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Marc-Antoine Pellin, prématurément à la croisée des chemins : « Je ne regrette rien »

Presque une décennie durant, il fut l’un des joueurs emblématiques de la Pro A. Éternel visage juvénile, format de poche, véritable cauchemar pour les postes 1 adverses, parfois incapable de remonter le ballon face à la pression exercée par le natif d’Orléans. Mais il a dû tirer un trait sur le professionnalisme bien trop tôt, obligé de disputer son dernier match de LNB à 29 ans, la faute à un genou récalcitrant.

Bien qu’il ne soit pas l’homme d’un club, son nom restera toutefois indissociable de l’histoire de la Chorale de Roanne. Désormais âgé de 32 ans, Marc-Antoine Pellin (1,71 m), c’est surtout une éclosion comme on en a rarement vu à cette échelle. Honnête rotation d’une équipe de bas de tableau pendant ses deux premières années, il est devenu, à 19 ans et du haut de son profil de meneur à l’ancienne, le maître à jouer incontestable des futurs champions de France. Avec une victime collatérale : Tony Skinn, rookie recruté par Jean-Denys Choulet pour devenir le nouvel feu-follet offensif de la Chorale, finalement martyrisé par son anonyme vis-à-vis et renvoyé à ses études en Croatie la confiance brisée, concassé par l’intensité défensive du jeune Pellin.

Artisan majeur du doublé championnat de France – Semaine des As en 2007, meilleur défenseur de Pro A la même année, quadruple All-Star, quatrième meilleur passeur de l’EuroLeague en 2008 juste derrière des pointures comme McIntyre et Papaloukas, international français (8 sélections), Marco Pellin s’est d’ores et déjà éclipé du monde professionnel avec un palmarès qui force le respect. Mais qui sait jusqu’où il aurait pu aller sans cette fragilité certaine au genou droit ? Opéré une première fois en mars 2010, il a dû repasser sur le billard en 2013 et mettre sa carrière entre parenthèses pendant un an et demi alors qu’il jouait le meilleur basket de sa carrière (9,6 points à 53%, 3 rebonds et 6,3 passes décisives pour 14,4 d’évaluation). Un passage à Bourg-en-Bresse gâché par son ménisque en 2015/16 puis une nouvelle saison blanche avec Boulazac, alors qu’il aurait théoriquement pu retrouver la Jeep ÉLITE, constitueront les dernières frustrations de son parcours de basketteur.

Depuis, Marc-Antoine Pellin conjugue le plaisir du jeu avec la découverte de sa nouvelle passion : le coaching. Depuis sa dernière apparition sur la scène professionnelle (le 21 avril 2017 contre Blois), l’ancien pensionnaire du Centre Fédéral n’a pas perdu de temps et s’est lancé avec une envie dévorante dans la préparation de sa reconversion. Plus tard, c’est sûr, Pellin entraînera. Alors, en attendant la fin de cette double casquette, il touche à tout (RM3, U15, U20) et prépare ses diplômes. En parallèle, il a prouvé qu’il pouvait rester une force dominante en Nationale 1 (9,5 points à 43%, 3,5 rebonds et 8,2 passes décisives pour 15,6 d’évaluation en 30 minutes sous les couleurs de Pont-de-Chéruy). Le tout sans forcer, en marchant presque, en s’économisant surtout. Comme après la fin de son expérience périgourdine, le médaillé de bronze à l’EuroBasket juniors 2004 hésite encore sur l’orientation à donner à son futur immédiat. Un projet alliant compétition et reconversion pourrait le tenter mais la suite de sa carrière n’est plus une priorité. Désormais, sa silhouette se dessinera bien plus souvent sur les abords d’un banc de touche. En attendant de passer définitivement de l’autre côté de la barrière, le futur coach a pris le temps de nous raconter le joueur Marc-Antoine Pellin.

