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[Portrait] Julie Allemand, le futur s’écrit au présent

« La pression, je dois la gérer depuis que je suis toute petite. Ce n’est pas un problème. C’est surtout moi qui me mets la plus grosse pression. Je suis déterminée et c’est peut-être ça qui fait que je peux remplir mes objectifs. » À seulement 23 ans, Julie Allemand (1,73 m) a déjà un discours très raisonné et tourné vers son objectif : gagner. Encore et toujours. « Bien sûr que je suis une mauvaise perdante. Je déteste ça. Même lors des petits concours aux entraînements, je veux gagner », explique-t-elle dans un sourire. Ce sourire, Julie Allemand ne l’a jamais perdu depuis ses débuts. Née dans une famille de basketteurs avec un père arbitre et une mère joueuse, c’est grâce à son grand frère qu’elle se lance dans l’aventure, à seulement 4 ans. « Je me souviens que je jouais à côté du terrain alors que lui s’échauffait pour ses matchs ou son entraînement. » Très vite, la jeune fille se fait remarquer alors qu’elle évolue avec les garçons, au club d’Alleur. « C’est vrai qu’il n’y avait pas d’équipes de filles de mon âge, donc je jouais avec les garçons. Vu que je ne me débrouillais pas trop mal, le club a entamé des démarches pour féminiser ses effectifs », se souvient la native de Rocourt, une commune de Liège (Belgique). Elle oublie le tennis et l’athlétisme, « des sports trop individuels » et se concentre sur la balle orange. Un choix payant.

« Mentalement et physiquement, c’était horrible »

Âgée de 15 ans, Julie Allemand s’engage en 2011 au Point Chaud Sprimont en Division 1 Belge. Cette équipe lui offre ses premières minutes professionnelles contre toute attente. « Je devais découvrir ce milieu dans le cadre d’une affiliation avec le club d’Alleur. Mais jamais je ne pensais avoir des responsabilités aussi tôt », précise-t-elle. En trois ans, la jeune meneuse passe d’une moyenne de 5,4 points lors de l’exercice 2011/12 à 12,6 points lors de la saison 2013/14. Elle découvre même l’EuroCup cette année-là avec 5 apparitions. Grâce à ses performances et son talent, Julie rejoint les Castors de Braine en 2014. Elle restera au sein de cet effectif trois saisons. « À Braine, j’ai vraiment vu la différence avec le monde professionnel. Tout était plus structuré et nous avions des ambitions », résume la poste 1.

Des ambitions, le coach letton Ainars Zvirgzdin en avait également. Si ce nom ne vous dit rien, il reste en tout cas gravé dans la mémoire de Julie Allemand. « Avec lui j’ai progressé comme jamais, notamment en défense. Mentalement et physiquement, c’était horrible. Il pouvait te défoncer s’il n’était pas content de toi ou de l’équipe. À chaque fois que ça ne lui convenait pas, il nous faisait faire 10 suicides. Je pense qu’on a dû faire 50 longueurs lors d’un entraînement un jour. On n’en pouvait plus », se remémore Julie. « J’ai eu beaucoup de chance de le croiser sur mon chemin, mais je savais que quoique je fasse, il allait m’engueuler », ajoute-t-elle. Comme ce jour où, mécontent que Julie Allemand ait préféré les études au shooting matinal d’une rencontre de Coupe de Belgique, il ne l’a pas fait rentrer de la rencontre, tout en la gratifiant d’un « Fucking Student ». « Lors d’une autre rencontre, il n’était pas satisfait de mon échauffement. Et, sans rien me dire, il ne m’a pas fait jouer de la rencontre. Même l’assistant ne comprenait pas. Après le match, Ainars Zvirgzdin m’a juste expliqué qu’il n’avait pas aimé la façon dont je m’échauffais. Ce sont des souvenirs qui restent en mémoire, car c’était difficile mentalement. Mais j’adore les coachs qui te poussent à être meilleure. Si le coach t’ignore, c’est mauvais signe. Lui, il pouvait nous sortir son livre d’attaque avec près de 40 systèmes offensifs en plein match et nous demandait d’en jouer un par hasard lors de la prochaine possession. » Un apprentissage compliqué qui a porté ses fruits quelques années plus tard.

