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Kevin Corre et Dominique Gentil, les pionniers de Jeddah : « Représenter l’Arabie Saoudite en amenant une autre image du pays »

3x3 - Alors que la fédération française a pris le virage de la professionnalisation depuis l'année dernière en montant l'équipe de Paris, Kevin Corre s'est lui spécialisé depuis plus de trois ans, en rejoignant l'équipe saoudienne de Jeddah. Devenu coach et DTN, il a fait venir cette année son compatriote Dominique Gentil. Les deux seuls joueurs professionnels expatriés du 3x3 tricolore se sont confiés.
Kevin Corre et Dominique Gentil, les pionniers de Jeddah : « Représenter l’Arabie Saoudite en amenant une autre image du pays »
Crédit photo : Christophe Canet

Jusqu’au mois de juin, la grosse recrue française sportive de l’année en Arabie Saoudite se prénommait… Dominique Gentil. Depuis, l’état saoudien fait tout pour reléguer l’arrivée de Mister Nice à Jeddah au second plan : le Ballon d’Or Karim Benzema a signé à Al-Ittihad, le champion du monde N’Golo Kanté aussi et l’offre pharaonique d’Al-Hilal pour Kylian Mbappé enflamme actuellement la planète, jusqu’à faire réagir les stars NBA Giannis Antetokounmpo et LeBron James.

Si l’Arabie Saoudite s’impose progressivement comme l’un des nouveaux épicentres du sport mondial, les basketteurs du 3×3 n’évoluent évidemment pas dans le même monde que leurs collègues footballeurs, tant en terme de rémunération que de médiatisation. Toujours est-il que Jeddah accueille les deux seuls Français ayant choisi de faire du 3×3 leur métier à part entière, sans rester en France : il y a Kevin Corre (38 ans), l’éternel défricheur tricolore de la discipline (membre de la première équipe de France, toujours le seul tricolore à avoir remporté une étape du World Tour à Prague en 2021), parti jouer en Arabie Saoudite depuis 2019 et qui, du haut de ses responsabilités locales accrues, a fait venir une autre figure du 3×3 hexagonal, Dominique Gentil (35 ans), qui a enfin décidé de sauter le pas de la professionnalisation après plusieurs saisons de tergiversations.

Réunis sous les couleurs de Jeddah, les deux internationaux nous ont accordé une heure de leur temps à Marseille, fin juin, avant le premier grand évènement de leur saison : le Masters organisé dans la cité phocéenne, où ils ont commencé par un immense exploit, une victoire contre les n°1 mondiaux de Ub (Serbie), avant d’aller chercher une prometteuse 4e place. Dans les entrailles du Palais des Sports, ils ont évoqué leur transition vers le 3×3 à plein temps, leur vision de ce sport, son évolution en Arabie Saoudite, la vie sur place, etc. Entretien croisé.

Kevin et Dominique, si on vous avait dit il y a dix ans que vous seriez joueur professionnel de 3×3, est-ce que cela vous aurait semblé assez improbable ?

Kevin Corre : Non, au contraire. La fédération en avait parlé très vite à l’époque, ils avaient compris que cela passerait par là. Après, cela a mis beaucoup de temps à se mettre en place, je ne sais pas ce qu’ils ont fait. Après, si vous m’aviez dit qu’on serait pro en Arabie Saoudite, là oui, je n’y aurais vraiment pas cru. Malheureusement, la professionnalisation du 3×3 a mis beaucoup de temps, la fédération n’a pas pris le bon wagon comme plusieurs nations dominantes du 5×5. On voit qu’on a du potentiel avec la France et qu’on aurait pu prendre le bon virage beaucoup plus rapidement.

Kevin, vous avez souvent été qualifié de pionnier, en étant présent lors de la première Coupe du Monde de 3×3 à Athènes en 2012. Comment vous étiez vous retrouvé dans cette aventure et quels en sont vos souvenirs ? 

Kevin Corre parmi les huit pionniers d’Athènes en 2012, repartis de Grèce avec deux médailles d’argent et le titre de champion du monde mixte

KC : C’est Jamil (Rouissi) le speaker qui m’en avait parlé en premier. On lui avait demandé un peu d’aide pour sélectionner des joueurs. J’étais en pleine saison 5×5, je n’y croyais pas vraiment mais j’avais répondu que si c’était vrai, ce serait un grand honneur et que je serais à fond dedans. Le 3×3, j’avais déjà l’habitude de jouer un peu dehors à Paris. Les premiers stages, les premiers tournois, cette première Coupe du Monde, c’était une vraie sensation de liberté, le sentiment de créer notre propre truc. Cela arrivait à un moment de ma carrière où le 5×5 devenait un peu chiant, toujours la même chose. Les saisons s’empilaient et le 3×3 m’a donné un nouveau souffle. C’est exactement ce que Dom (Gentil) est en train de vivre en ce moment en se professionnalisant avec nous.