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Marco Pellin a été élu meilleur meneur de l’histoire de la Chorale de Roanne
(photo : Olivier Fusy)

Au commencement, des portes qui se ferment vite…

« Je faisais du foot quand j’étais jeune mais ma mère ne pouvait pas emmener tous les membres de la famille aux matchs. Il fallait que tout le monde soit au même endroit, c’est comme ça que je me suis mis au basket. Quand tu es petit, n’importe quel sport avec un ballon t’amuse vite alors le basket m’a plu rapidement.  Après, je pense que j’ai été bon assez rapidement, notamment car j’avais de bons appuis grâce au foot. Le problème, c’est que j’étais assez petit par rapport aux autres. Du coup, même si j’étais dominant, c’était toujours un problème pour aller dans les sélections départementales ou autres, il a vraiment fallu que je montre que j’étais au dessus des autres pour être pris. Ce n’est pas la seule fois où ma taille m’a fermé des portes.  Derrière, j’ai voulu aller au Pôle Espoirs malgré ma faible moyenne générale en cours : ils devaient décider entre deux joueurs et forcément, ils ont pris celui qui était plus grand que moi et qui avait donc soi-disant plus de potentiel. Et ça continuait encore au niveau professionnel : quand je vois que la seule saison approximative que je fais en Pro A après un arrêt d’un an et demi m’a conduit en Pro B.. Je ne pense pas que cela se serait passé de la même façon pour un poste 1/2 de grande taille ayant réalisé la même saison. »

Centre Fédéral (2002/04), entre formation et incompréhension

« Les souvenirs de l’INSEP sont très mitigés. Les bons d’abord : j’ai rencontré de très belles personnes, j’ai eu des coéquipiers qui m’ont aidé à avancer, j’ai eu la chance d’avoir les meilleurs jeunes contre moi. À l’époque, l’INSEP était très sélectif et il n’y avait que les 3 ou 4 meilleures de chaque génération. Chaque entraînement était un vrai affrontement, surtout que j’étais face à Aldo (Curti) qui était un très bon joueur de notre génération. C’était difficile pour moi, il était beaucoup plus physique et il m’a vraiment aidé à progresser. Et il y a l’autre partie, moins positive : je n’ai pas été très à l’aise avec les cadres, ça a été compliqué pour moi avec les joueurs plus âgés et avec les dirigeants de l’INSEP. J’étais jeune, un peu fou-fou, c’était difficile de trouver un terrain d’entente avec eux. J’ai surtout mal vécu mon départ car j’ai appris à seulement deux semaines du début de saison que je n’étais pas conservé. En fait, cela faisait suite au championnat d’Europe juniors de 2004 où j’avais vu un article de BasketNews qui ne m’avait pas plu, disant que je dormais sur le banc  alors que c’était totalement faux. J’ai demandé à ce que l’INSEP et les équipes de France publient un démenti et on m’a répondu que c’était hors de question avant de me mettre dehors.

À l’époque de l’INSEP, j’étais moins défenseur que maintenant. En jeunes, j’étais vraiment capable de dominer offensivement. La réalité, c’est que tout le monde me disait que j’étais un croqueur. J’étais un meneur qui aimait bien terminer plutôt que de faire la dernière passe. C’est avec le temps que j’ai dû changer mon jeu. Même à l’INSEP, j’ai dû défendre fort pour me faire une place mais ce n’était pas vraiment ma marque de fabrique. Surtout, ce n’était pas quelque chose que j’aimais. C’est surtout arrivé chez les pros que je me suis mis à le faire. »

Roanne (2004/10), la tête dans les étoiles :
« Je ne réalisais pas forcément que c’était extraordinaire »

« En sortant du Centre Fédéral, je ne savais pas où je me situais par rapport au niveau professionnel, mais j’avais l’ambition de toucher ce monde. J’étais censé effectuer des tests à Paris, Roanne et au Havre. Je ne suis finalement jamais allé au STB car j’avais été séduit par la Chorale : j’avais fait un entraînement avec les pros, un tournoi avec les Espoirs où j’avais pu montrer que j’étais au dessus de niveau. Et surtout, Jean-Denys Choulet m’a clairement dit que je ferai partie du groupe pro. Ça m’a fait plaisir et j’ai pu faire ma place. À l’époque, c’était rare qu’un jeune comme cela joue des minutes comme je l’ai fait. Mais en même temps, j’évoluais dans une équipe de bas de tableau et je me donnais les moyens pour jouer : que l’on me donne 1 ou 15 minutes, j’étais à 200% en permanence. Je pense que j’ai toujours été exemplaire à l’entraînement ces années-là, j’étais à fond en permanence avec toujours l’envie d’être meilleur que l’Américain devant moi. C’est quelque chose qui n’est jamais parti au fil des années.

