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Andrew Albicy, sorti par la porte, revenu par la fenêtre : « 2019 – 2021, ce sont les médailles de la survie ! »

« Si je peux aller aux Jeux Olympiques 2020 avec l’équipe de France de 3×3, ce sera avec grand plaisir », nous disait Andrew Albicy au cours de l’été 2017, quelques jours après avoir remporté l’Open de France à Lyon en compagnie de Jerry Boutsiele et des frères Sy (Amara et Bandja). À la fois lucide sur ses hypothétiques chances de réintégrer la sélection, lui dont la dernière cape remontait au 29 juin 2012, mais aussi sur l’opportunité offerte par le nouveau calendrier international. « J’essaye de tout faire pour y revenir, même si je sais qu’il y aura peut-être des fenêtres internationales qui feront que je pourrais être amené à y retourner, je veux en faire partie au sein du « vrai » groupe. »

La suite de l’histoire est connue : le natif de Sèvres compte désormais 40 sélections de plus qu’à l’époque (74, contre 34), un statut d’artisan majeur de la médaille mondiale de 2019 tant par son impact défensif que ses tirs lointains lors de la petite finale et, surtout, il a accompli son rêve d’aller à Tokyo. Non pas avec les Bleus du 3×3 mais bien, comme il le disait, avec le « vrai groupe » de Vincent Collet, pour un inoubliable podium au bout.

Une renaissance qu’il doit aussi largement à ses qualités défensives hors du commun, lui qui appartient à la caste des meilleurs stoppeurs du continent. « Quand il se met à défendre, c’est compliqué pour l’adversaire en face, ne serait-ce que d’enchaîner les dribbles face à lui », glisse Stéphane Dumas, l’assistant-coach de Gran Canaria, avant de s’étendre sur son importance actuelle dans l’équipe espagnole. « C’est une force de la nature. Il est rapide, intelligent, il a ce petit vice pour voller les ballons. Défensivement, c’est une machine de guerre ! Quand il est à 100% en défense, il est meilleur en attaque : il prend confiance, met ses quelques paniers et fait jouer les autres. C’est quelqu’un qui rend les autres meilleurs. Andrew, c’est du pani béni pour un coach ! C’est son relais sur le terrain. Il est extrêmement respecté par ses coéquipiers. Lors de notre match à Venise (le 15 février), l’entraîneur allait parler mais Andrew a demandé à prendre la parole. Son speech était parfait et je l’ai félicité car c’est exactement ce qu’il fallait dire. Il ne parle pas souvent mais quand il le fait, c’est clair, net et précis. »

Devenu un leader à Gran Canaria et le capitaine de l’équipe de France lors des fenêtres internationales : de la Seine-et-Marne à Las Palmas, le principal intéressé a accepté de longuement conter son parcours à notre micro. « Ma carrière, c’est comme la vie », souriait-il en préambule de l’entretien. « Il y a eu des hauts et des bas. » La voici narrée par ses soins, en quatre temps distincts, séparés par les nôtres.

Acte 1 : La progression, puis l’explosion

« J’ai commencé le basket à Coulommiers, quand j’étais en poussin. Je suis parti à Marne-la-Vallée à l’époque des minimes France et j’ai toujours fait les stages du Pôle Île-de-France mais je n’ai jamais été pris. À l’époque, ils voulaient des mecs plus costauds, plus grands. En minimes France, j’ai toujours fait des grosses stats. J’étais un peu rancunier (il rit) donc à chaque fois que je jouais contre un mec du Pôle, je lui mettais 40 points. J’avais toujours envie de montrer que j’ai le niveau pour arriver à mes fins. Après, je suis parti au PBR. J’ai commencé en cadets France derrière Matthieu Richecoeur et grâce aux circonstances, j’ai eu la chance dès ma première année cadet de me retrouver en Espoirs car il y a eu des blessures. Ça s’est plutôt bien passé et dès la deuxième saison, Christophe Denis, le coach des Espoirs, m’a dit qu’il ne voulait plus que je fasse un seul match avec les cadets. Pour moi, c’était un grand pas et ça s’est super bien passé. J’ai quand même fait un ou deux matchs avec les cadets France pour les aider à ne pas descendre en poule basse et ça a marché (il sourit). J’avais oublié mais c’est aussi lors de cette saison-là que j’ai débuté avec les pros (il rit). Mon premier match était au Mans en (mars) 2007. Je me rappelle très bien que je m’étais tapé Yannick Bokolo et Pape-Philippe Amagou en défense. Ce n’était pas facile (il sourit). En plus, on s’est pris 30 points sur ce match-là (60-82)… Personnellement, ça s’est plutôt bien passé (5 points, 3 interceptions et 1 passe décisive en 17 minutes). J’ai toujours saisi les opportunités qu’on m’a données.

