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Blake Schilb, Champagne et frustration

Ses cheveux sont grisonnants et, de son propre aveu, le physique ne suit plus toujours mais allez donc demander à Boulazac si Blake Schilb (2,01 m, 35 ans) n’offre plus des séquences de celui qui fut le meilleur joueur du championnat de France en 2012, également considéré comme le plus grand de l’histoire de l’Élan Chalon. Huit jours après nous avoir livré ses souvenirs, ses frustrations et ses espoirs dans le salon d’un hôtel marseillais du quartier du Rouet, l’ailier de Châlons-Reims a crucifié les espoirs de playoffs du BBD d’un tir en buzzer tout en maîtrise. Une action qui résume parfaitement la saison de l’Américano-Tchèque (13,1 points à 53%, 4,3 rebonds et 4,2 passes décisives pour 16,1 d’évaluation en 33 minutes) : au ralenti, certes, mais tout en contrôle et en fondamentaux.

Après avoir connu l’ivresse des sommets avec le triplé chalonnais de 2012 ou l’épopée européenne du Galatasaray Istanbul, Blake Schilb officie désormais dans un anonymat beaucoup plus certain, dans la confidentialité de la 14e place du CCRB et la quiétude des enceintes champenoises, René Tys ou Coubertin. Peu importe si les feux des projecteurs ne sont plus braqués sur lui, là n’est pas le problème, mais l’homme aux 47 apparitions en EuroLeague aspire, dès la saison prochaine, à bien mieux qu’un nouvel exercice sans relief afin de clore sa carrière sur un sourire. Cela se ressent à travers toutes les lignes d’un entretien fleuve, où l’insatisfaction – pourtant perceptible – n’a jamais été avoué, mais presque.

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Au micro, ou sur le terrain, Blake Schilb a souvent des choses à dire
(photo : Sébastien Grasset)

Châlons-Reims, promesses déçues :
« Il y a des moments où l’on s’arrachait les cheveux »

Nous arrivons bientôt au terme de la saison. Il sera prochainement l’heure de tirer un bilan de votre retour en France. Avez-vous trouvé ce que vous êtes venu chercher à Châlons-Reims ?

Honnêtement, je n’avais pas trop d’attentes en arrivant ici. J’ai signé deux ans mais je ne connaissais pas les joueurs en place. Au vu des qualités individuelles de chacun, je peux maintenant dire que l’on aurait pu faire bien mieux. On a laissé échapper certains matchs sur le fil. C’est frustrant mais il y a des moments charnières dans une saison.

Il semble juste d’affirmer que la saison de Châlons-Reims est décevante. Au moment où nous nous parlons (entretien réalisé le jeudi 18 avril, à la veille de la 28e journée, ndlr), même si vous ne semblez pas véritablement en danger, le maintien n’est pas encore acquis. Il y avait beaucoup de promesses sur le papier avec de nombreux joueurs confirmés mais vous n’avez jamais su trouver votre rythme.  Pourquoi ?

Je pense effectivement qu’il faut déjà s’attacher à terminer la saison sur une bonne note. Les joueurs sous contrat comme Jo (Passave-Ducteil), Jimmy Baron ou moi-même vont mettre un point d’honneur à sécuriser notre place en Jeep ÉLITE pour la saison prochaine. C’est à nous de transmettre cette énergie. Mais oui, cette saison a été frustrante parfois, vraiment. Il y avait des entraînements où l’on s’arrachait les cheveux, où l’on ne trouvait pas de solutions. Il y a eu des périodes en début de saison où l’on répétait les mêmes erreurs, sans apprendre de celles-ci. On a connu des hauts et des bas mais j’ai l’impression qu’on a fini par en tirer les leçons. La preuve est que nous jouons notre meilleur basket en ce moment, même si nous ne gagnons pas forcément plus de matchs.

Effectivement, vous montrez de vrais progrès défensifs en cette dernière partie de saison mais vous avez été incroyablement laxistes dans ce domaine jusqu’à la fin de l’hiver. Pourquoi avez-vous mis autant de temps à trouver de l’efficacité ?

Oui, on autorisait tellement de choses en défense (il soupire). Une partie de la réponse se situe dans le manque d’alchimie collective : personne ne connaissait les habitudes de ses coéquipiers. L’autre partie était le fait de croire que l’on pouvait défendre ensemble, croire que l’on pouvait trouver cette efficacité. On se reposait trop sur notre talent offensif.

