs. Heureusement, Antoine (Eito) m’a passé la balle alors qu’il aurait pu la donner à n’importe qui d’autre. Si Cedrick Banks n’avait pas sauté, je ne pense pas que j’aurais marqué d’ailleurs. Mais il a contesté le tir, j’ai dû mettre plus d’amplitude et ça a fini par taper la planche pour tomber dedans.
Après une équipe reléguée en Pro B, vous êtes passés directement à Nancy, pensionnaire d’EuroLeague. Un grand saut…
Oui, un très grand saut même. Et je vais vous raconter une autre histoire que les gens ne connaissent pas : j’avais discuté avec Jean-Luc (Monschau) juste avant leurs playoffs et il me disait qu’il m’aimait bien. Ses mots exacts étaient : « Si l’on ne gagne pas le championnat, je vais te faire signer mais si l’on remporte le titre en EuroLeague, alors on sera en EuroLeague et je ne sais pas, ce sera entre les mains du président. » Du coup, moi, j’espérais qu’ils perdent en playoffs. Quand ils ont gagné, j’ai dit à ma femme : « Bon ben je crois qu’on n’aura plus de nouvelles de leur part. » (il rit) Heureusement pour moi, Jean-Luc m’a quand même rappelé et m’a donné ma chance.
Ce qui vous a aussi permis de vivre l’une des époques les plus folles de l’histoire contemporaine du basket français : le lock-out NBA et la présence de Nicolas Batum dans votre équipe.
Exactement, j’ai pu côtoyer quotidiennement des joueurs NBA ! Ce match contre l’ASVEL avec Tony Parker et Ronny Turiaf, c’était comme un film. Avec l’équipe que nous avions cette saison-là, tout le monde s’attendait à nous voir gagner le titre. Malheureusement, une fois que le lock-out s’est terminé, nous avons eu du mal à remplacer Nico : deux ou trois joueurs se sont succédés (Kenny Gregory, Bernard King, Jimmy Baxter) et ça n’a pas marché. Après, c’était impossible de vraiment remplacer Nico tant il nous apportait de par sa vision du jeu et ses qualités athlétiques. Même s’il ne tournait pas à 20 points de moyenne, il était super efficace.
6 novembre 2011 : le match le plus médiatisé de l’histoire contemporaine en Pro A ?
(photo : François Pietrzak)
Mais au milieu de tout ça, personnellement, vous avez réussi ce fameux grand saut…
Après ce qui s’est passé à Vichy, je suis arrivé avec l’envie d’être agressif des deux côtés du terrain. Jean-Luc avait confiance en moi et John Linehan m’a tellement aidé offensivement, en me cherchant constamment. J’ai vraiment apprécié mes deux années à Nancy, c’était super !
« Nous sommes la dernière équipe à avoir remporté l’EuroChallenge »
Et ensuite, vous êtes parti à Nanterre pour une seule saison, mais une saison historique avec ce lay-up inoubliable de T.J. Campbell en finale de l’EuroChallenge…
Jusqu’à ce jour, je suis convaincu que sans les blessures de Kyle (Weems) et Big Jo (Passave-Ducteil), on aurait gagné le titre avec cette équipe. Notre groupe de dix joueurs était vraiment solide : un bon cinq de départ, un banc costaud. Malheureusement, nous avons été frappés par les pépins physiques en playoffs mais c’était une équipe incroyable, l’une des plus soudées aussi. Ces gars-là sont encore comme des frères pour moi aujourd’hui. Je suis encore en contact avec tout le monde.
L’EuroChallenge n’est peut-être pas la compétition la plus prestigieuse mais remporter une Coupe d’Europe reste forcément quelque chose de grand ?
Bien sûr. Tout le monde nous disait que c’était la C3, etc, mais c’était aussi la dernière édition de l’EuroChallenge sous ce nom. Être la dernière équipe à avoir remporté ce trophée restera historique, quoiqu’il arrive. Vu de l’EuroLeague, certainement que l’on regardait cette compétition de haut mais on a affronté beaucoup de bonnes équipes et on est allé gagner ce Final Four en Turquie, dans une ambiance hostile. Donc c’était grand !