Jimmal Ball, le mentor parfait :
« Je le remercie encore aujourd’hui »

Paris, c’est mon club formateur, ils me connaissaient, ils savaient ce que je valais. J’ai réellement démarré en Pro B. Je pense que c’était une bonne manière d’apprendre et surtout, j’ai eu la chance d’être derrière Jimmal Ball, ce qui m’a énormément aidé. Parce que c’était l’un des meilleurs mentors possible, franchement… Il a un peu le même profil que moi : très gros leader, très vocal. Pouvoir apprendre à côté d’un gars comme lui, c’est magnifique. Je le remercie encore aujourd’hui. On s’envoie toujours quelques petits messages à l’occasion, il me dit qu’il a un œil sur moi. Idem avec John Linehan : ce sont les deux joueurs qui m’ont inspiré toute ma carrière. Quand je suis arrivé au PBR, on m’a dit qu’il fallait que je sois comme Linehan si je voulais gagner ma place en pro. Le Virus, c’était un truc de fou comment il défendait (il rit). J’avais déjà ces qualités défensives mais pas autant. J’étais plus malin pour piquer les balles, plus dans ce style-là. Là, j’ai ajouté la dureté, où je suis plus dans l’opposition qu’avant. Ça vient avec l’expérience aussi.

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Jimmal Ball a eu une importance considérable dans le développement d’Andrew Albicy
(photo : Olivier Fusy)

De Zadar à Ricky Rubio, le tournant de l’été 2010

L’été 2010 a été l’une des meilleures périodes de ma vie. Premièrement, avec l’EuroBasket juniors, que l’on gagne à Zadar. Clairement, il n’y a personne qui croyait en notre génération… Celle devant nous était incroyable et on était toujours passé à côté, comme lors de notre 4e place en U18 par exemple. Pour notre dernière, on voulait au moins aller chercher une médaille et surtout faire un truc pour rendre hommage à Jonathan Bourhis (membre de la génération, présent lors du Mondial U19, décédé le 1er novembre 2009). À partir des phases finales, on a été incroyables… Du quart jusqu’à la finale, on a joué comme on n’avait jamais joué auparavant et en plus, je termine MVP. Dans cette équipe, il y avait Paul Lacombe, Maxime Courby, Nicolas Lang, Alexis Tanghe… Certains qu’on attendaient haut sont plus bas ou ont arrêté comme Christophe Léonard, qui était le gars de notre génération. Les blessures ont fait qu’il est déjà assistant-coach avec les filles. En revanche, des mecs qu’on attendaient moins ont fini par percer. Par exemple, j’ai revu Alexandre Gavrilovic quand j’étais en Russie. Il était à Minsk à l’époque. Il est devenu un joueur bien confirmé donc c’est top. Chacun a évolué différemment et a fait son trou, c’est cool.

