« Je m’en veux beaucoup », pestait Nicolas Batum dans les coursives de l’Arena Carioca de Rio de Janeiro le 17 août 2016. Comme quatre ans plus tôt, les Bleus venaient de se faire sortir des Jeux Olympiques dès les quarts de finale par l’Espagne (67-92), avec une prestation absolument catastrophique de leur futur capitaine : 0 point et 0 rebond en 18 minutes. Une performance fantômatique suscitant l’irritation de la France du basket et qui allait être à l’origine d’une mini-polémique suite à ses déclarations d’après match, laissant échapper toute sa frustration quant à son utilisation. « C’est dur et humiliant de sortir de cette façon. […] Je pense que ma prestation est à l’image de mes deux dernières années en équipe de France. Mon rôle a changé et j’ai eu du mal à m’adapter à ça. Avant j’étais 2, maintenant, je passe limite 3 et ce n’est plus du tout le même rôle. Ce qu’on me demande de faire en club est différent de ce qu’on me demande de faire en équipe de France. Je ne peux pas avoir la même production et j’essaye de m’adapter, de mettre mon ego de côté et de me mettre au service de l’équipe. J’essaye de jouer à fond et de faire ce qu’on me dit de faire. J’aurais pu refuser mais je sais que c’est pour le bien de l’équipe. Bien sûr que je suis en colère parce que je sais que je peux montrer plus et j’aimerais bien le faire. »
Rio 2016 : un regard désabusé qui traduit toute la détresse de Nicolas Batum contre l’Espagne(
photo : FIBA)
Lors de sa campagne suivante, à l’occasion de la Coupe du Monde 2019 en Chine, Nicolas Batum avait déjà eu l’opportunité de se rattraper grâce à une deuxième mi-temps fantastique lors de la petite finale contre l’Australie afin d’offrir la médaille de bronze à l’équipe de France. Mais du haut de son titre de champion d’Europe et de ses cinq médailles internationales, il subsistait tout de même une petite ombre sur son formidable CV avec la sélection : les Jeux Olympiques. Et l’ancien ailier du Mans en était tout à fait conscient.
« J’étais nerveux », a-t-il avoué à L’Équipe. « La seule chose qui me manque, c’est une médaille olympique. On ne pouvait pas perdre ce match. À cause de la façon dont on a perdu les deux quarts des dernières éditions (en 2012 et 2016), et de la manière dont j’ai joué les deux, il fallait que je fasse quelque chose de différent. »
Désormais, Nicolas Batum n’est plus qu’à une victoire d’une médaille olympique, deux du plus grand accomplissement de l’histoire du basket français Neuf ans après le coup de Londres, cinq ans après le cauchemar brésilien, ce fameux quart de finale olympique n’est plus insurmontable (victoire 84-75) et le Normand n’y est pas étranger. Dans la lignée de ses 20 points à Cagliari pour son premier match couperet en barrages de l’EuroBasket 2009 (contre l’Italie déjà…), de sa demi-finale fabuleuse contre la Russie en 2011 ou de ses 62 points en 20 heures pour décrocher la première mondiale en 2014, l’homme de confiance de Vincent Collet a réalisé l’une de ses toutes meilleures performances sous le maillot national pour sa 153e sélection.
Il a fallu un énorme Batum pour que la France puisse écarter une Italie aussi accrocheuse qu’atypique
(photo : FIBA)
Au four et au moulin, dans tous les bons coups des deux côtés du parquet et décisif dans le money-time pour ne rien gâcher, Batum a écœuré les Transalpins en compilant 15 points à 5/12, 14 rebonds (record en Bleu), 3 passes décisives, 3 contres et 3 interceptions pour 29 d’évaluation en 38 minutes. De quoi magnifier ce rôle de « glue-guy » qu’il chérit particulièrement.
« Je ne devais pas laisser Nando (De Colo) et Evan (Fournier) tous seuls », a-t-il rapidement évacué. « Je n’ai rien fait d’exceptionnel, j’ai juste été moi en plus-plus, ça a marché pour l’équipe et je suis content. »
Malgré sa modestie, ce quart de finale dominé de bout en bout vient couronner la renaissance de Nicolas Batum. Signataire d’une prolongation de deux ans avec les Clippers, le champion d’Europe 2013 a su se refaire un nom en NBA, du côté de Los Angeles, après la déprime de Charlotte. Une période si sombre qu’il confiait ce matin à Yann Ohnona, de L’Équipe toujours, s’être laissé séduire par l’idée de la retraite.
« J’ai envisagé de tout arrêter. À force d’entendre, de lire que tu es « fini », tu finis par te dire que, si ça se trouve, c’est vrai. Je n’étais pas dans la bulle NBA, et sans perspective sportive. Tu commences à douter. »
Fort heureusement, Nicolas Batum n’a pas succombé à la tentation. Et ses plus beaux titres sont peut-être encore devant lui…
Batum et les Bleus foncent vers l’obstacle suivant : la Slovénie de Luka Doncic
(photo : FIBA)
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