Le dernier trophée de l’EuroChallenge s’est installé à Nanterre
(photo : Olivier Fusy)
Ce trophée de MVP du FInal Four vous a propulsé dans une autre dimension et vous avez décidé de rejoindre le promu monégasque. Avec Amara Sy, vous avez été la première signature d’envergure de l’AS Monaco.
C’était assez fou car je me rappelle de mes conversations avec coach Mitrovic. Il me disait que le club essayait de faire venir des joueurs référencés en France mais que personne ne les prenait au sérieux car ils arrivaient de Pro B, qu’il n’y avait soi-disant pas de supporters, etc. Mais personnellement, j’ai vraiment cru en ce qu’il m’a dit au téléphone et ça s’est transformé en une histoire magnifique ! La Principauté de Monaco nous a tellement bien accueillis, certains supporters sont devenus des membres de la famille et sur le terrain, j’en faisais une affaire personnelle que les gens s’intéressent au basket, pas qu’au foot. Et ça s’est bien passé !
« J’essayais chaque année de revenir en France »
La Roca Team est en chemin vers les playoffs de l’EuroLeague maintenant. Y-a-t-il une vraie fierté de votre côté d’avoir été là au début de l’histoire ?
Complètement. Même si nous ne sommes pas quittés dans les meilleurs termes possibles, le président Dyadechko et Oleksiy (Yefimov, le directeur sportif) ont toujours érigé l’EuroLeague en objectif. Lors de ma deuxième saison sur place, le but était vraiment de gagner la Champions League pour intégrer le giron de l’EuroLeague. Je suis heureux pour eux, Yak (Ouattara) y est revenu et il est comme un petit frère pour moi. Je garde encore de fortes relations avec certaines personnes à Monaco. J’espère qu’ils vont continuer dans cette voie : tout ce qui est en train d’arriver au club ne va faire que renforcer les projecteurs sur le basket en Principauté, favoriser son exposition.
Avec Amara Sy, Jamal « Shooter » a été la première star monégasque en Pro A
(photo : Sébastien Grasset)
Votre première saison à Monaco a été exceptionnelle, la seconde beaucoup moins. Globalement, vos deux dernières années françaises, entre l’ASM et Nanterre, ont été assez délicates non ?
C’est vrai. J’ai été embêté par des blessures lors de toute ma deuxième saison à Monaco. Je me suis assez sérieusement blessé à la cheville lors du premier match de BCL contre Francfort. Honnêtement, j’aurais dû m’arrêter un mois pour récupérer entièrement mais le club me disait que j’étais le meilleur joueur de l’équipe, qu’il fallait que j’aide un peu, qu’ils en avaient besoin. Et vu que je suis un compétiteur, j’ai accepté de jouer ! Au final, je me suis blessé au mollet et je n’ai jamais pu revenir en forme après coup. Ensuite, étant donné que nous avions une super relation, Pascal (Donnadieu) a parié sur moi avec Nanterre, que je pourrais revenir à 100% de mes moyens. J’ai été capable de le faire en Champions League mais pas en Pro A. Ça a altéré ma réputation auprès des autres équipes en France : j’ai quand même eu une offre de Châlons-Reims, car Cédric (Heitz) faisait partie du staff technique à Nancy, mais l’affaire ne s’est pas conclue. Depuis, j’essayais chaque année de revenir en France mais il y avait toujours des questions concernant ma santé, ma capacité à jouer à ce niveau, etc. J’ai quitté le championnat de France sur une mauvaise note mais je pense avoir acquis le respect de mes pairs et des supporters.
« Le meilleur joueur français ? Lahaou Konaté »
Effectivement, vous appartenez à la caste des joueurs étrangers les plus respectés de la dernière décennie en France. C’est quelque chose qui n’est pas neutre à vos yeux ?