Vous, personnellement, comment vous êtes-vous senti sous les ordres de Cédric Heitz ? On vous a vu avec un rôle différent que ce que vous aviez l’habitude de connaître en France.

Bien sûr. Cédric voulait me faire venir ici pour être un leader. Je sais que je ne suis plus en mesure de faire certaines choses que je faisais étant plus jeune mais je peux conseiller les moins expérimentés. J’ai appris de ce point de vue là. C’est également la première fois que je joue pour un autre entraîneur que Greg Beugnot en France. C’est différent, cela a pris du temps pour m’adapter mais je n’ai jamais arrêté de croire en la philosophie du coach. Et les choses se mettent en place pour tout le monde en ce moment, tardivement certes.

Le club de Châlons-Reims est encore jeune avec seulement 5 années d’existence. Que lui manque-t-il pour parvenir à atteindre un niveau qui lui permettrait d’ambitionner les playoffs ?

C’est difficile de jouer dans deux villes différentes. On peut le voir comme un atout mais on ne s’entraîne pas suffisamment dans un endroit pour vraiment avoir l’impression de jouer à domicile, d’y ressentir un avantage. En tant que club, vous voulez également créer un environnement positif, rendre vos joueurs heureux pour les mettre en condition de gagner des matchs. Or, il y a eu des moments où les joueurs n’étaient pas spécialement contents du déroulé des choses en dehors du terrain. Et cela gaspille de l’énergie inutile. Il faut avoir une vue d’ensemble : si tous les joueurs sont heureux, ils partageront un but commun, celui de gagner. Et ce sera positif pour le club.

Vous vous êtes engagé en faveur de l’Élan Chalon le 16 juillet 2009. Cela va donc bientôt faire dix ans. Comment jugez-vous l’évolution du championnat de France sur la dernière décennie ?

Le championnat a toujours été compétitif, avec un jeu rapide, athlétique et porté sur l’attaque. On ne cesse de voir des joueurs qui viennent faire un ou deux ans ici pour ensuite partir plus haut. Et souvent, on les voit revenir (il rit). Même si le niveau d’ensemble est déjà relevé, je pense que ce sera bon pour le championnat d’avoir une équipe en EuroLeague la saison prochaine. Chaque club en tirera des bénéfices.

Il y a six ou sept ans, vous étiez la superstar du championnat, tout le monde parlait de vous. Ce n’est plus le cas dorénavant. Est-ce un grand changement ?

Cela ne me dérange pas. Je suis plus âgé maintenant, je comprends. En plus, je ne sors pas d’une grande saison avec Séville. Être capable de rebondir après cet échec était mon premier objectif. La célébrité ne l’a jamais été.

Sans parler de célébrité, avez-vous l’impression de toujours posséder un statut spécial en Jeep ÉLITE, d’être regardé différemment que les autres par le petit monde du championnat ?

J’espère que c’est le cas. J’espère que ce que j’ai accompli ici avant conserve toujours une certaine valeur maintenant. Je pense qu’il y a du respect parmi les autres joueurs et les coachs. Bien sûr que j’apprécie cela : si une autre équipe fait une prise à deux sur moi, je le remarque (il rit) et cela me donne plus de confiance. Je me dis : « Eh, ils pensent que je suis toujours capable de faire ça. »

L’Élan Chalon, glorieux souvenirs :
« Dans l’histoire »

Sept ans après, réalisez-vous que la saison 2011/12 avec le triplé de l’Élan Chalon est l’une des plus abouties de l’histoire de la Jeep ÉLITE ?

Oui, ça a été une aventure phénoménale. Sans oublier la seconde place à l’EuroChallenge. Nous avons traversé tellement d’émotions différentes lors de cette saison. Il me semble même que l’on a remporté la dernière finale sèche non ? (Correct) Voilà, rien que ça, c’est déjà historique. Cette saison nous a fait rentrer dans l’histoire, indéniablement.

Mais ce triplé n’a failli ne jamais exister. Votre relation avec Gregor Beugnot n’est pas partie sur des bases idylliques…

(Il rit) Non, ce n’était pas facile au début. Il a fallu être capable de passer outre cela, d’accepter ses erreurs, de faire preuve d’humilité. Nous avons eu une grande conversation tous les deux, avons su admettre nos torts et cela nous a permis d’aller de l’avant, ce qui a été positif pour tout le monde.

Êtes-vous toujours en contact après votre dernière expérience commune au Paris-Levallois ?