Derrière, j’enchaîne avec l’équipe de France et le Mondial en Turquie donc c’est super enrichissant. Lors du premier match contre l’Espagne, je ne m’attendais pas du tout à rentrer sur le terrain (il rit). Mais je me suis donné à fond car j’avais l’opportunité de me montrer. Je me rappelle que ça parlait énormément sur les réseaux, même s’ils n’étaient pas aussi importants que maintenant. Moi, j’étais toujours sur mon petit nuage de l’été, champion – MVP, mais tu te rends rapidement compte qu’il y a une vraie différence avec les équipes de France jeunes. Il y a beaucoup plus d’attentes. Je me rappellerai toujours du match contre la Nouvelle-Zélande (70-82), le scénario catastrophe avec ce tir à trois points à la fin, et je vois toute la pression qui s’abat derrière, le président de la fédération qui arrive dans le vestiaire. Ce sont des trucs qui m’ont marqué. J’ai compris que ce n’était plus du tout le même monde, beaucoup plus sérieux. »

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En ouverture du Mondial 2010 à Izmir, Andrew Albicy domine Ricky Rubio et se fait un nom
(photo : Olivier Fusy)

Acte 2 : La confirmation

« Derrière, je reviens avec mon club du Paris-Levallois. La saison d’après Mondial s’est plutôt bien passée. Je passe devant Jimmal. C’était peut-être dans la logique des choses mais ça s’est fait progressivement. Il y avait une concurrence saine entre nous. Ensuite, je choisis de partir au BCM Gravelines-Dunkerque. C’est plus la saison de la confirmation que la précédente mais il me reste encore ce goût amer… Avec Ludo Vaty, on en reparle en permanence. On se dit : « Mais avec l’équipe qu’on avait, qu’est-ce qu’on a foutu ?! » 27-3 (il tape de dépit sur la table) : on a égalé le record de la Pro A pour rien du tout au final… C’est l’un des plus gros regrets de ma carrière. Je pense que c’était de la lassitude à la fin de l’année, on n’avait plus d’essence dans le moteur. Même si j’étais le plus jeune, j’étais l’un des leaders de l’équipe et j’avais envie d’aller soulever un trophée dans l’année. Avec les vieillards là (il rit) : Cyril Akpomedah, Yannick Bokolo, J.K. Edwards… Entre-temps, il y a aussi eu l’EuroBasket 2011 avec les Bleus. Je suis plus discret, je n’ai pas beaucoup de temps de jeu car Tony est là. Mais quoiqu’il arrive, l’équipe de France, je savoure à chaque fois. Je m’en foutais de ne pas jouer car j’apprenais. Et puis, l’Euro que fait Tony est incroyable… On sort quand même avec une médaille d’argent face à une Espagne imbattable et on se qualifie pour les JO. »

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2011/12, ici la défaite en finale des As contre Chalon, « l’un des plus grands regrets de sa carrière »
(photo : Olivier Fusy)

Acte 3 : Les hésitations

« Après la saison au BCM, je retourne au PL. Ce choix était du fait que j’étais trop… (il hésite) Parisien, clairement (il sourit). J’étais très bien à Gravelines, ça reste mon club de cœur en France mais c’est comme si j’avais le mal du pays. Je ne peux pas trop l’expliquer mais j’avais envie de rentrer à Paris, d’être à Paris. Au final, je regrette… Car je fais une année de merde, ma pire saison où rien ne se passe comme il faut. On est à deux doigts de descendre alors qu’on a sur le papier une équipe monstrueuse : Antoine Diot avec moi à la mène, John Cox, Sean May, Jawad Williams… Je pense que l’équipe n’a pas été très bien gérée. Trop d’egos, trop de problèmes internes. J’ai fait un gros travail sur moi cette saison-là et j’ai puisé dans cette expérience pour m’améliorer. Il y a un peu tout qui arrive en même temps : je fais une saison de merde, puis je ne fais pas les workouts NBA parce que je préfère privilégier l’équipe de France pour, au final, me faire couper au dernier moment… Et je ne suis pas drafté. Double coup de massue. Je prends l’été pour travailler. Ça m’a permis de me rendre compte que les acquis ne sont pas forcément des acquis (il rit), qu’il y avait des choses que je devais bosser. J’ai compris l’éthique de travail qu’il fallait avoir pour être performant. 