Oui, j’en suis fier ! Je n’ai jamais manqué de respect au basket français, à la culture française et je crois qu’on vous rend ce respect quand vous le montrez. Même en déplacement, même dans des salles chaudes, je n’ai jamais manqué de respect aux supporters adverses. Idem avec les arbitres, les gens de la table de marque, les employés des clubs, etc. Peu importe mon niveau de performance, j’ai toujours cherché à être une bonne personne.
Le Nancéien Jamal Shuler lors de la présaison 2011 face à Fabien Causeur et Cholet
(photo : Olivier Martin)
Vous avez aussi joué en Allemagne, en Ukraine, en Israël et en Grèce : la France est-elle le plus marquant de votre carrière ?
Bien sûr ! J’ai disputé l’EuroLeague avec une équipe française, remporté l’EuroChallenge avec un club français, gagné la Coupe Disney (Leaders Cup)… Toutes mes meilleures performances individuelles en Coupe d’Europe l’ont été sous un maillot français. Et c’est aussi là-bas que j’ai gardé les meilleures relations avec les supporters. Comme je l’ai dit, je remercie encore Kareem Reid, je remercie encore John Linehan pour m’avoir montré les ficelles du métier. Sept années dans le même pays, ce n’est pas anodin.
« Axel Toupane, celui qui m’a donné le plus de fil à retordre »
Qui est le meilleur joueur avec qui vous avez joué en France ?
Ouh, c’est dur… Alors je vais vous donner un Américain et un Français. Je vais dire Kyle Weems car il était tellement polyvalent. À Nanterre, il jouait 3-4 mais il pouvait dépanner sur le poste 5 et je suis persuadé qu’il pourrait jouer 2 si on lui demandait. C’est un bourreau de travail et sa carrière est brillante depuis son année à la JSF. Si vous avez besoin d’un joueur clutch, déterminé et doté d’un bon QI basket, c’est Kyle Weems qu’il vous faut ! Comme Français, Lahaou Konaté car je me rappelle de ma première saison à Nanterre, on avait affronté son équipe de Pro B (Évreux) lors d’un match amical. Je ne connaissais pas son nom mais je me disais : « Qui que ce soit ce jeune, s’il arrive à s’acheter un shoot, il va être très bon… » Il était tellement athlétique, tellement intense. Je l’ai dit pendant le match et plusieurs années, on s’est retrouvé coéquipiers ! J’ai pu voir son éthique de travail, voir qu’il avait réussi à développer un vrai tir à trois points. Pascal lui a donné la liberté de jouer son jeu et on voit le résultat. Bon, j’aurais aussi pu dire Nico (Batum) si j’avais joué une saison entière avec lui mais je n’ai pu voir qu’un petit échantillon en quelques semaines. Comme tous mes coéquipiers qui ont joué en NBA, je l’ai bombardé de questions à ce propos : « Quel est le joueur le plus difficile à défendre, à affronter ? », etc.
Sous les yeux de Shuler, Lahaou Konaté monte au panier
(photo : Sébastien Grasset)
Même question pour le championnat de France : qui était le joueur le plus difficile à affronter ?
Celui qui m’a donné le plus de fil à retordre, c’était Axel Toupane ! J’aimais vraiment l’affronter. Je me souviens que ça avait même été le cas lorsque j’étais en Ukraine, avec le Khimik Yuzhne, puisqu’on avait joué Strasbourg en EuroCup. Il était toujours physique, dur, ne baissait les yeux devant personne. Comme pour Lahaou, je m’étais dit qu’il n’aurait pas de limite s’il parvenait à développer un vrai arsenal offensif. Je suis heureux de voir qu’il est de retour en France avec Paris. Inversement, Rodrigue Beaubois était très dur à défendre : il pouvait avoir un coup de folie incroyable en scorant 25 points en 10 minutes. Lui, quand il est chaud, il est vraiment chaud ! Et il faut aussi que je mentionne John Cox, lui savait vraiment tout faire.
Votre meilleur ami dans le championnat de France ?