2006/07, la saison qui change tout

À un moment donné, il faut bien un peu de chance. Tony Skinn avait signé en tant que premier meneur et est arrivé à Roanne en méforme totale. Je lui ai sauté à la gorge dès le début et derrière, je n’ai pas lâché. Le club a longtemps cherché un premier meneur (Donald Copeland fut notamment pisté avant de s’engager à Paris, ndlr) et n’a pas trouvé. J’ai profité de cette situation, je ne me suis pas défilé, j’ai donné le meilleur de moi-même et j’ai fait de bonnes statistiques au cours d’un début de saison canon de notre équipe. Ce n’est qu’après huit – neuf journées seulement où l’on m’a annoncé que la place de premier meneur, et que le club cherchait finalement une rotation (Domenico Marcario). Honnêtement, je ne savais pas au départ que l’on avait une équipe aussi spéciale. J’étais jeune, je ne calculais ruien, j’avais juste clairement la sensation que je pouvais faire deux fois plus que ce que l’on m’avait donné jusque-là. Je me rappelle d’un match de Coupe de France à 17 ans (Roanne – Hyères-Toulon le 15 février 2005, ndlr) où, Marques Green étant blessé, je m’étais retrouvé à affronter Jason Rowe, alors l’un des meilleurs meneurs de Pro A. J’avais sorti un bon match (11 points et 7 passes décisives, ndlr) et ça me montrait bien que je n’avais pas tort dans ce que je pensais de moi-même. J’avais une grosse confiance et cette saison 2006/07 m’a permis de le prouver à tout le monde. Je n’avais juste aucune idée de à quel point notre équipe était forte. Surtout qu’en présaison, on avait quasiment perdu tous nos matchs. J’étais vraiment jeune à l’époque, je ne calculais pas forcément. Même après la finale contre Nancy, je ne réalisais pas forcément qu’on était champions de France et qu’on avait accompli quelque chose d’extraordinaire. Pour moi, c’était juste une victoire de plus, on ne savait même pas si on serait en EuroLeague, etc. Mais avec le recul, c’est sûr que c’est un match qui a marqué les esprits, on m’en reparle encore aujourd’hui.

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La consécration en 2007, champion de France face au SLUC Nancy de Cyril Julian
(photo : Olivier Fusy)

Tout le monde se rappelle de nos trois Américains (Dewarick Spencer, Aaron Harper et Marc Salyers, ndlr). Ils étaient surdominants. Pape Badiane, notre capitaine, l’était aussi dans son rôle, peut-êre le meilleur joueur défensif de Pro A cette année-là. Derrière, on n’a pas beaucoup parlé des remplaçants, à part peut-être de Laurent Cazalon qui a su prendre en main les choses à certains moments par son culot et qui nous a cruellement manqué lors de sa blessure d’après Semaine des As. Par exemple, ça ne se percevait pas sur les statistiques mais il fallait voir tout le travail effectué par Modibo Niakaté à l’intérieur des vestiaires. Et sur le terrain, il ne se considérait pas du tout comme un remplaçant, peu importe son temps de jeu. Dans sa tête, il était capable d’être titulaire n’importe où et il aurait connu une toute autre carrière sans ses blessures à la hanche. Pareil pour Williams Soliman qui était très longiligne, capable de suppléer Pape et parfois d’être à un niveau supérieur sur certains matchs. Il a accepté son rôle et a été déterminant. N’importe quel joueur de cette équipe était super important, même Domenico Marcario : allez voir combien de joueurs étrangers sont capables d’accepter de jouer 5 minutes sans broncher. Surtout qu’il a montré des choses à chaque fois qu’on lui a montré du temps de jeu. Sans oublier Adrien Moerman qui ne mesurait jamais ses efforts et qui amenait une énergie incroyable à l’entrainement et sur ses courtes entrées en match. L’état d’esprit était très fort, il ne faut pas parler que de trois joueurs.