Paris – Gravelines – Paris – Gravelines : des choix contestés

Ensuite, Greg Beugnot arrive, fait le ménage, met des règles et tout se passe super bien. Avec lui, je réalise une première partie de saison comme jamais. Je suis n°1 Français à l’éval, pas loin du Top 5… Puis arrive la petite bagarre (avec la tentative d’étranglement de Jawad Williams sur John Holland, ndlr) qui a changé beaucoup de choses… Daniel Ewing suspendu deux mois, je me retrouve à jouer 40 minutes pendant six matchs et je suis vidé à la fin de la saison. Plus d’essence, plus d’accélération, plus le petit truc qui fait la différence, plus rien. Je me rappelle d’une discussion avec Greg qui me dit que c’est normal, que tout le monde aurait baissé pied en jouant autant.

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Jouer pour Greg Beugnot a permis à Andrew Albicy de repartir de l’avant
(photo : Sébastien Grasset)

Lors de l’été 2014, on a essayé de voir avec mon agent pour partir à l’étranger mais je n’ai pas eu d’offres attrayantes. Paris voulait me resigner mais pas au tarif que je voulais… qu’ils ont d’ailleurs donné à un autre meneur étranger au final (il rit). Ça a été une période très stressante pour moi, je fais une très bonne saison mais je n’ai rien sur la table. Puis Christian Monschau m’appelle à la fin de l’été pour me dire : « Andrew, j’ai vu que tu n’avais pas de club. J’avais vraiment envie de retravailler avec toi. J’étais déçu du fait que tu sois parti, je pense que tu as encore des choses à faire, j’ai envie de te lancer pour deux ans avant que tu prennes ton envol en Europe. » Et c’est ce qui s’est passé. Avec Gravelines, on n’était peut-être pas la meilleure équipe mais je me suis épanoui, dans le système Monschau qui met pas mal en valeur les meneurs de jeu. Pour ça, je ne le remercierai jamais assez. Retourner au BCM, ce n’était pas un choix par dépit mais c’est sûr que ce n’était pas ce que je voulais. Mais je ne souhaitais surtout pas me retrouver dans une galère à attendre novembre / décembre pour rejoindre une nouvelle équipe. Je ne suis pas ce mercenaire, je n’aime pas ça. Je me suis dit que si je n’avais pas eu les offres que je voulais, c’est parce que je n’ai pas fait ce qu’il fallait. Oui, on peut dire que cela a été un coup de frein dans ma carrière mais en vrai, c’est peut-être ce dont j’avais besoin pour me remettre tout à l’endroit. »

Acte 4 : La « rédemption »

« Quand je reçois la proposition d’Andorre en 2016, je ne connaissais rien du championnat espagnol et encore moins d’Andorre. Mais le projet m’a plu, c’était super attrayant. On ne va pas se mentir, c’était aussi pour l’exposition. Au final, alors que c’était juste un promu qui venait de se maintenir, on fait une première saison incroyable : Copa del Rey, playoffs, Coupe d’Europe. Le club n’attendait même pas autant… La deuxième année est plus compliquée, ce sont les débuts en EuroCup, on n’a pas d’expérience. Avec le seul bémol d’Andorre : les voyages sont interminables. Trois heures de bus jusqu’à l’aéroport de Barcelone, ça use. On termine quand même 6e du championnat et on joue le Barça en playoffs : on les tape d’entrée chez eux (94-76) mais on rate le coche ensuite (81-85). Et du coup, quand ça se passe comme ça, le Barça ne te laisse pas de deuxième chance (71-91). Puis lors de la troisième saison, on réalise encore une année incroyable. On va jusqu’en demi-finale de l’EuroCup, où l’on tombe logiquement contre Berlin. Individuellement, je termine dans le meilleur cinq de l’EuroCup. J’étais dans des super conditions, très bien, à l’aise.