Je n’ai pas parlé avec Greg depuis longtemps. Il y a eu des malentendus entre lui et moi au moment de quitter Levallois. On s’est simplement croisé à Lille lors de l’EuroBasket 2015. Mais j’ai suivi son parcours : je sais qu’il a entraîné Bourg-en-Bresse et Nancy.

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Au Paris-Levallois, une rupture délicate avec Greg Beugnot en 2014/15
(photo : Vincent Janiaud)

Des malentendus à Levallois ?

Oui… Émotionnellement, c’était compliqué de me concentrer sur le basket à cette époque. J’avais de graves problèmes familiaux, concernant mon frère (Tyler Patterson, décédé le 11 décembre 2015 d’un cancer à l’âge de 25 ans, ndlr). Greg le connaissait, j’ai même essayé plusieurs fois de le convaincre de le recruter à Chalon. Il me répondait : « Non, si je fais ça, tout le monde va dire que c’est juste parce que c’est ton frère » (il sourit). Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis, rien ne modifiera notre relation et le fait que l’on a réussi à accomplir quelque chose que peu sont en mesure de faire.

Revenons à Chalon : quels souvenirs gardez-vous de vos quatre ans avec l’Élan ?

Les titres, bien sûr ! La première Coupe de France en 2011, le triplé historique de 2012, la découverte de l’EuroLeague… Je me rappelle aussi des gens comme Rémy Delpon, qui a tellement aidé ma femme après son accouchement, ou Yves Duvernois. Avec son épouse, Yves était même le témoin de mon mariage. Personne ne le sait mais nous étions extrêmement proches. Son décès nous a beaucoup touché.

Et si l’on dit que votre nom restera associé à Chalon en France, pas à Levallois ni à Châlons-Reims, mais à l’Élan, vous êtes d’accord ?

Évidemment. Je ne voudrais pas que ce soit d’une autre manière de toute façon. À moins que l’on fasse quelque chose d’historique la saison prochaine, je ne voudrais pas voir mon nom associé à un autre club. Et même si cela arrive, cela ne voudra pas dire qu’on retirera notre épopée des livres d’histoire à Chalon. L’Élan restera comme le moment fort de cette partie de ma carrière.

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Chalon bat Le Mans 95-76 en finale en 2012 : l’Élan est champion de France pour la première fois
(photo : Sébastien Grasset)

Avec Chalon, vous avez pris part à l’un des matchs les plus célèbres de la dernière décennie : la belle de la demi-finale des playoffs en 2012 contre Orléans où l’OLB menait 73-57 à la 33e minute avant de s’incliner sur un tir de votre part. Un match qui a suscité de nombreuses controverses et polémiques arbitrales. Là aussi, de l’eau a coulé sous les ponts. Sept ans après, quel est votre regard sur ce match et sur ce qui en a suivi ?

Ah, qu’on était des tricheurs et tout (il sourit) ? Nous étions une équipe résistante. Cela partait de notre coaching staff qui ne doutait jamais, Greg Beugnot et Mickaël Hay, et je peux vous citer tous les joueurs. Bryant Smith était le plus âgé et il montrait l’exemple, tout comme Steed (Tchicamboud), JBAM, Ilian (Evtimov). Nous avions aussi un rookie à la dent dure : Malcolm Delaney. Il voulait se battre avec tout le monde, aucune importance pour lui. Alors on ne voulait pas abandonner. Tout s’est joué sur le dernier tir et je ne voulais pas laisser tomber ces gars, qui m’avaient pourtant accordé toute leur confiance. Être en mesure d’inscrire ce dernier panier et de nous envoyer en finale était un sentiment incroyable, surtout au vu de la rivalité grandissante avec Orléans. On était tous prêts à se battre sur le terrain. Ils avaient vraiment une bonne équipe, très vicieuse et dure. J’ai toujours dit que s’ils avaient gagné au Colisée, ils auraient ensuite remporté le titre à Bercy sans aucun doute. Quant aux polémiques… Peu m’importe. Pour revenir, on a dû rentrer nos tirs et trouver de l’efficacité en défense. Ils ont commis des erreurs de leur côté, on a su capitaliser dessus. Il faut dire que nous étions passés par là aussi : on a fait les mêmes erreurs en finale de l’EuroChallenge contre le Besiktas et on ne voulait pas retomber le piège.