« Le 3×3, une vraie sensation de liberté »

Dominique Gentil : J’ai longtemps fait les deux et ça m’a coûté. Déjà, d’un point de vue physique : il y a trois ans, quand j’ai signé au Havre, je suis arrivé très entamé en présaison et je me suis rendu compte que c’était répétitif. Tous les ans, j’arrivais fatigué, encore cette saison avec Berck. Il fallait que je fasse un choix. Comme Kevin, j’en étais arrivé à un point où c’était toujours la même chose : tu passes des heures et des heures à t’entraîner pour jouer 20 minutes, pour, vulgairement, te faire engueuler par ton coach si tu fais des mauvais choix. J’avais besoin de souffler et j’ai retrouvé de l’oxygène dans le 3×3, où il y a une vraie liberté. Il n’y a pas de coach derrière toi, tu es vraiment livré à toi-même. Alors oui, pour les joueurs irresponsables, ce n’est pas bien mais si tu es autonome dans ta prise en main, ton travail individuel, la gestion de ta carrière et de ton temps, tu trouves beaucoup de plaisir dans le 3×3.

Dominique, vous n’étiez peut-être pas là lors de la première Coupe du Monde en 2012 mais vous avez commencé très rapidement aussi…

DG : Et tout à fait par hasard ! Angelo Tsagarakis m’avait invité sur un tournoi et je n’ai plus jamais voulu faire autre chose que du 3×3. Je suis rentré en équipe de France par un concours de circonstances, pour remplacer au pied levé des blessés. Après cela, j’ai été reconduit chaque année car j’ai su saisir une opportunité. Un peu comme Kevin, j’ai toujours recherché ces aspects de plaisir et de liberté qu’on n’a pas forcément dans le 5×5.

À l’époque, on pensait assez bêtement qu’un bon joueur de 5×5 ferait forcément un bon joueur de 3×3, qu’il suffisait d’empiler les meilleurs joueurs de 5×5 pour avoir des résultats. Pourquoi n’est-ce pas vraiment le cas ?

Comme cette saison à Berck, Dominique Gentil était lassé par le 5×5 (photo : Gérard Héloïse)

DG : Si je dois apparenter cela à de l’athlétisme, tu ne peux pas demander à un marathonien de courir un 100 mètres en moins de 10 secondes et inversement. Ce sont vraiment deux disciplines à part entière. Il y a plein de professionnels du 5×5 qui se sont essayés au 3×3 et qui ont compris que ce n’était pas pour eux, que c’était trop physique, trop cardio. Selon moi, le 3×3 met directement en lumière les qualités et défauts de chacun, chose que l’on retrouve un peu moins dans le 5×5 : tu peux te cacher dans le corner, tu tires quand tu as la balle, tu repars tranquillement en défense. Dans le 3×3, tu ne peux pas te cacher, c’est impossible.

KC : En fait, ce n’est pas trop possible d’être un spécialiste dans le 3×3. Tu ne peux pas être qu’un shooteur, il faut faire plus de choses. C’est complètement différent. Les gens qui ne s’y intéressent pas ont sûrement des préjugés mais venez essayer et vous verrez bien. Vous comprendrez par vous-même que c’est un sport différent, qui demande un entraînement différent, des qualités différentes. Cela ne convient pas à tout le monde. Par contre, c’est chouette de voir des joueurs trouver leur place dans le 3×3 alors qu’ils n’y arrivaient pas vraiment dans le 5×5. Il y a cette énergie créatrice qui fait que l’on peut s’associer avec deux – trois joueurs nous correspondant bien et cliquer ensemble. L’alchimie et le côté humain sont vraiment capitaux. Nous, à Jeddah, on vit ensemble : on a démarré le 21 mai, on s’est laissé cinq jours de repos mais sinon on est ensemble tous les jours. S’il n’y a pas un minimum de qualités humaines pour s’adapter à l’autre, cela bloque à un moment donné. Ce n’est pas vraiment la priorité du 5×5. Tous ces aspects font que le 3×3 est un sport différent, plus riche et plus exigeant envers les joueurs s’ils veulent s’y adapter et performer.

« Kevin est un monument dans le 3×3 »

Pourriez-vous vous présenter mutuellement ?

KC : Je vais plutôt vous dire pourquoi j’ai choisi de recruter Dominique à Jeddah. J’ai beaucoup joué avec lui en équipe de France et il n’y avait pas du tout la même énergie. Pour rester politiquement correct, ce n’est pas la même manière de faire avec les Bleus et on n’a pas réellement connecté en terme de jeu l’un avec l’autre. Souvent, on essayait de se mettre en valeur afin d’être pris pour le tournoi puis on faisait comme on pouvait. En tant que joueur, je savais ce que j’allais avoir mais j’avais besoin de quelqu’un capable de vivre avec un Américain, un Lituanien (Ovidijus Varanauskas, ancien meneur LNB, ndlr) et un Saoudien. J’avais besoin d’un humain joyeux, aventurier, courageux, quelqu’un qui puisse installer une bonne énergie. Au moment où j’en parlais avec Ovi, je lui dis : « Mais laisse tomber, je sais qui c’est, je vais l’appeler de suite. » Donc j’ai contacté Dom, c’était exactement le joueur que je voulais, capable d’être entre le poste extérieur et le poste intérieur, qui ait de la caisse, des qualités physiques, de l’expérience, qui est un bon basketteur en fait. Quand j’ai appelé Dominique, je savais que c’était quelque chose qui allait le ravir et l’enchanter. Quand je le vois vivre ce début de saison avec nous, je suis tellement heureux pour lui. Le seul objectif que je lui ai donné, c’est qu’on se dise après le dernier jour qu’on va se manquer et qu’on a fait une bonne saison ensemble. Je répète souvent à mes joueurs que si on perd tous les tournois, ce n’est pas très grave mais que si on continue à s’entendre comme en ce moment, on en gagnera. Je veux au moins que l’on vive une belle aventure humaine. Dominique coche toutes les cases dont j’avais besoin donc j’en suis super heureux et quand je vois son début de saison, ça me confirme que j’ai fait un super choix.