L’appel de TP : « Je courrais toute seule dans mon appartement »

Si sa première partie de saison se passe de façon « mitigée » selon ces propres termes, Julie Allemand prend ses marques à Braine à partir de janvier. « Je m’entraînais tout en ayant continué mes études à côté. Et avec les examens, j’étais un peu stressée. J’ai arrêté les études en janvier et je me suis sentie beaucoup mieux ensuite. » Par la suite, sous les ordres de Philip Mestdagh, sélectionneur de l’équipe féminine Belge, Julie Allemand aura remporté trois titres de Championne de Belgique et deux Coupes de Belgique avec Braine, tout en participant deux fois à l’EuroCup et une fois à l’EuroLeague.

C’est après la saison 2015/16 (8,6 points et 3,8 passes en championnat) que la carrière de Julie Allemand va prendre un nouveau tournant. « J’avais envie de quitter la Belgique. Le niveau est plus faible dans ce championnat et il n’y a que trois ou quatre équipes qui pourraient rivaliser en LFB. Il n’y a pas beaucoup d’argent, donc les clubs font beaucoup confiance aux jeunes. C’est une bonne chose. Mais dans le même temps, il n’y a pas de restriction au niveau des joueuses étrangères. Donc si une équipe a des moyens, elle peut survoler la division. » 

Julie Allemand suit les traces de certaines de ses compatriotes qui ont ouvert la voie avant elle : Ann Waters ou encore Emma Meesseman, récemment élue dans le meilleur 5 majeur de l’EuroLeague 2019/20. Sélectionneuse de l’Équipe de France Féminine, Valérie Garnier « n’est pas surpris que le basket belge puisse sortir autant de joueuses de talent. Moi qui suis dans le basket féminin depuis quelques années, j’ai pu voir que les Belges avaient un vrai savoir-faire au niveau du basket. Il y a de très bons éléments avec de très bonnes qualités.  » La Belge décide malgré tout de quitter son pays natal. Malgré une proposition en Russie, c’est en France et plus particulièrement à Lyon, au LDLC ASVEL Féminin qu’elle pose ses valises. Un club présidé par Tony Parker, né… en Belgique, à Bruges. Et quand le boss du basket Français contacte Julie Allemand, la situation prête à sourire. « Valéry Demory me voulait à Montpellier. On échangeait avec lui et mon agent et il m’a appris que Tony Parker souhaitait le recruter à Lyon. Donc, indirectement, Tony Parker voulait me recruter. Un jour, mon agent me dit que Tony Parker va me contacter. Je ne le croyais pas. Et alors que je venais de raccrocher avec mon agent, je vois un numéro américain s’afficher avec la localisation à San Antonio. Je n’y croyais pas, je courais toute seule dans mon appartement. J’hésitais même à répondre. Les premières minutes, je n’écoutais pas trop ce qu’il me disait. Je voulais appeler mes parents et tout leur raconter. C’était fou », détaille en rigolant Julie Allemand. « C’est quelqu’un qui a vécu beaucoup de choses. Le projet était vraiment intéressant, donc j’ai signé assez rapidement. Mais la première fois que j’ai vu Tony, j’étais presque gênée. Je ne savais pas trop quoi faire. Il s’investit vraiment pour les filles de l’ASVEL et il nous met toujours à l’aise. C’est un plaisir de le côtoyer. » Un plaisir surement partagé au vu des titres glanés en présence de la Belge. En trois ans, Julie Allemand remporte le match des Champions 2019, le titre de championne de France 2019 et elle est élue dans le 5 majeur LFB lors de la saison 2018/19 après un exercice 2018/19 remarquable en championnat (10,9 points à 72% à 2-points, 3,7 rebonds, 6,4 passes décisives et 2 balles perdues pour 19,5 d’évaluation en 26 rencontres) et en EuroLeague en 2019/20 (13,5 d’évaluation). « J’ai vraiment adoré mes trois saisons à Lyon et j’ai beaucoup progressé au contact de Valéry. Pour résumer, je pourrais dire qu’il y a eu trois manières différentes de les aborder. Celle de l’adaptation, celle de l’explosion et celle de la confirmation. Si je suis aujourd’hui la femme et la joueuse que je suis, je le dois beaucoup à l’ASVEL. Le début a été un peu compliqué lors de mon arrivée, car je me mettais beaucoup de pression. Mais avec la blessure au genou d’Ingrid Tanqueray, j’ai eu ma chance et j’ai réussi à gérer derrière. J’ai pu jouer avec de la confiance et en étant libérée. » Une libération qui prend peut-être racine lors de l’automne 2018, en Espagne.