Oh non, je ne peux pas en dire qu’un seul. C’est une vraie confrérie : Mam’ Jaiteh, Big Jo, Lahaou, Jérémy Nzeulie, Jo Gomis, Zack Wright, Dee Bost, Kyle Weems, Frank Elegar, Aaron Cel… Si j’ai été coéquipier avec toi, j’ai plus passé de temps avec toi que ma propre famille (il rit). Nous sommes devenus des frères. Français ou Américains, je suis ami avec tout le monde.
« En pleurs devant Pascal Donnadieu pour ne pas être suspendu »
Le coéquipier qui a le plus d’influence sur vous ?
John Linehan. Encore aujourd’hui, je continue à lui écrire afin de lui demander des conseils. Il est assistant-coach en NCAA (aux Georgia Bulldogs). Il me ressemble dans le sens où il trouve du positif dans chaque situation et c’est lui qui donne les meilleurs conseils possibles ! Je lui dois beaucoup.
Et le coach ?
Coach Mitrovic, bien sûr. C’était le type de coach avec qui vous pouviez avoir un désaccord sans que cela ne vous soit préjudiciable pour la suite. Quelqu’un de déterminé dans tout ce qu’il faisait. Je respecte également beaucoup Pascal Donnadieu. C’est lui qui m’a vraiment donné l’occasion d’exprimer la pleine mesure de mon jeu lors de ma première saison à Nanterre, qui a continué à croire en moi en me faisant revenir ensuite. Mais justement, un désaccord avec lui pouvait être nocif pour la suite. Je ne veux pas manquer de respect à Pascal, c’est quelqu’un que j’aime à la folie, mais je dois le dire : on jouait un match décisif pour la première place du groupe de BCL en Belgique (à Ostende, 60-73) et j’ai eu l’impression pendant la rencontre qu’il acceptait en quelque sorte la défaite qui se profilait parce qu’on avait un match contre Monaco le week-end en Pro A. Il m’a sorti du terrain et ça a un peu chauffé entre nous car je suis un compétiteur : même à -15 dans le troisième quart-temps, je vais croire que l’on a une chance de revenir grâce à un dernier run. La rencontre suivante allait être mes retrouvailles avec Monaco, j’étais super excité et il s’est servi de cette altercation pour menacer de me suspendre. D’ailleurs, ce n’était même pas une altercation : dans l’intensité du moment, je disais juste un peu agressivement que l’on pouvait battre Ostende. Mais quand ils m’ont dit que je n’allais pas affronter Monaco, je me suis retrouvé à pleurer : « S’il vous plait, ne me suspendez pas, laissez-moi jouer ce match ! ». Ce qu’ils ont fait et on a gagné de 30 points (99-69). Avec du recul, je crois que cet incident en Belgique a accéléré la fin de mon parcours en France. Mais je le répète, j’apprécie énormément Pascal, son père (Jean), son frère (Frédéric), coach Franck (Le Goff) et l’ensemble du club de Nanterre.
17 points pour Shuler lors de ce fameux match contre Monaco le 21 janvier 2018
(photo : Olivier Fusy)
Quel est le moment où vous vous êtes senti le plus fort sur le terrain ?
La première saison à Monaco. Je me souviens avoir été catastrophique lors du premier match à Antibes (4 points à 1/5) mais après ça, j’ai eu un déclic. On ne jouait qu’une fois par semaine. On s’entraînait extrêmement dur les lundi et mardi, il y avait beaucoup de travail individuel. Je n’étais pas le seul à avoir connu une bonne saison : D.J. Cooper et Adrian Uter aussi, Yakuba Ouattara était en train de se révéler. Peu importe la défense en face de moi ou l’adversaire, j’étais tellement en confiance cette saison-là. Dans le money-time, coach Mitrovic comptait sur moi. C’était une excellente saison ! Et je ne sais pas si l’on a été reconnu à notre juste valeur : au vu de là où on nous attendait et notre classement final, premier avec le statut de promu, Zvezdan Mitrovic aurait dû être élu coach de l’année et j’aurais pu être plus haut dans le classement final du MVP. J’ai terminé quatrième derrière Devin Booker, Juice Thompson et Rodrigue Beaubois. Par exemple, par rapport à Juice, il jouait à Pau, dans un club historique, avec énormément de supporters. Ça peut jouer dans ce type de scrutin, on l’a aussi vu avec D.J. Cooper la saison suivante. À Monaco, nous étions simplement en train de construire notre fan-base. Après, j’étais honoré de pouvoir être mentionné dans la discussion pour le trophée de MVP du championnat.