Kevin Corre et Dominique Gentil font équipe sous les couleurs de Jeddah (photo : Christophe Canet)

DG : Dans ma tête, cela n’a pas été aussi simple que lui ne le dit… En fait, tu te lances dans un truc que tu ne connais pas. Pour Kevin, c’est facile de son côté car il connait déjà. Parmi tous les Français, il y en a un seul qui est parti à l’étranger pour être pro de 3×3, c’est Kevin. C’est le seul à savoir comment ça se passe. Vu qu’il voulait me faire venir, il n’aurait pu me donner que les points positifs mais non, il a été super honnête. Il m’a listé tous les obstacles. C’est marrant, on en parlait ce matin (le jeudi 30 juin, ndlr) et j’ai été confronté à tout ce qu’il m’a présenté. Il m’avait prévenu que j’allais toujours être entouré mais que j’allais ressentir de la solitude à un moment donné parce que ma famille ne serait pas là, etc. Ce qui m’a motivé, c’est la renommée, c’est Jeddah. Et puis, c’est l’équipe, les bonhommes avec qui j’allais jouer, c’est Kevin. En équipe de France, on n’avait pas spécialement cliqué sportivement mais il s’était passé des choses humainement, on était parti à Moscou, on avait fait quelques gros tournois ensemble. Le 3×3, c’est comme un relais, comme un 4×100 mètres. Les quatre vont se surpasser et on a toujours besoin les uns des autres. Un match de 3×3, c’est vraiment un 4×100 mètres pour moi : on va tous être carbonisés mais on ne peut pas se passer les uns des autres. Je me suis dit que c’était le moment, que j’avais fait mon temps dans le 5×5. Je m’étais fait une to-do list dans ma carrière, j’avais envie de gagner des titres individuels, des titres collectifs. J’ai coché tout ce que je voulais. Comme j’ai commencé à 17 ans, je n’avais jamais prévu d’aller en NBA ou en EuroLeague. Mais le dernier truc qui me restait à valider, c’était jouer à l’étranger. C’était ma dernière case et Kevin m’a offert l’opportunité de le faire. J’ai réfléchi mais pas si longtemps que ça. Au début, j’étais un peu chiant, j’attendais des garanties comme au 5×5…

KC : Les questions qu’il avait, c’était les structures, ce sur quoi il allait retomber derrière. C’était important pour lui de savoir comment cela allait s’articuler, comment il allait retomber sur ses pattes après. Mais l’aventure du 3×3, il regardait ça avec des yeux… (Dominique acquiesce et rigole) J’étais au téléphone mais je savais qu’il se disait qu’il en avait trop envie. Les questions, c’était le contrat, les différentes choses pour sa carrière 5×5 mais l’aventure, on n’en a pas discuté longtemps. C’est quelque chose qu’il voulait absolument faire. Je savais que c’était quelque chose qui allait t’enchanter mais qu’il fallait mettre un cadre en place autour.

DG : Pour faire court, ça s’est fait sur la confiance. J’ai fait mon choix mais j’ai fait confiance à Kevin. J’ai croisé très peu de gens dans ma carrière envers qui je pourrais avoir une confiance aussi aveugle. Quand il m’a dit qu’il savait que ça me correspondait, j’ai fait ma valise les yeux fermés pour partir à l’aventure.

Dominique, comment pourrait-on présenter Kevin ?

Avant de se consacrer au 3×3, Kevin Corre a été un joueur de devoir pendant 15 saisons dans le monde du 5×5, dont une saison pleine en Pro A avec la JL Bourg en 2014/15 (photo : Vincent Janiaud)

DG : Kevin a plusieurs casquettes. Il n’est pas seulement joueur, il est aussi coach et DTN à la fédération. Là, on rentre de Doha où l’on était avec ses jeunes U23 filles et garçons. Avant, je connaissais ses qualités sportives et humaines. Il est resté le même : il te dit que tu le fais chier si tu le fais chier, il te fait parfois savoir qu’il est mécontent quand tu ne lui passes pas la balle mais ça me va. Il peut m’engueuler pendant 24 heures si l’on reste amis à la fin de la journée. En terme sportif, c’est l’un des Français les plus expérimentés. On aura beau dire ce qu’on veut mais personne n’a gagné de Masters à part lui, il est là depuis 2012. Quand il prend sa casquette de coach et qu’il nous présente un truc, personne ne le contredit. Kevin est un monument dans le 3×3. Quand il parle de quelque chose, il sait de quoi il parle. En étant à côté de lui, on apprend. C’est un garçon bourré d’expérience qui garde de très bonnes qualités, même à 38 ans. Il a de très bonnes mains, les deux d’ailleurs, une bonne vision du jeu : c’est le joueur de 3×3 par excellence car il a tout, à part peut-être un peu d’adresse lointaine. Et encore, il n’en prend pas assez… En plus de son vécu, il a toutes les qualités dont a besoin un bon joueur de 3×3. Je suis sincère hein, je n’essaye pas d’exagérer pour l’interview. C’est un plaisir de rejouer avec Kevin car nous avons été associés dans des équipes où il y avait deux grands, avec Charles-Henri Bronchard, plus moi. Je reste persuadé qu’il excelle dans son art au sein d’un autre profil d’équipe, avec lui comme seul grand et des petits polyvalents à côté.