L’EuroLeague à 20 ans

Je garde de très bons souvenirs de cette campagne. Je me souviens que j’avais réalisé de très bonnes statistiques à ce niveau-là (4,7 points à 42%, 2,9 rebonds et 4,5 passes décisives pour 8 d’évaluation, ndlr) mais je reste dégoûté que nous n’ayons pas pu atteindre le Top 16. On perd d’un point contre le Partizan Belgrade chez nous (87-88), de très peu là-bas (76-82) et il suffisait juste de prendre l’un des deux matchs… C’est mon seul regret. Il faut dire aussi qu’il y avait une grosse différence entre les clubs étrangers et nous : ils changent très peu leurs effectifs, ils ont déjà des machines de guerre en début de saison. Pour eux, c’est une évidence de passer le premier tour alors que nous, quand tu vois notre niveau entre le début de saison en EuroLeague et les playoffs où l’on arrive en finale, cela n’a rien à voir. Ce sont deux équipes totalement différentes. Et évidemment, si on avait pu jouer dans notre salle plutôt que d’aller à Clermont-Ferrand, je pense que l’on se serait qualifié. On aurait pu accrocher plus d’équipes, comme Barcelone (79-89) ou le Fenerbahçe (90-97) qui nous ont gagné de très peu, et éviter de recevoir de grosses gifles telles que le Panathinaïkos (83-123). Parmi les meneurs que j’ai eu le plaisir d’affronter, Sarunas Jasikevicius m’a marqué. Je me rappelle l’avoir vu jouer contre les États-Unis. Là, il était vieillissant, il n’avait plus le même niveau mais sa personne m’a marqué. Après, j’avais trouvé Will Solomon très fort, c’était le moment où il était le meilleur marqueur de l’EuroLeague. Je me souviens qu’on ne s’était pas fait de cadeaux sur le terrain, on avait même été à deux doigts d’en venir aux mains alors qu’honnêtement, je suis obligé d’avouer que c’est l’un des rares meneurs qui m’a totalement dominé. Après, il y a aussi le poste 1/2 de Barcelone (Jaka Lakovic, ndlr). Tout le long du match, il ne marque pas un panier, ils le font passer poste 2 dans le dernier quart-temps et il me marque 17 points sur la tête. C’était vraiment impressionnant, il ne mettait pas un dribble, que du catch and shoot, ça allait trop vite. Au Real Madrid, il y avait aussi Sergio Llull mais que je connaissais déjà puisque l’on s’affrontait en jeunes. Jouer en EuroLeague aussi jeune, sans prétention, ça me paraissait normal ce qui m’arrivait. Je m’étais battu pour ça et je n’étais pas en train de me dire que je réalisais un truc extraordinaire. Je jouais là où je devais jouer, je n’avais pas les yeux qui brillent.

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L’apprentissage à vitesse grand V, face à Jaka Lakovic et d’autres grands du continent
(photo : Olivier Fusy)

Ensuite, avant de tourner la page roannaise, on a fait plusieurs autres finales (Pro A 2008, Final Four de l’EuroChallenge 2010) sans gagner mais nous avons réussi à stabiliser le club parmi le Top 5 de Pro A. Ma relation avec Jean-Denys était particulière. Je pense que le respect qu’il avait envers moi a grandi mais j’étais quelqu’un d’assez fermé à l’époque, incapable de communiquer. Je crois que je n’étais pas facile à manier et on a connu des hauts et des bas avec Jean-Denys. On a gagné des titres ensemble mais on n’a jamais connu une relation très forte. Cela reste quelqu’un que j’ai toujours respecté jusqu’à mon départ, où il y a eu des déclarations qui ne m’ont pas plu et des articles qui m’ont vexé alors que j’étais en rééducation. J’ai mis du temps à pardonner mais notre relation est meilleure maintenant. Tant qu’on était ensemble, cela se passait très bien. Et dès le jour où je lui ai dit que je voulais partir et que je me suis blessé, j’ai vu un tout autre visage. »

L’équipe de France, sentiment d’inachevé :
« Je n’avais pas cette envie de me battre »

« Les Bleus, cela reste un souvenir mitigé. J’ai reçu plusieurs convocations et j’ai toujours eu des petites blessures. En 2007, je n’ai pas pu y aller puisque j’étais touché à l’adducteur. J’ai fait la préparation en 2008 et je n’ai pas été pris au dernier moment parce que Tony Parker revenait et le coach (Michel Gomez) a fait le choix de prendre un autre meneur de plus grande taille qui pouvait jouer sur plusieurs postes (Yannick Bokolo, ndlr) alors que j’avais fait une très bonne campagne. En fait, vu que mes expériences en jeune n’ont pas été très positives, j’ai eu du mal à me forcer à revenir. Non seulement j’étais blessé mais je n’avais pas cette envie de me battre pour revenir à cause de ce qui s’est passé en jeunes. J’avais besoin de souffler pour rebondir. Avec le temps, je regrette… Car j’aurais éventuellement pu participer à un championnat d’Europe en 2007 et cela m’aurait peut-être encore offert une autre carrière si j’avais pu le faire. »