« On m’appelait « Le distributeur à Cocas »

11 points à 4/6 aux tirs, 13 passes et 2 rebonds en 27 minutes pour 22 d’évaluation. Une ligne de statistiques bien remplie. Julie Allemand a compilé ces chiffres en quarts de finale de la Coupe du Monde 2018 en Espagne, à Tenerife, face… à l’Équipe de France. Une rencontre que les Belges ont dominé 86-65 avant de décrocher une quatrième place lors de cette compétition. Valérie Garnier se souvient que « malheureusement pour nous, Julie Allemand s’était bien fait remarquer. Quand on entraîne au niveau international, on s’attend toujours à ce genre de choses, à ce qu’une joueuse puisse nettement briller. Ça avait été le cas de Julie. Elle avait fait un très bon match, malgré tous les renseignements possibles qu’on avait pu donner à nos joueuses sur son style de jeu. » Julie Allemand va même plus loin. « C’est vrai que j’avais fait une très bonne Coupe du Monde. J’étais bien lancée et c’est pour ça que ma saison 2018/19 a été aussi bonne. On avait une bonne équipe avec l’ASVEL. On avait des joueuses qui voulaient toutes se battre et gagner. L’état d’esprit était vraiment parfait et j’ai pu développer mon jeu. » Vive, rapide, agressive vers le cercle et dotée d’une belle vision de jeu, la meneuse connaît ses qualités. Peut-être un peu trop ? « J’ai toujours eu des facilités pour aller vers le cercle. Quand j’ai commencé le basket, on m’appelait le distributeur à Coca, car je cherchais toujours la passe en plus. J’allais jusqu’à l’anneau et je ressortais le ballon. Pour moi, ça a toujours été la passe avant le tir. » Avec ses différents coachs, Julie Allemand a travaillé pour essayer de changer son style de jeu. « Je travaille beaucoup mon tir. Le plus important, c’est la confiance de mes entraîneurs et de mes partenaires. J’ai pris conscience de mes capacités et j’essaye d’être une joueuse plus complète en attaque pour forcer les défenses à faire des choix. Je dois aussi passer un cap dans le leadership », analyse la meneuse. « Je trouve que Julie a deux principales qualités, c’est son intensité physique des deux côtés du terrain et son efficacité. Défensivement, elle a toujours les bonnes attitudes, ce qui lui permet de voler de nombreux ballons. Et offensivement, elle joue juste. Elle excelle dans la vision du jeu. Son volume de tirs n’est pas important, mais elle shoot à un haut pourcentage. Surtout, c’est une véritable joueuse d’équipe. Et pour une meneuse, c’est important », détaille celle qui est à la tête des Bleues depuis août 2013, Valérie Garnier. Pas forcément leader à travers les mots, c’est le comportement de Julie Allemand sur le terrain qui montre la voie à ses coéquipières.

Lattes, Indianapolis et Tokyo : trois villes, trois objectifs

Depuis le vendredi 10 avril, la saison de Ligue Féminine de Basket est arrêtée et ne reprendra pas à cause de la pandémie liée au Covid-19. Leader de LFB avant l’arrêt du championnat avec 14 victoires et 2 défaites et encore en lice en EuroLeague (quart de finale retour à disputer face à Orenbourg), le LDLC ASVEL Féminin voit sa poste 1 titulaire changer d’air pour l’année prochaine. Julie Allemand s’est engagée avec le BLMA pour l’exercice 2020/21, où elle retrouvera son compatriote belge, Thibaut Petit, sur le banc de Lattes-Montpellier. « Je trouve que le club de lattes-Montpellier n’arrête pas d’évoluer. Les ambitions sont toujours très élevées et vu que le championnat Français est le plus relevé en Europe, ça me donne encore plus envie d’accomplir de belles choses. Ici, tu peux perdre contre toutes les équipes. Avec Lattes-Montpellier, je vais continuer de grandir, je vais continuer d’apprendre, car je n’ai que 23 ans. Je sais que le staff est très compétent. C’est que du bonus pour moi. Et en plus, il y a le soleil, c’est génial. » Avec les signatures d’Ana Dabovic, de Nia Coffey ou encore d’Asia Dur, le BLMA peut prétendre à jouer de nouveau les premiers rôles sur la scène nationale.