« Sur certains points, l’Arabie Saoudite est bien plus évoluée que l’Europe »

KC : Je veux juste ajouter que Dominique est le plus capé en équipe de France. Ce n’est donc pas un choix à l’emporte-pièces, je sélectionne le meilleur Français. On parle beaucoup d’humain mais en prenant en compte l’aspect sportif, tu veux celui qui a le plus d’expérience. Et encore, je trouve qu’il n’est pas respecté dans ce qu’est l’équipe de France.

DG : Recordman de sélection en équipe de France, oui, je l’ai appris par un journaliste qui me l’a dit récemment pour une interview dans Basket Le Mag.

Kevin, comment avez-vous pu atterrir à Jeddah à la base ?

KC : Il y a six ans de ça, je devais partir jouer un Challenger à Ljubljana avec Anthony Christophe. On a essayé de chercher des joueurs français mais personne ne voulait venir. On a demandé à l’organisateur du tournoi de nous trouver deux Slovènes pour jouer avec nous : on les a rencontrés 30 minutes avant le premier match, on a terminé 3e et on s’est qualifié pour un World Tour. Là-bas, j’ai joué contre mon ancien coach, Ales Kunc (102 matchs LNB entre 2000 et 2004 avec Le Havre, Gravelines-Dunkerque, Levallois, Mulhouse et Évreux, ndlr), à qui on a proposé le poste de coach à Jeddah. C’est la seule fois où l’on s’est croisé sur le circuit. J’ai très bien joué, Antho m’avait bien mis en avant avec ses passes. Je pense qu’Ales s’en est rappelé et il m’a recruté. Jeddah, je ne connaissais pas mais ça m’a dit tout de suite. L’Arabie Saoudite, c’était différent de maintenant, c’était quelque chose d’inconnu à l’époque. On me demande souvent ce que je savais de ce pays en arrivant : eh bien Ben Laden, qui avait fait péter les tours, et c’est tout. C’était la seule image que l’on avait de l’Arabie Saoudite. Maintenant, dans tout ce que je fais, en portant ce t-shirt (vert et siglé Arabie Saoudite, ndlr), en me battant pour ce pays, j’essaye de le représenter en amenant une autre image : ce n’est pas une nation terroriste, c’est un super beau pays, un bel endroit où les gens ont beaucoup plus de cœur, sont très sympas…

Ancien n°1 Français, Kevin Corre est désormais n°137 mondial (photo : Christophe Canet)

DG : Ça, c’est vrai.

KC : Ils sont respectueux, très accueillants. Quand Ales Kunc m’a proposé de venir, j’ai cherché Jeddah sur Google pour savoir où c’était, où est ce que j’allais. Je n’ai pas obtenu beaucoup d’informations. Quand je suis arrivé, je me suis rendu compte que c’était une belle ville, agréable, qu’il fait chaud. Il y a d’autres coutumes, une culture complètement différente mais cela correspond entièrement à qui je suis. Même à qui on est, car Dom’ le vit maintenant, et je le vois traverser des choses que j’ai vécu il y a quatre ans. Ça me fait plaisir. Quand on se retrouve le matin, je lui dis : « Alors, t’as fait quoi ? » (Dominique rigole) Il va dans des endroits que j’ai visité en arrivant, ça me rappelle des souvenirs. Je ne peux pas être avec lui tout le temps mais j’adore revivre cela avec lui.

Parlons de l’Arabie Saoudite justement : le pays est au cœur de l’actualité sportive cet été avec de nombreuses signatures massives dans le football. Cela ressemble de plus en plus à un soft power par le sport et le 3×3 y joue une petite part…

KC : Quand ils ont organisé le premier tournoi il y a cinq ans, je me rappelle de l’exhibition avec les dunkeurs et les trampolines. On a vu ça 40 milliards de fois nous, on ne regarde même plus. En revanche, les gens là-bas étaient ébahis. C’est nouveau pour eux, ce sont des choses qu’ils ne connaissent pas. Disons que c’est un pays qui s’est ouvert sur le tard. Ce n’est pas qu’ils se servent du sport, c’est simplement qu’ils aiment les évènements.

Avec tout ce qui se passe autour du football, est-ce que l’on sent un vrai intérêt pour le sport en Arabie Saoudite ?