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8 sélections en équipe de France : un statut d’international, mais que des matchs amicaux
(photo : Olivier Fusy)

Le Mans (2010/11), envol frustrant :
« Je ne me sentais pas reconnu comme je le voulais »

« Je reviens de plus de six mois de blessure. On m’a fait venir en me disant certaines choses qui ne se sont finalement pas réalisées… Je me rappelle très bien d’avoir eu l’entraîneur (J.D. Jackson) au téléphone et qu’il m’a dit qu’il avait besoin d’un meneur pour encadrer Antoine Diot et pour gérer les moments chauds. Le problème, c’est que ce n’est pas du tout ce qu’il a montré après. Au début, il respectait ce qu’il m’avait dit puis j’ai remarqué progressivement que cela ne plaisait pas que je jouais autant, que ce n’était pas moi qui devait être mis en avant, bien qu’on gagnait souvent quand je jouais beaucoup. On a décidé de se séparer au bout d’un an d’un commun accord car je ne me sentais pas reconnu comme je le voulais. Il fallait que j’aille ailleurs car je n’étais pas à ma place là-bas en tant que deuxième meneur. »

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Pellin voulait décoller en dehors du cocon roannais mais lui et J.D. Jackson ne se sont jamais compris
(photo : Olivier Fusy)

 Orléans (2011/15), heureux à la maison :
« Philippe Hervé m’a ouvert une autre vision du basket »

« Quand les gens ont appris que j’avais signé à Orléans, j’ai reçu un nombre incroyable de messages. Tout le monde était content de me voir rentrer et ça me mettait une certaine pression, il y a toujours un peu de stress à l’idée de revenir jouer chez soi. Mais je ne calculais pas, j’avais surtout envie de jouer pour une équipe qui me voulait vraiment. J’ai beaucoup grandi aux côtés de Philippe Hervé, pour qui j’ai un très grand respect : il a toujours tenu sa parole avec moi, il m’a vraiment appris beaucoup de choses et m’a ouvert une autre vision du basket en étant capable de mettre des mots sur ce que je savais faire sur un terrain.

2011/12, l’autre saison majeure : à un panier de l’histoire

Au début, tout le monde rigolait en disant qu’on avait une équipe estampillée Quai 54. Tu sentais que cela pouvait partir dans tous les sens si tu allumais la mèche mais au final, on a créé un vrai groupe et on s’entendait super bien. Au niveau de la cohésion d’équipe, du jeu proposé sur le terrain, cela a été l’une de mes meilleures saisons dans le basket professionnel, avec Roanne. Collectivement, nous étions vraiment à un niveau très élevé, meilleur qu’à la Chorale je pense. Il y avait peut-être moins de talent mais collectivement, ça jouait trop bien, tout simplement. Le Match 3 à Chalon m’a énormément marqué. Je ne vais pas revenir sur les fautes d’arbitrage… Quand tu es jeune, on t’apprend que c’est toujours l’équipe la plus agressive qui obtiendra les coups de sifflet dans son sens. C’est ce qui s’est passé là-bas. On essaye de gérer notre avance dans le dernier quart-temps mais on n’y arrive pas du tout, ils nous font une espèce de zone-press où l’on subit. Au final, on perd sur le match sur un coup de sifflet mais il n’y a pas que ça : on aurait dû contrôler le match bien avant.