La folie à Belgrade ou Istanbul :
« Et là, je vois une chaise m’arriver dessus au Pionir… »

Plus récemment, vous avez également participé à un autre affrontement resté dans les mémoires en France : la finale de l’EuroCup en 2016 entre votre équipe du Galatasaray Istanbul et Strasbourg. Forcément un autre moment fort de votre carrière ?

Bien sûr. Nous avions une équipe qui se pensait depuis le début capable de remporter l’EuroCup et nous l’avons fait. Pour moi, affronter Strasbourg était comme une manière de me dire que je pourrais jamais me défaire de la France (il rit). Je crois que tout était écrit à l’avance, que c’était censé se passer comme ça. La SIG avait une équipe incroyable, extrêmement bien coachée, mais, avec le format de l’époque, recevoir au retour devant 17 000 furieux nous conférait un avantage indéniable. Ça s’est vérifié, bien que Strasbourg ait bien joué lors des deux matchs. Ils nous ont posé énormément de problèmes. S’il y avait eu un troisième affrontement sur terrain neutre, je ne sais pas du tout qui l’aurait emporté…

Galatasaray était une étape importante de votre carrière non ? Si l’on excepte la République tchèque, votre réputation était seulement grande en France. Par exemple, vous aviez échoué à l’Étoile Rouge de Belgrade quelques années auparavant. Il s’agissait de prouver que vous pouviez réussir ailleurs qu’en Pro A ?

Tout à fait, cela renforce le sentiment de réussite de ma carrière. Je peux me dire que j’ai gagné en France, mais que j’ai aussi pu le faire ailleurs. Même si nous n’avons pas fait très bonne figure la saison suivante en EuroLeague.


Blake Schilb exulte : le Galatasaray a remonté son déficit de 4 points pour remporter l’EuroCup
(photo : EuroCup)

À Belgrade ou Istanbul, vous avez dû connaître des ambiances incroyables dans votre carrière. Est-ce que vous avez vu des choses particulièrement hors du commun dans les tribunes ?

J’ai reçu une chaise lors de mon premier derby contre le Partizan Belgrade en 2013 ! Ils avaient une jeune équipe talentueuse avec Joffrey Lauvergne, Léo Westermann, Bogdan Bogdanovic… Nous, il y avait DeMarcus Nelson et Boban Marjanovic. On partageait la même salle, le Pionir, mais en l’occurrence, c’était leur match à domicile. On gagne en prolongation, on se regroupe au milieu du terrain et certains joueurs disent qu’il va falloir courir. On fait le cri de guerre « 1-2-3, Team ! » et mes coéquipiers rentrent tous aux vestiaires en courant. Au début, je ne comprends pas trop, je me mets à courir avec un peu de retard et je vois une chaise m’arriver dessus juste avant le tunnel. Heureusement, je n’ai pas été gravement blessé mais je n’ai ensuite plus jamais été surpris par ce que j’ai pu voir dans les tribunes. Les supporters turcs étaient tout aussi fous, mais d’une manière différente. Gagner l’EuroCup dans cette ambiance à l’Abdi Ipekci était encore mieux. Je me souviens également d’un match de playoffs en 2016 contre le Fenerbahçe. On perd les deux premiers matchs à l’Ulker Arena. Pourtant, on sait qu’on peut les battre car on l’a déjà fait plus tôt dans la saison. On remporte le troisième match chez nous et après le buzzer final, l’un de nos supporters va cracher sur Zeljko Obradovic. C’est dégoûtant, il sort du parquet avec la marque du crachat sur le visage. Ce n’était pas nécessaire mais notre victoire lui a fait perdre les pédales. Donc 48 heures plus tard, on reçoit le Fenerbahçe pour le Match 4 à huis-clos. Or, battre le Fenerbahçe sans soutien populaire, vous imaginez la difficulté de la tâche… On a donc perdu la série. Alors, autant qu’ils peuvent nous aider, les supporters nous font parfois du mal aussi.

Le contraste n’est pas trop saisissant avec René Tys ou Coubertin ?

C’est sûr que c’est beaucoup plus tranquille ici, surtout à Châlons où le public est un peu plus âgé. Cela ne les empêche pas d’apprécier le basket, ils le font juste avec le point de vue de personnes plus âgées. De toute façon dès que je pénètre sur un terrain de basket, je veux donner aux gens ce qu’ils sont venus voir. Je ne veux pas que les spectateurs quittent la salle gênés par ma performance, je veux qu’ils se disent que j’ai été intense, que je comprends vraiment jouer au basket.

Vous en avez déjà un peu parlé, mais que dire de votre dernière saison en Espagne ?