KC : Ils ont une assise financière qui fait qu’ils peuvent se payer tout ce qu’ils veulent. Par contre, je vais mettre un aparté par rapport à ça : la première chose que les gens nous disent aussi, c’est qu’on doit gagner beaucoup d’argent en Arabie Saoudite. Alors on gagne notre vie, OK, mais on fait aussi un travail qui a des contraintes, on est loin de notre famille pendant un bon moment. En Arabie Saoudite, les gens ont un bon cœur et font les choses bien. La première chose qu’on nous dit, c’est qu’on y va pour l’argent mais ce n’est pas vrai. Si on n’est pas dans le truc, on ne peut pas se rendre compte. Ce n’est pas la vérité.

Par rapport à ce que vous avez connu dans le 5×5, comment vous situez-vous en terme financier du coup ?

KC : Sans comparer au 5×5, je pense quand même que l’on fait partie des équipes les mieux payées du 3×3.

DG : Il y a les Chinois maintenant quand même…

KC : Ah, c’est vrai, ils ont commencé à bien rémunérer cette année. Après, ils ont pris un ou deux Européens. Nous, je pense qu’on est la seule équipe du World Tour à fonctionner avec autant de nationalités. Mais oui, on gagne bien notre vie et ils prennent soin de nous.

« Une société plus restrictive où les gens vivent mieux »

On entend beaucoup parler de la modernisation sociétale de l’Arabie Saoudite. Est-ce vraiment quelque chose que l’on ressent ces dernières années sur place ?

KC : Complètement. Par rapport à ma première année, c’est le jour et la nuit. En Europe, et en France surtout, on parle beaucoup du fait d’améliorer l’image de l’Arabie Saoudite mais c’est parce que les gens ne connaissent pas. Ils ne savent pas ce qu’il s’y fait. Or, sur certains points, l’Arabie Saoudite est bien plus évoluée que l’Europe. C’est seulement qu’ils ne sont pas ouverts et qu’ils n’ont pas transmis les informations. Maintenant que l’on voit les signatures des footballeurs, on commence simplement à se dire : « Ah tiens, ça peut être sympa l’Arabie Saoudite… » Mais oui, effectivement, c’est un beau pays, il y a des belles choses à voir, des belles valeurs, une sécurité au quotidien dans la ville qui est à envier pour n’importe quel pays européen. Il y a aussi une richesse, du travail pour tous ceux qui veulent en trouver, du respect. La France aurait beaucoup de choses à apprendre par rapport à la mixité et la diversité des gens de l’Arabie Saoudite.

Vous évoquez les « belles valeurs » de l’Arabie Saoudite : on parle tout de même d’un pays qui a fait démembrer un journaliste dans son ambassade à Istanbul, où l’homosexualité reste passible de la peine de mort, où les mineurs peuvent être exécutés par la justice, etc…

DG : Il y a des bons et des mauvais côtés dans tous les pays…

128e mondial, Dominique Gentil est le recordman de sélections en équipe de France (photo : Christophe Canet)

KC : Mais ça, ce sont les choses qui ressortent. En Arabie Saoudite, personne ne va violer les enfants et s’en sortir qu’avec un an de prison. Personnellement, je suis père de famille et je veux élever mes enfants en Arabie Saoudite car ces choses-là sont punies, durement. Couper la tête nous parait dur car on n’est pas habitué à ça mais la personne qui s’est faite décapiter avait peut-être violé ma maman, ma sœur ou ma fille. Personnellement, je n’irai pas jusque-là mais qu’elle paye pour ce qu’elle a fait, ça ne me touche pas… Si on cherche la merde en Arabie Saoudite, on la trouve et on la trouve durement. Tous les autres autour voient la sanction et se tiennent à carreau ensuite. Venez voir en Arabie Saoudite : si vous laissez votre portable trois jours quelque part, il sera encore là lorsque vous reviendrez. On ne vous volera jamais rien en Arabie Saoudite.

DG : C’est vrai que c’est un des trucs qui m’a frappé. L’insécurité est inexistante là-bas : les bijouteries ne sont même pas fermées avec un rideau métallique par exemple. Quand c’est l’heure de la prière, ils ne ferment pas les magasins, tout est à portée de main et personne ne volera. Avec ma mentalité d’Européen, je trouvais étonnant de voir des gens laisser leur sac Louis Vuitton sur leur voiture.

KC : Il faut le vivre. On a cette image de Ben Laden en fait mais là-bas, ils ne le reconnaissent pas comme un Saoudien ou un musulman.

C’est surtout l’image de Jamal Khashoggi qui ressort maintenant : un journaliste opposant au prince Mohamed Ben-Salmane qui a été assassiné et démembré par les forces spéciales saoudiennes à Istanbul…

KC : C’est une seule personne. Si tu me dis que ma famille, mes enfants et un million de personnes autour de moi ne vont pas subir de violences, de violences sexuelles, je préfère qu’il y en ait un qui paye parce qu’il a vraiment fait le con que tous les autres qui n’ont rien fait. Lui, je ne connais pas son histoire. Mais il faut savoir que si tu mets un tweet sur le pouvoir, ce n’est pas une république, tu peux disparaître et personne n’a rien à dire. C’est comme ça là-bas.

Mais justement, ce n’est pas dérangeant ça ?