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Andorre et Andrew Albicy ont grandi ensemble
(photo : ACB Photos / A. Bouzo)

Les fenêtres puis Pékin 2019, « le tournant »

Andorre m’a remis sur la scène de l’équipe de France avec les fenêtres. Les gens les ont beaucoup critiqué mais moi, je ne peux pas le faire car ça m’a permis de revenir en Bleu. Comme je dis à chaque fois, les choses sont mises en place pour une bonne raison (il explose de rire). Si ça se trouve, sans fenêtre, on n’aurait jamais pensé à me reprendre. Pendant l’EuroBasket 2017, moi, je suis à Lyon pour jouer (et gagner) l’Open de France en 3×3. Je ne suis pas débile, je voyais la concurrence à mon poste en 5×5. Les mecs jouaient tous en EuroLeague et on n’allait pas aller chercher un gars d’EuroCup jouant dans une petite équipe en Espagne. J’étais conscient de ça. De fait, le 3×3, qui me plaisait énormément, était une éventualité pour aller aux JO de Tokyo. Au final, les fenêtres arrivent, ça se passe merveilleusement bien. On gagne tout, Vincent Collet fait même l’essai de mixer un peu le groupe des fenêtres et des cadres quand on était à Krasnodar (lors de l’été 2019, ndlr) On gagne, je fais un très bon match. Mais quand il annonce la liste pour la Coupe du Monde, j’étais comme ça… (signe de la peur) Je ne pouvais qu’espérer, j’avais fait tout ce que je pouvais mais ce n’était plus entre mes mains.

Cet été 2019… Enfin ! Tout ce que je voulais arrivait enfin : j’étais dans le cinq majeur en équipe de France et je signe en EuroLeague, avec le Zénith. Ça a pris du temps mais c’est enfin arrivé. Lors de la Coupe du Monde, j’ai eu un gros impact sur le tournoi. Ça a consolidé ma place en équipe de France. Tout le monde retient les interceptions sur Kemba Walker mais en fait, moi, ce n’est même pas ça qui m’a marqué. J’ai défendu sur les meilleurs joueurs de chaque équipe et je les ai tous plus ou moins diminués. Patty Mills était incroyable et contre nous, j’ai toujours réussi à le faire chier, clairement. Personnellement, c’était ça ma satisfaction. Cette Coupe du Monde a été le tournant de ma carrière en Bleu. J’ai confirmé, j’ai eu un vrai impact. Cela a confirmé tout le travail de rédemption, entre guillemets, que j’avais fait avant, le fait de passer par la petite porte pour arriver sur la grande scène. C’est ce que je retiens vraiment.

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Albicy à l’interception, Walker à terre : l’image symbole de l’impact du Francilien en Chine
(photo : FIBA)

Tokyo, la phrase réconfortante de Yann Barbitch

Les JO, ça a été différent… Ils ont été beaux mais j’ai eu zéro impact, je n’ai rien pu faire car j’étais blessé. J’étais archi-content de la médaille, les gars ont été énormes, mais c’était frustrant de rester sur le côté. J’ai une phrase qui m’a marqué de Yann Barbitch. À un moment donné, je lui ai dit que je ne montrais pas aux autres la frustration que j’avais de ne pas être sur le terrain. Ils n’en avaient pas besoin, je ne voulais pas montrer que ça me faisait chier d’être blessé et de ne rien faire et je préférais rester positif. Il me répond : « Tu sais que c’est aussi grâce à toi qu’on est là, il ne faut pas que tu l’oublies. C’est aussi ton travail de la Coupe du Monde qui fait qu’on est aux JO. » Ça m’a réconforté. Mentalement, c’était dur mais je suis resté positif parce que les gars avaient besoin de moi. Je pouvais apporter autrement que sur le terrain. Sur le vocal, sur ce que je voyais, j’ai essayé de les aider ce que je pouvais. C’est incroyable ce que les gars ont fait… Nico Batum sur Prepelic, c’est le contre de la décennie ! Quand j’ai vu Prepelic partir, j’ai vu Nico (Batum) derrière, je savais qu’il allait l’attraper. Nico a toujours fait ces contres-là à la GoGo Gadget, pourquoi il ne le ferait pas sur la dernière action ?. Alors oui, quand tu vois Prepelic passer sur le premier step, tu te dis « ah merde ». Mais quand tu sais que le bras de Nico est plus long que la normale, voilà… (il rit).