Avant de revêtir ses nouvelles couleurs, Julie Allemand continue de s’entraîner, chez elle, dans le Nord. « Je suis confinée comme tout le monde, mais je continue de m’entretenir en faisant du renforcement musculaire ou du vélo d’appartement. Bon, après, je n’ai pas touché un ballon depuis plus d’un mois et ça, ça me manque terriblement », indique-t-elle. Un ballon qu’elle aura peut-être l’occasion de retoucher cet été si la saison de WNBA se tient. Draftée en 2016 en 33e position par l’Indiana Fever, la meneuse brainoise a été appelée cette année pour participer au championnat américain. « Franchement, quand j’ai été draftée, je n’y croyais pas. Je n’avais même pas regardé la Draft. C’est en me réveillant que j’ai vu les nombreuses notifications su mon téléphone. J’étais vraiment jeune quand ça s’est passé, donc je n’étais pas triste de ne pas y aller, car je n’étais pas prête. En ce moment, chaque mercredi, on a un appel avec les joueuses et le staff pour avoir les dernières informations. Pour le moment, pas mal de possibilités sont évoquées, mais on va forcément se retrouver avec des difficultés de calendrier ou des problèmes logistiques », résume la joueuse Belge de l’année 2016. « En attendant, je prends mon mal en patience. C’est dommage, car j’avais l’impression que l’année 2020 allait être une réussite totale avec les Jeux olympiques », complète Julie Allemand.

Qualifiée avec les Belgian Cats, la jeune femme devra donc patienter jusqu’en 2021 avant de découvrir une compétition olympique. Celle qui a participé à sa première rencontre internationale en 2017 avec l’équipe nationale a déjà un palmarès conséquent avec les équipes jeunes Vice-championne d’Europe U16 en 2011, médaillée d’argent au Championnat d’Europe U18 Division B ou encore présente dans le cinq idéal de l’Euro U20, la Belge sait malgré tout que le basket n’est que de passage.

« Je ne veux pas faire une overdose de basket »

Julie Allemand a eu comme idoles Diana Taurasi, Céline Dumerc ou encore Courtney Vandersloot, la meneuse d’Ekaterinbourg. La Belge connait les mouvements de ses trois joueuses par cœur. Elle s’en inspire pour se développer et également progresser individuellement, surtout mentalement. « Je suis quelqu’un de très stressée. Les gens peuvent le voir dès l’échauffement. Parfois, il faut du temps avant que je lâche un sourire. Une fois le match lancé, j’oublie tout le stress, mais les minutes précédant une rencontre, je suis vraiment concentrée. Et si j’ai raté un tir ouvert, un lay-up durant une rencontre ou si j’ai perdu trop de ballons, je vais me refaire le match toute la nuit. » Un perfectionnisme poussé à l’extrême pour cette dingue de basket. « Comme tout le monde, au début, j’étais passionnée, mais je ne pensais pas à en faire mon métier. Aujourd’hui, je me rends compte de la chance que j’ai. C’est un métier à part et nous avons beaucoup de chance. On fait du sport, on fait la sieste, on voyage, ce n’est pas le plus difficile. Certes, il y a des sacrifices, mais je me rends compte que nous ne sommes pas les plus à plaindre. » C’est avec cet état d’esprit que la finaliste de l’EuroCup 2015 s’est déjà projetée dans le futur. « À Braine, j’ai arrêté les études. Sur le coup, ça a été compliqué à encaisser pour mon papa, mais je savais que je devais faire un choix et que j’avais les capacités pour faire quelque chose dans le sport. Je ne voulais pas rater ça. Mais aujourd’hui, surtout avec la période de confinement, je prends du temps pour travailler sur des études de nutrition ou de développement personnel tout en améliorant mon anglais. Je ne veux pas penser tout le temps au basket, quitte à en faire une overdose. J’ai besoin d’avoir d’autres hobbies, d’autres passions. » Sérieuse, réfléchie et intelligente : Julie Allemand peut voir le futur avec ambition.

 

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