KC : Écoutez, je suis en sécurité. Mes enfants le seraient aussi s’ils étaient là. Dominique est en sécurité. Les gens que j’aime et qui font des choses bien le sont aussi. Je trouve plus juste que cela se passe comme ça. Je vis mieux dans une société en Arabie Saoudite, qui n’est pas la mienne, qu’en France. Quand nous sommes arrivés en France, au Mans, j’ai prévenu mon coéquipier saoudien comment ça allait se passer. Au premier rond-pont, deux voitures se sont rentrées dedans : le conducteur qui était en tort est descendu de son véhicule et a engueulé l’autre. Je lui ai dit : « Voilà, ça, c’est la France. » En Arabie Saoudite, ça conduit n’importe comment mais si tu klaxonnes la personne, personne ne cherche à se battre ou à t’insulter. Si tu fais ça, tu es dénoncé à la police et tu as une amende tout de suite. C’est une société plus restrictive mais où les gens vivent mieux.

DG : La réprimande est plus forte en fait.

KC : Tu as peur, tu as peur. Tout ce qui concerne la décapitation ou les mains coupées, ça arrive pour les grosses choses, les gros trafics. Je ne défends pas le gouvernement mais Khashoggi avait sûrement fait des trucs. La résultante de tout ça, c’est que c’est plus safe là-bas.

Ces questions là autour de l’Arabie Saoudite reviennent souvent auprès de vos proches ?

À Jeddah, Kevin Corre est plus qu’un simple joueur (photo : Christophe Canet)

DG : Ah ben oui… « Pourquoi là-bas ? Ce sont des terroristes », etc etc. Encore une fois, quand on entend parler de l’Arabie Saoudite sur n’importe quelle chaîne télévisée en France, c’est pour parler de la décapitation d’un tel. Jamais pour conseiller d’aller y vivre car on ne se fera jamais rien voler dans le jardin. Moi-même de mon côté, avec ma vision de Français, si mon fils m’avait dit qu’il signait à Jeddah, je lui aurais bien demandé s’il était sûr de lui. Comme Kevin disait tout à l’heure, c’est simplement une fois que l’on y a été que l’on se rend compte de la vérité. Il faut rester ouvert et aller voir, comme partout. C’est vrai que la réprimande est forte mais personnellement, mon travail est juste de jouer au basket. Je ne suis pas politicien, je ne vais pas m’engager dans des trucs. Tu ne peux pas arriver quelque part et imposer ta culture dans le pays où tu débarques. Autant des non-Français qui viennent en France ne peuvent pas imposer leur culture, autant on doit faire la même chose de notre côté. En arrivant à Jeddah, je me suis plié à leur culture. Si tu vas dans un endroit spécifique, il ne faut pas un short au-dessus des genoux ; eh bien je vais mettre un short qui descend en-dessous des genoux et voilà. Et si je ne suis pas content, je change de pays, tout simplement.

KC : Notre travail, c’est aussi de voyager. On va aller aux États-Unis, à Porto-Rico, en Inde, etc. Quand on arrive là-bas, on s’adapte à l’environnement. Pour nous, cela fait sens. Pour ma part, c’est enrichissant de connaître des gens en Arabie Saoudite, de comprendre pourquoi ça se passe comme ça. Pour la parenthèse, je vais bientôt me marier avec une femme musulmane, qui vit voilée, et vous m’auriez dit ça il y a 5 ans en me disant que j’allais être le plus heureux du monde, je n’y aurais jamais cru. Je travaille là-bas et j’apprends à des jeunes de top niveau à jouer au 3×3. Derrière, il y a des hommes et des femmes et c’est super intéressant. Récemment, après un tournoi, j’ai dit aux filles que j’étais trop fière d’elles, qu’elles avaient plein de qualités et que j’espérais travailler longtemps en leur compagnie. Il y en a trois qui se sont mises à pleurer parce qu’elles étaient touchées. Ce sont des trucs forts. Qu’elles soient Françaises, Japonaises, vertes, voilées, homosexuelles, ce sont des humains en fait.

« La montée en puissance du 3×3, c’est l’effet JO ! »

Concrètement, quel est le quotidien d’un joueur professionnel à Jeddah ?

DG : Exactement comme dans le 5×5. Kevin est résident à Jeddah et je vis à l’hôtel avec mes coéquipiers lituaniens et américains. On se lève le matin, on démarre par de l’entraînement physique.

KC : On se lève beaucoup plus tard là-bas. Si c’est à 9h en France, c’est à midi en Arabie Saoudite.

DG : En effet, il fait tellement chaud car il est décalé.

KC : La vie se prolonge plus dans la nuit car il fait moins chaud.

DG : Par exemple, les horaires des grands magasins de vêtement, c’est 16h – 00h. On fait beaucoup de crossfit, qui est un bon entraînement pour le 3×3. Le soir, c’est basket, mais vraiment ce dont l’équipe a besoin. Kevin est un coach qui a connu le 3×3 et le 5×5 à très haut niveau : il a l’intelligence de percevoir les besoins du groupe. Repos, basket ou cardio à fond, selon ce que les joueurs ont besoin. Dans le 5×5, tu vas bosser sur tel ou tel système, c’est pareil que tu sois content ou non. Là, il est vraiment à notre écoute. Il est à l’écoute des hommes aussi, c’est vraiment ce qui diffère avec le 5×5.