Avant, j’avais un regard extérieur sur l’équipe de France. Depuis que j’ai intégré l’équipe, j’ai l’impression que c’est un groupe de potes qui va à la guerre ensemble. Ça change par rapport à des mecs qui sont là pour gagner un truc ensemble mais sans aucune connexion entre eux. Nous, c’est tout le contraire. On est comme des frères. Par exemple, hier, je reçois un message de Evan qui m’envoie une musique de zouk : « tu la connais celle-là ? » (il rit) On ne va pas se parler pendant cinq mois mais il y a une vraie connexion entre nous. C’est ce qui fait la différence et qui fait qu’à chaque fois , c’est un putain de plaisir pour moi d’aller en équipe de France et d’être avec ces gars. Maintenant, j’ai hâte d’y retourner et d’aller chercher quelque chose encore avec le championnat d’Europe qui arrive. On a montré qu’on pouvait être la meilleure équipe d’Europe. Maintenant, pour pouvoir le dire, il faut soulever le trophée. Il y a de la concurrence, des jeunes qui arrivent vite. À moi de me faire ma place. Si je peux être leur vétéran, aucun souci… J’ai juste envie d’être dans le groupe.

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Seulement 35 minutes de jeu pour Albicy aux JO mais une superbe médaille olympique au final
(photo : FIBA)

Seulement une demi-saison en EuroLeague…

L’EuroLeague, c’est frustrant car je n’y ai joué que six mois. Après, ça ne m’empêche vraiment pas de dormir. C’est sûr que j’aurais voulu y jouer pendant 15 ans, je ne vais pas dire le contraire, mais je trouve quand même que mon parcours est assez bien. Avec Saint-Pétersbourg, le Covid a tout cassé. Avec tout ce qui s’est passé avant, je sentais que je pouvais clairement jouer à ce niveau-là. Je n’avais aucune difficulté sur le parquet, ça se passait plutôt bien. Je me souviens du game-winner au Fenerbahçe, de grosses perfs contre le Zalgiris et Milan. J’ai montré que je pouvais être à ce niveau-là. Sauf qu’après le Covid, il n’y a pas eu de forte demande et Gran Canaria est venu taper à la porte avec une belle offre, un beau projet. C’est un beau club en Espagne qui prétend à toujours être dans le Top 8. Il y avait l’EuroCup. Surtout, j’adore l’Espagne. Et au final, ça se passe super bien. L’an dernier, la défaite en demi-finale de l’EuroCup est frustrante car on savait qu’on pouvait faire quelque chose et on n’a pas fait les matchs qu’il fallait. Quand on regarde bien, je ne pense pas que Monaco était la meilleure équipe de l’EuroCup. Mais ils ont gagné, chapeau à eux, ils ont fait ce qu’il fallait et ils étaient là au bon moment. Cette saison, nous avons été très déçus de ne pas faire la Copa del Rey. Nous avons très bien commencé mais les blessures, dont la mienne, nous ont fait passer de la 4e à la 10e place. Quand on voit les équipes qui sont devant nous, on se dit que ce n’est pas possible… Heureusement, en EuroCup, on reste premiers (entretien réalisé avant la défaite à Bourg-en-Bresse, ndlr) donc c’est cool.