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Face à Malcolm Delaney, Chalon – Orléans, le duel emblématique de la saison 2011/12
(photo : Sébastien Léger)

Fauché dans son élan

La saison suivante, j’ai joué mon meilleur basket. Statistiquement parlant, j’étais sur les talons d’Antoine Diot. Si je ne m’étais pas arrêté si tôt, j’aurais pu être le MVP Français de la saison. Je comprenais exactement ce que Philippe Hervé voulait mettre en place, cela me correspondait totalement, c’est beaucoup plus facile de jouer dans ces conditions-là. Puis je me pète pendant un an et demi… Il y a pas mal de regrets car j’ai toujours eu l’ambition de jouer ailleurs en Europe. À la fin de mon contrat à Roanne, je me blesse. Et idem après Orléans, alors que je pensais vraiment partir, surtout que j’avais réalisé une très bonne campagne d’EuroCup. J’avais des contacts avec Sassari, Séville ou Charleroi mais au lieu de cela, je me retrouve sur la touche pendant 18 mois. Ma dernière saison avec l’OLB fut difficile. J’étais considérablement gêné par mon genou. Quand tu veux te donner à fond, ce n’est plus toi qui décide mais ton corps, c’était totalement nouveau pour moi. Je regrette car je sais que je joue l’une des moins bonnes saisons de ma carrière. Collectivement, l’équipe mise en place était assez particulière, pas aussi forte que les années précédentes. Et mon apport personnel a été beaucoup plus faible. Depuis mes premières années à Roanne, je n’étais pas habitué à me retrouver dans le bas du classement. »

L’intermède Pro B (2015/17), loin d’être inoubliable

« Avec Bourg, nous avons longtemps été dans les clous des objectifs fixés, jusqu’à un mois avant le début des playoffs. Je me suis de nouveau blessé là-bas, j’ai dû être opéré du ménisque, et je pense que ça a chamboulé pas mal de choses. Derrière, le départ de Georgi Joseph nous fait très mal puis le club change d’entraîneur à la veille des playoffs en faisant venir Gregor Beugnot (en lieu et place de Christophe Denis, ndlr). C’est compliqué de tout changer au dernier moment et d’espérer gagner un titre avec une nouvelle équipe. On se fait botter au premier tour par Le Portel et ce n’est pas anodin ce qui est arrivé, Le Portel était bien plus en place que nous. Nous étions juste une somme d’individualités. En dehors du terrain, on ne s’entendait pas, il n’y avait pas du tout de complicité dans cette équipe.

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En cumulé, Marco Pellin a manqué plus de trois saisons à cause de blessures
(photo : Vincent Janiaud)

Ensuite, je pars à Boulazac. Le club a atteint l’objectif en remontant en Pro A mais j’ai été obligé de m’arrêter deux mois avant la finale. C’est simple : je n’ai jamais rejoué en pro depuis. J’ai fait un genou contre genou avec un joueur de Poitiers, cela m’a abîmé mon cartilage et depuis, je ne peux plus tenir le rythme professionnel. Je n’ai jamais pu être à 100% en Pro B après ma grosse blessure d’Orléans: j’avais du mal à reprendre, j’avais du mal à retrouver mes sensations, je compensais beaucoup… »

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Leaders Cup Pro B 2016 avec la JL Bourg ou la montée de Boulazac en 2017 :
autant de joies vécues par procuration en Pro B (photo : Vincent Janiaud)

Une reconversion toute tracée :
« Je me suis découvert une vraie passion »

« Lors de ma dernière année de contrat à Boulazac, où je n’ai pas joué, j’ai commencé à entraîner. J’ai pris une équipe de Régionale 3, l’AOL Basket, et je me suis découvert une vraie passion. Ça a été un gros plaisir de les accompagner et je n’ai pas arrêté depuis. J’ai eu après des U15 puis des U20 cette saison avec qui nous étions invaincus avant l’interruption du championnat. Cela fait déjà trois expériences que je juge très bonnes et cela me donne vraiment envie de poursuivre là-dedans. J’ai obtenu mon DE-JEPS l’an dernier, je passe le DAVB cette année. J’aimerais devenir coach à un niveau intermédiaire (NM2, NM3) pour poser les bases, apprendre un maximum. Je pense que le basket y est beaucoup plus simple qu’au niveau professionnel : pour y avoir joué, je trouve que cela va chercher beaucoup moins loin. Il y a donc possibilité de tester des choses, se faire une idée dans le management, pour ensuite aller vers le haut niveau.