Et beaucoup de tournois, de voyages…

Après sept tournois d’affilée en France, Jeddah 3×3 va reprendre la route, avec le prochain Masters de Prague dans le viseur(photo : Christophe Canet)

DG : Oui, c’est une vie où on n’est jamais au même endroit. On ne reste pas dans le même pays plus de 2 semaines. C’est une aventure que je souhaitais vivre.

KC : En juillet, on passe beaucoup de temps en France car c’est intéressant pour se préparer. Il y a cinq matchs sur une journée, le basket est différent, plus physique, et notre équipe avait besoin de prendre la mesure de cette dimension physique. Plus globalement, la FIBA nous met à disposition des tournois, que l’on saisit ou non. Comme nous sommes une équipe asiatique, on doit beaucoup aller en Asie, en Chine ou dans le Moyen-Orient.

Kevin, comment avez-vous pu obtenir des responsabilités aussi accrues au sein de la fédération saoudienne : coach, DTN ?

KC : Je ne sais pas exactement comment ça s’est fait mais j’ai pu gagner la confiance du président de la fédération, qui était notre manager au départ. À un moment, je lui ai dit que ça m’intéressait de pouvoir développer le 3×3 dans ce pays. Je l’avais fait avec une entreprise française en Afrique par exemple. Entraîner était quelque chose qui m’attirait, je lui ai dit que je n’avais pas de problème avec le fait de m’installer à Jeddah. Je pense qu’il a cru en moi, cru en mon projet. Au départ, je voulais simplement créer une académie, un peu comme un club en France. Il m’a donné le poste de Directeur Technique National. Je suis content car c’est un travail exigeant qui me pousse à grandir. Il a vu que j’avais bien compris la culture, les choses importantes localement et que j’allais pouvoir les respecter. Cette double casquette correspond totalement à la manière dont je voyais les choses quand j’étais joueur. Maintenant que je suis passé de l’autre côté de la barrière, je considère que c’est notre équipe à tous. Si je dis à Dominique qu’il doit jouer d’une façon bien spécifique sans lui demander son avis, il va me répondre qu’il aurait dû rester en 5×5. Personne ne connait Dominique mieux que lui-même, c’est un peu du management participatif : il met en œuvre ce qu’il veut pour être le meilleur possible et faire avancer notre équipe. Si chacun fait ça, je dois simplement m’adapter aux différentes demandes et différentes personnes. J’ai juste à trouver des joueurs qui peuvent se connecter sur quelque chose qu’ils ont en commun et après, yallah, ça se fait simplement.

Coacher sur le terrain, cela demande une certaine lucidité…

KC : Je ne coache pas grand chose quand on joue. Les choses sont mises en places avant. Je m’appuie beaucoup sur les autres. On a Ovi (Varanauskas) qui a ce regard de meneur de jeu, que j’ai utilisé sur le recrutement. Je lui demande souvent son avis : il a une approche du 3×3 différente de la mienne, c’est lui qui prend régulièrement la parole sur le terrain, je lui fais confiance et il me le rend bien. Je crois en ça, je crois que les gens donnent le meilleur d’eux-mêmes quand on leur confie des responsabilités et qu’on les cadre bien sur ce qu’ils ont à faire.

Le point d’interrogation équipe de France

Cela fait des années que l’on évoque la montée en puissance du 3×3. Là, cela se ressent vraiment…

DG : C’est les JO ! C’est l’effet Jeux Olympiques. Depuis que le 3×3 est passé sport olympique, cela attire les gens. Et pas seulement des joueurs… C’est très attractif parce que c’est devenu une discipline olympique.

KC : Exactement, et je pense que la FIBA 3×3 fait super bien son boulot. Il y a de plus en plus d’évènements. C’est un sport qui se développe sur le terrain et en dehors, c’est un vrai business qui se met en place dans chaque pays. La FIBA travaille très bien et nous sommes contents de jouer pour eux, contents d’aller partout dans le monde pour faire le sport qu’on aime, contents de voir que ça puisse créer des emplois.

Quels sont les nouveaux leviers de développement de la discipline à vos yeux ? 

KC : La France a enfin pris le train du 3×3 et c’est bien. On peut voir qu’avec un tournoi comme celui-là (le Masters de Marseille, ndlr) que c’est finalement possible depuis plusieurs années. Pour ce qui est de l’Arabie Saoudite, on en est encore au tout début mais quand ça va exploser, ça va être quelque chose. C’est marrant car je retrouve mon esprit d’il y a quelques années dans mes joueurs saoudiens qui me disent : « C’est trop bien le 3×3, comment fait-on pour jouer toute l’année, pour gagner sa vie avec, quelles sont les meilleures tactiques, etc ? » C’est intéressant mais c’est 12 ans plus tard. Je n’ai aucun doute que l’Arabie Saoudite va se développer, il y a un projet duquel je fais partie. Ils ont un groupe qu’ils préparent pour les Jeux Olympiques 2032, il y a une liste d’athlètes derrière le comité olympique qui commencent déjà à entraîner pour ces JO là. Les choses se mettent en place progressivement, ça prend du temps.