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À Gran Canaria, Andrew Albicy s’épanouit depuis 2020
(photo : Jacques Cormarèche)

Le meilleur meneur défenseur d’Europe ?
« Et là, Patty Mills me dit… »

Je me contrefous de mes stats car je sais que mon impact sur le terrain a beaucoup plus de valeur que des chiffres sur un bout de papier. La défense, pour moi, c’est une question d’être malin, la connaissance du jeu aidant beaucoup, et surtout la forme physique. Je pense avoir des capacités supérieures à la moyenne, au vu de ma taille. De plus, j’ai toujours eu ce côté-là, focus sur la défense. C’est vraiment un aspect qui m’a toujours tenu à cœur et c’est pour ça que j’ai ce niveau. Personnellement, je pense être le meilleur meneur défenseur d’Europe. C’est une fierté car je n’ai pas peur d’être sur les gros joueurs. Pour moi, à chaque fois, c’est un défi et dès que j’arrive à les stopper, c’est une récompense du travail effectué tout au long de ces années par rapport à la défense. Après, je n’ai pas que ça dans mon jeu mais c’est vrai que ça en représente une grosse partie en équipe de France. Ça m’a permis d’être dans le groupe, d’y rester pour l’instant, donc la défense représente une part de mon identité avec les Bleus. J’en suis très fier. Je sais qu’il y en a certains qui n’ont pas forcément envie de jouer contre moi. J’ai une image des Jeux Olympiques où je demande à faire une photo avec Patty Mills et en gros, il me dit : « Je suis content qu’on n’ait pas joué contre vous, je sais que tu allais défendre sur moi et c’est une galère à chaque fois. » Depuis la Coupe du Monde, je l’ai marqué et c’est vraiment une fierté car c’est un très gros joueur au niveau FIBA, le meilleur vis-à-vis que j’ai eu en équipe de France. Avec l’Australie, il a toujours fait des grosses compétitions et j’ai été très content de l’avoir limité à chaque fois qu’on a joué contre eux. »

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Avec les compliments de l’un des meilleurs attaquants du système FIBA…
(photo : FIBA)

Quel acte 5 ?

« Ce n’est pas terminé. J’espère encore avoir cinq belles années dans les jambes à haut-niveau. J’ai 32 ans, je n’ai plus rien à prouver à personne. Si quelqu’un me veut, il sait ce que je vais apporter. On verra ce qui viendra à moi cet été, je ne suis plus sous contrat avec Gran Canaria. Si je peux, j’aimerais bien rester en Espagne. Ma femme est Espagnole donc ça aide. Je suis ouvert à toutes les opportunités possibles mais il y aura une priorité sur l’Espagne. Il y a eu des hauts et des bas dans ma carrière mais du moment que mes proches sont fiers de moi, que j’ai le soutien de ma famille, le reste est secondaire. Comme beaucoup, ils se sont posés des questions sur mes choix mais ils m’ont toujours encouragé et accompagné. Ça a payé… Si je peux aller jusqu’aux Jeux de Paris, ce serait la meilleure fin possible pour ma carrière. Au cours de mon parcours, il y a toujours eu des obstacles, des choses qui ont fait que ça n’allait pas dans le bon sens. La petite faille qu’il y avait, je me suis engouffré dedans pour essayer de remonter. La survie (il rit). On peut dire que ce sont les médailles de la survie. Ça reste des très, très belles médailles. J’en ai trois en équipe de France A : argent, argent, bronze. Maintenant, j’aimerais bien toucher cet or là…

Je pense à un peu à ma reconversion. Je fais du travail en sous-marin. On peut voir sur les réseaux sociaux que je suis beaucoup dans le gaming, donc ce sera dans ce secteur-là. Cela concerne tout ce qui touche au esport, je suis ambassadeur de GameWard, c’est vraiment un milieu qui m’intéresse, surtout que je suis un petit geek aussi. Depuis le Covid, le esport prend énormément d’ampleur ! Je touche un peu à tout pour l’instant et on verra dans quel position je serai ensuite. »

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