Le coach qui m’a le plus inspiré, c’est Philippe Hervé, et de loin. Pour moi, il est vraiment en avance sur son temps. Toutes les discussions que j’ai avec lui sont extrêmement enrichissantes : j’estime avoir une très gros connaissance basket et quand je parle avec lui, il est encore capable de m’emmener plus loin dans la réflexion. En terme de formation, Frédéric Crapez et Raphaël Gaume m’ont beaucoup appris aussi et j’apprécie également discuter basket avec eux. Après, bien sûr, tu prends un peu tout ce que t’as aimé chez tous les coachs mais vu que j’entraîne à des niveaux inférieurs, tu ne peux pas reproduire des choses de Pro A. Tu ne peux pas remettre en place des choses de Pro A, tu es obligé de simplifier fois 10. Je suis un coach très exigeant défensivement qui laisse une liberté mesurée en attaque, avec beaucoup de jeu de relance et des systèmes correspondant aux joueurs que j’ai devant moi. »

 Pont-de-Chéruy (2018/20), que du bonus

« Si je suis allé à Pont-de-Chéruy, c’est surtout par rapport à l’entraîneur (Moatassim Rhennam) avec qui j’avais déjà des liens auparavant. Il m’a contacté alors que je comptais vraiment arrêter ma carrière par rapport à mon genou. Cela me permettait de passer mes diplômes, tout en continuant encore à jouer un peu, donc j’ai dit oui. La première saison en Nationale 2 était vraiment agréable avec une belle bande de potes, cette année en NM1 fut dans la continuité. Si la saison ne s’était pas terminée, on aurait pu être un gros danger dans cette deuxième phase. Nous avions l’une des équipes les plus physiques du championnat, des joueurs en pleine évolution et qui ont repris confiance ici comme Lionel Gaudoux ou Issife Soumahoro. On a prouvé à tout le monde que Pont-de-Chéruy n’est pas venu en NM1 pour faire de la figuration mais pour jouer dans le haut de tableau.

Au-delà de mon rôle de joueur, le coach me considérait limite comme son premier assistant. Cela m’arrivait de faire les vidéos pour l’équipe par exemple. On échangeait beaucoup ensemble, on s’apprenait des choses mutuellement et cela m’a aidé à avancer pour ma reconversion. Maintenant, je joue beaucoup plus avec ma tête. OK, je joue 30 minutes de moyenne mais honnêtement, il y a peut-être 15 minutes où je vais être à 100%. Sur le reste, je suis dans la gestion, je fais jouer les autres, j’essaye de faire progresser le collectif. J’arrive à créer le jeu sans forcément me dépenser physiquement. J’arrive à créer le jeu sans forcément me dépenser physiquement. Je suis plus en train d’essayer de passer le flambeau plutôt que de tirer la couverture vers moi. Et à côté, j’ai un rythme aménagé : je ne peux plus m’entraîner deux fois par jour, je me contentais de trois ou quatre entraînements par semaine.

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Ici masqué par ses coéquipiers, Marco Pellin faisait office de deuxième entraîneur au SOPCC
(photo : Gérard Héloise)

Aujourd’hui, je me pose encore la question d’arrêter maintenant ou pas. Soit je me lance vraiment dans le coaching et je dis stop, soit je poursuis un peu car je prends encore beaucoup de plaisir. Une chose est sûre : mes choix basket seront assimilés à ma reconversion. Je n’irai pas signer quelque part en sachant qu’il n’y a pas en parallèle une place pour me perfectionner dans ma reconversion ni de réel objectif. Si je remets un maillot, c’est qu’il y a quelque chose de bien qui m’attend ensuite en terme de coaching. J’ai effectivement été en contact avec Saint-Vallier mais pour le moment, nous avons simplement discuté. »

Quel bilan ?

« Cette discussion là, je l’ai souvent. Et je vais vous répondre honnêtement : je ne regrette rien. J’ai fait ce que j’avais à faire et j’en suis fier. Certains vont dire que j’aurais pu faire beaucoup plus, moi le premier, mais je n’ai pas de regrets. Le fait de ne pas avoir fait autre chose m’a amené là où je devais être. Pour moi, jouer au basket ne revient pas qu’à essayer d’aller chercher le plus haut niveau. C’est aussi faire des rencontres et il y a de très belles personnes que je n’aurais jamais rencontré si j’avais été ailleurs. Surtout, cela aurait été beaucoup plus difficile pour moi de me dire que j’allais arrêter le basket. Cela m’a permis de prendre du recul, de me rapprocher de ma famille, de beaucoup de gens et pour cela, je ne regrette rien. »

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