C’était une souffrance. La ville de Séville est magnifique. Petit conseil tourisme, allez-y ! L’Alcazar de Séville est le palais de Dorne dans Game of Thrones. Mais justement, la ville est tellement agréable que c’est peut-être la raison expliquant pourquoi ne peut se concentrer sur le basket là-bas. Je suis arrivé tard dans la saison. Il y avait déjà eu des problèmes comme le départ de Samardo Samuels à la suite d’une dispute avec le coach. Le club a perdu ses huit premiers matchs, a changé l’entraîneur mais les mauvaises habitudes ont continué. Le Betis n’était déjà pas très performant la saison précédente et n’a pas réussi à inverser la dynamique. Ça arrive mais parfois, il faut tout détruire pour recommencer à zéro. Je pense que nous étions en plein dans ce processus mais cela me fait honte d’en avoir fait partie. Je n’avais jamais connu de relégation auparavant. Maintenant, je sais que cela n’est pas une blague, que ça peut arriver. Et surtout, je sais que, dans n’importe quelle situation, je ne veux jamais revivre cela.

La Coupe du Monde, ultime échéance avec la République tchèque :
« Ne crois pas que tu vas marquer 30 points sur Kevin Durant »

Parlons un peu de votre équipe nationale : la République tchèque s’est qualifiée pour sa toute première Coupe du Monde cette année. C’est un aboutissement énorme pour le pays ?

Oui, c’est génial. Je n’avais pas participé à l’EuroBasket 2017 et je sais que j’ai déçu certaines personnes à la fédération. Néanmoins, il s’agissait de raisons personnelles. Pouvoir prendre part aux fenêtres internationales, faire un break par rapport à la saison en club, était quelque chose de bien. Je suis heureux de pouvoir jouer une Coupe du Monde, surtout que ce sera ma dernière sortie avec l’équipe nationale.

Donc si le coach veut de vous, vous serez en Chine cet été ?

Il m’a déjà dit qu’il me voulait. Donc oui, je serai à la Coupe du Monde et ce sera ma dernière campagne internationale. Je l’ai mérité. Le sélectionneur ne peut pas me refuser ça maintenant, j’ai tourné à 14 points de moyenne pendant les qualifications (il rit). C’est super pour le pays.

Votre qualification a-t-elle eu de l’écho en République tchèque ?

Tout à fait. La République tchèque est surtout connue pour le hockey et sa consommation de bières (il sourit). Être en mesure de briller dans un autre sport au point de se qualifier pour une Coupe du Monde est positif pour le pays.

Et vous, l’enfant de l’Illinois, le tirage au sort vous a donné les États-Unis en phase de poules. Un match contre votre pays natal en Coupe du Monde, des duels avec les James Harden, Kevin Durant et compagnie, vous ne pouvez nier que ça risque d’être l’une des rencontres les plus spéciales de votre vie ?

Oui, notre premier match en plus. Je suis déjà en train de me préparer, je fais du scouting devant les playoffs (il rit). Mes amis, ma mère, tout le monde me disait que j’allais affronter les États-Unis. Et je ne voulais pas qu’ils disent cela ! Puis là, Kobe Bryant qui tire Team USA et la République tchèque ensemble… Il aurait mieux fait de rester à la retraite (il sourit). Plus sérieusement, c’est cool et je suis sûr que ce match sera à la hauteur de mes attentes. Un peu bizarre aussi, je suis certain que les Américains vont me regarder du coin de l’œil en se disant que je n’ai pas l’air tout à fait Tchèque.

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Le duo Schilb – Vesely avait hissé la sélection tchèque à la 7e place lors de l’EuroBasket 2015
(photo : Sébastien Grasset)

Vous allez chanter les deux hymnes avant le match ?

Si je suis sûr de ne pas prendre une faute technique ! Je suis né aux États-Unis mais naturalisé Tchèque. C’est le pays de ma femme, ils m’ont tous accueillis à bras ouverts et je les représenterai avec fierté à la Coupe du Monde. Je n’aurais pas pu jouer pour un autre pays que celui de la famille de ma femme. Elle m’a tellement soutenu tout au long de ma carrière que c’est une manière pour moi de lui montrer à quel point je lui suis reconnaissant.