Quid de la France ? On sent que la marche avant a été enclenchée pour rattraper le retard accumulé…

KC : Je pense qu’on a loupé le coche sur les premiers Jeux Olympiques, bien que les filles soient passées tout près de la médaille. Elles sont souvent au top. C’est plus au niveau des garçons que je trouve cela dommage. En 2012, on avait perdu en finale de la  Coupe du Monde contre Dusan Bulut et lui a fait grandir ce sport, est devenu reconnu mondialement. En France, on est resté dans notre zone de confort pendant très longtemps. Là, on peut avoir avec Team Paris ou Team Marseille qu’il y avait ces jeunes-là disponibles depuis un moment mais que ça n’a pas été mis en place. Mais ce n’est pas grave car certains joueurs y ont trouvé leur voie. Angelo Tsagarakis est sélectionneur de la Grèce, Anthony Christophe est avec l’équipe de France, je suis en Arabie Saoudite. Ce qu’on n’a pas eu chez nous, on l’a trouvé ailleurs. On peut aussi parler de Dominique… C’était légitime qu’il soit avec Paris et il est avec moi à Jeddah maintenant. Ils ne l’ont pas pris et j’en ai été bien content.

DG : Ils m’ont appelé…

Avec le Monaco Riviera Lite Quest, Jeddah a remporté samedi son deuxième tournoi de la saison après l’Open Plus du Mans en mai (photo : Maxime Leal)

KC : Oui mais ils ne t’ont pas pris.

DG : Non, j’ai choisi de ne pas y aller. Ils m’ont appelé cette année car il y avait un blessé.

KC : Déjà, sur la première équipe, ils auraient pu t’appeler. Mais ce n’est pas grave. Si ce n’est pas avec un maillot bleu, on peut faire avec un maillot vert pour défendre des couleurs et des valeurs qui nous correspondent.

DG : Les bonnes couleurs et les bonnes valeurs…

KC : J’espère qu’on va pouvoir montrer sur le terrain qu’on n’est pas des retraités, qu’on n’est pas des laissés-pour-compte, qu’on a déjà fait ce que l’on est en train de faire et que eux ne l’ont encore jamais fait. Ils ont peut-être des choses à apprendre de nous… Avec n’importe quelle autre nation, le fait de jouer pour une équipe étrangère nous érigerait comme candidat aux Jeux Olympiques. Je ne sais pas pourquoi ça ne se fait pas en équipe de France. Clairement, quand on joue à l’étranger, quand on dispute autant de tournois, cela devrait peser dans le choix de la sélection. Maintenant, il y a l’équipe de Paris qui s’est mise en place et je pense que ce n’est pas super apprécié qu’on aille jouer ailleurs. Surtout à Jeddah. Je le sais, je le sens : quand on va sur certains tournois français, ça dérange, parce que c’est l’Arabie Saoudite.

Etre à Jeddah vous fermerait les portes de l’équipe de France, au détriment des joueurs de Paris par exemple ? 

KC : Ce n’est pas une question pour moi. Si la porte était fermée de leur côté, je trouverais ça dommage. On ne voit pas ça dans les autres sports. Partout ailleurs, on aime bénéficier de l’expérience des gens qui vont voir ailleurs, qui voient les choses sous une autre vision.

DG : Oui, là, on rentre dans le délicat. Moi, je me suis positionné, j’ai fait un choix fort. À un an des Jeux Olympiques, je suis devenu joueur professionnel de 3×3. Je n’ai pas fermé la porte de l’équipe de France, bien au contraire. J’étais encore dans les six sélectionnés pour la qualification de l’Euro, j’ai discuté avec le sélectionneur ce matin. Bien sûr que la porte n’est pas fermée de mon côté, bien sûr que non. Même si je suis à Jeddah, mon cœur reste bleu, blanc et rouge.

L’œil de la fédération :
« Signer à Jeddah ne remet pas en cause une place en équipe de France, au contraire »

Karim Souchu (sélectionneur de l’équipe de France) : « Jeddah est une bonne équipe. Kev’ et Dom’ font partie des vieux routiers du circuit. Ce sont des joueurs qui vont faire des points pour nous aussi donc c’est bien qu’ils aient cette expérience là à l’étranger. On va continuer à avancer avec eux aussi car ce sont des points qui vont nous apporter beaucoup. Une signature à Jeddah ne remet pas en cause une sélection en équipe de France ? Ah non, au contraire. »

Alain Contensoux (Directeur Technique National) : « Je suis très content que Kevin et Dominique soient à Jeddah. Plus on a de joueurs évoluant sur le circuit, mieux c’est pour nous. C’était une excellente chose pour le basket français d’avoir dix joueurs sur la dernière étape du World Tour à Marseille par exemple. Ils ont marqué des gros points pour nous faire remonter au classement. Je suis très en contact avec Dominique, ce qu’il vit m’intéresse. C’est très intéressant pour la fédération. Ce sont les 25 meilleurs de chaque nation qui font le classement donc plus on a de joueurs sur le circuit, mieux c’est. »

 Propos recueillis à Marseille,

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