« On entendait les Chalonnais nous dire de la merde dans le vestiaire… »
Y-a-t-il un match qui vous a particulièrement marqué en France ?
La finale Monaco – Chalon à Disney en 2016. Juste parce que l’on était dans des vestiaires juste à côté le jour des demi-finales et ils se sont qualifiés pour la finale avant nous. On les entendait nous dire de la merde directement : « Vous entendez Monaco ?! Si vous allez en finale, on va vous exploser demain ! » Si vous connaissez comment sont faits les vestiaires à Disney, vous savez que l’on peut tout entendre ! Ça nous a bien motivés… Bien sûr, il y a aussi ce match à Limoges avec Vichy avec le shoot du milieu de terrain mais j’aime quand il y a du trash-talking et que l’on peut faire taire les joueurs avec notre basket. C’est ce que l’on a fait ce jour-là, en finale en plus !
Y-a-t-il un meilleur et un pire souvenir ?
Oh, le pire déjà, il n’y a aucune hésitation : ma blessure avec Nancy en 2012 (rupture des ligaments croisés, ndlr). Au vu de mes performances en présaison, j’étais convaincu de pouvoir être MVP du championnat. Jean-Luc avait construit l’équipe autour de moi et dès le premier match (au Mans), je me blesse gravement au genou. Je n’ai jamais revu les images. Même dix ans après, je ne pense pas en être capable. A contrario, le meilleur souvenir… (il hésite) Eh ben une autre histoire que les gens ne connaissent pas, toujours liée à la Leaders Cup 2016 : je n’ai rien dormi du week-end ! Ma fille est née le 25 janvier, soit quelques semaines avant la compétition, et ma famille est quand même venue à Disney pour la compétition. Ma femme était extrêmement fatiguée tous les jours donc après les entraînements et les matchs, je quittais les repas d’équipe pour partir l’aider et rester debout avec le bébé pendant qu’elle pouvait dormir. J’ai abordé la finale en pensant n’avoir aucune énergie et j’ai finalement battu le record de points de la compétition (31 contre Chalon). Ce record et le trophée dans ce contexte, ça a été un grand moment !
Jamal Shuler et le trophée 2016 de la Leaders Cup
(photo : AS Monaco Basket)
Aviez-vous une salle préférée en France ?
Ouh, c’est compliqué. J’adorais jouer à Pau car on sent l’histoire et c’est une grande salle. J’aimais jouer à Limoges car les supporters sont féroces : après mon buzzer beater, dès que je touchais la balle à Beaublanc, je me faisais huer. J’aimais affronter Strasbourg aussi à cause de Vincent Collet, le coach le plus respecté du pays, sélectionneur national. Ah mais là où je préférais aller, c’était l’Astroballe ! Je crois que j’ai connu certains de mes meilleurs matchs contre l’ASVEL. J’admire ce que fait Tony Parker avec son club. Et bon, jouer contre Charles Kahudi était toujours un challenge intéressant (il rit). Je pense que l’ASVEL possède la meilleure salle de France.
Et maintenant, quelle est la nouvelle vie qui s’annonce ?
Je vais rester dans le basket, que ce soit dans le coaching, l’entraînement individuel, le mentorat… En ce moment, j’entraîne ma fille et ses amies ainsi que des enfants de 12-13 ans. Et j’ai aussi une licence d’agent d’assurance (il rit).





















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