Sportivement, vous avez un coup à jouer lors du Mondial non ? Les autres équipes de votre groupe sont le Japon et la Turquie, une qualification pour le second tour ne semble pas utopique…

Non, ce n’est pas impossible. J’étais blessé mais on a joué la Turquie en amical l’été dernier. On était devant tout le match mais on a fini par perdre suite à un coup de chaud de Cedi Osman. L’équipe voudra se venger. Et on ne veut pas sous-estimer le Japon non plus. Après, peut-être même que Team USA sera en dilettante et que l’on pourra leur voler le premier match (il rit).

Vous y croyez vraiment ?

Au contraire, c’est sûrement là où ils seront le plus prêts à jouer.

Avez-vous déjà pris part à un match où vous savez avant même l’entre-deux que vous n’avez aucune chance de gagner ?

Est-ce qu’une autre équipe, même la France, aura sa chance contre Team USA ? À vrai dire, je ne pense pas trop comme cela. Même si une toute petite partie de moi se dit : « Tu vas jouer contre les États-Unis, essaye de ne pas être ridicule et ne crois pas que tu vas pouvoir marquer 30 points sur Kevin Durant ». Ils sont double champions du monde en titre, ils veulent faire le triplé. Je suis sûr que Gregg Popovich va faire en sorte qu’ils arrivent bien préparés en Chine.

Un confort inconfortable à Châlons-Reims ?
« Je veux quand même être tenu à un certain degré d’exigence »

Vous aurez 36 ans à la fin de votre contrat l’année prochaine avec Châlons-Reims. Le CCRB sera-t-il la dernière étape de votre carrière ?

Si l’on participe aux playoffs la saison prochaine, j’aurai une option qui me permettra de prolonger mon contrat. Mais oui, il est possible que ça le soit. Je me suis déjà dit que si on ne se qualifiait pas aux playoffs l’an prochain, il y aurait de grandes chances pour que je m’arrête là. Cependant, j’espère qu’on pourra avoir un bilan positif la saison prochaine. Je vais m’entraîner extrêmement dur cet été, sachant que cela pourrait être mon dernier tour de piste. Juste avant la saison, je vais jouer quelques matchs d’assez bon niveau (il sourit). J’espère que cela me permettra de progresser encore. J’ai la chance de ne jamais avoir été sérieusement blessé (il tape du poing sur la table en bois), et si je garde la forme, je vais tout donner pour que l’on devienne une équipe qui gagne des matchs.

Arrivé à ce point de votre carrière, peut-être est-il un peu plus confortable de jouer pour une équipe où la pression est moindre ?

Oui mais je veux quand même être tenu à un certain degré d’exigence. Je veux être coaché. Il y a des choses que je peux encore apprendre alors je veux renforcer mon bagage de connaissances. Si je deviens coach ou scout, j’en aurai besoin.

Est-ce le cas à Châlons-Reims ?

(Il hésite) Parfois. Et c’est plus moi qui me challenge que les autres. J’ai quand même appris certaines choses cette saison comme la patience. J’ai quatre enfants maintenant, plus rien ne me dérange pas trop.

Vous ne semblez pas d’un enthousiasme débordant…

Il faut que ce soit authentique. Vous savez, je n’ai pas envie de faire semblant. Tout ce que je fais ou dis représente ce que je ressens véritablement. Si j’ai l’air ennuyé, je pourrais vraiment l’être mais je pense aussi que c’est une façon de contrôler mes émotions, par rapport aux adversaires.

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Peu de sourires cette saison, mais objectif playoffs 2020 pour le duo Schilb – Baron
(photo : David Billy)

Mais êtes-vous heureux à Châlons-Reims ?

(Silence) Je suis heureux. Du moins, je cours derrière ça. J’ai été heureux par séquences. Je ne dirais pas que je suis malheureux. Je ne veux pas paraître évasif mais personne ne peut acquérir le bonheur.

Mais au moins une certaine satisfaction professionnelle…

Oui mais quand on l’obtient, on veut toujours quelque chose en plus. Par exemple, moi, je voulais un contrat 2+1 et je l’ai eu. Maintenant, je veux plus. Peut-être que je vais renégocier sur d’autres aspects. Pas un départ hein ! Il y a quelque chose qui me tient motivé, c’est se qualifier pour les playoffs les deux prochaines saisons. On va se battre pour y être car c’est pour cela que j’ai signé. J’ai connu des situations où les choses se passaient différemment. Lors de plusieurs étapes de ma carrière, j’ai obtenu un certain mode de vie et je veux l’acquérir de nouveau, c’est tout.

Donc on vous reverra malgré tout la saison prochaine avec le CCRB ?

Exactement.

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