[Dossier] Toulouse Basket Club : Récit d’une restructuration totale avec la montée en Pro B dans le viseur
Absent du plus haut-niveau depuis plus de 20 ans, le Toulouse Basket Club s’est retrouvé en postion d’accéder à la Pro B. Pendant de longues semaines, le club de la Ville Rose a fait la course en tête aux côtés de Tours qui l’a finalement doublé lors de la dernière ligne droite. Cette petite déception digérée, le club va devoir travailler d’arrache pied pour grandir dans ses structures avant de revenir jouer la montée à court terme. Entre le potentiel basket de la ville, les subventions municipales, les sponsors et autres, les dirigeants du TBC s’affairent dans la restructuration complète du club. Un premier pas a d’ailleurs été franchi avec la création d’une SAS dont Nicolas Biondo sera le président. Retour avec lui et Vincent Bot (responsable marketing du TBC) sur les possibilités qui s’offrent à eux dans l’optique de monter en Pro B.
Un rectrutement sportif très intelligent et des résultats bien meilleurs qu’espéré.
Sur le plan sportif, Vincent Bot souligne un très bon recrutement de la part de l’entraîneur Stéphane Dao et le fait que sans cela, les résultats n’auraient pas été aussi bons : « Niveau terrain, les résultats sportifs sont dus à un excellent recrutement de Stéphane Dao, qui a pu construire une cohésion de groupe avec les profils qu’il souhaitait. Le club s’est staffé avec ses moyens pour intégrer un Team Manager (Thierry Levade) et un consultant Marketing (moi-même) pour apporter un supplément d’âme au projet durant cette saison. » Il note également que les additions de Mike Joseph et d’Ibrahim Djambo en cours de saison, mais regrette qu’au vue du contexte actuel, il sera difficile de les prolonger.
De son côté Nicolas Biondo ne nourrit aucun regret de ne pas avoir déposer de dossier de montée en début de saison, tant il ne s’attendait pas à tous les rebondissements de cette saison de NM1 : « Je n’ai aucun regret, puisqu’en début de saison, il y avait des playoffs et nous, on a fait une réclamation à partir du moment où la fédération a supprimé les playoffs. C’est important de le dire. S’il y avait eu des playoffs aujourd’hui, je ne voyais ni Tours, ni nous monter. Je me veux fair-play, je pense que le plus gros lésé dans l’histoire, c’est le Caen Basket Calvados. Au niveau purement sportif en tout cas. » Mais il tient tout de même à insister sur le fait qu’à ce niveau là, il n’y a pas que le sportif qui compte : « Je suis en entreprise, les projets c’est au jour le jour, chaque jour suffit sa peine et aujourd’hui, la structuration du club administrativement et organisationnellement est la priorité pour pouvoir être performant. La réalité elle est là, le sportif ne fait pas tout et bien au contraire. Ce n’est pas une gestion à la petite semaine, c’est une entreprise, ça ne se gère pas comme une association. »
Toulouse a vécu une saison 2020/21 exceptionnelle
(photo : TBC)
Un paysage sportif très dense à Toulouse, mais un très gros potentiel de développement
Sur le plan sportif, la concurrence est très dense à Toulouse. Nicolas Biondo ne manque d’ailleurs pas de le souligner : « On a une concurrence qui est très importante sur le secteur. Il y a le Stade Toulousain, qui est une vitrine mondiale de son sport et qui est un gros pourvoyeur de sponsors. En foot, on a une équipe qui a failli remonter en Ligue 1, on a le volley qui est européen, on a le hand qui est européen et on a aussi de la natation, le TMB en LF2… Il nous faut évoluer dans ce contexte là, pour avoir des sponsors supplémentaires, et on se débrouille vraiment très bien, parce que, comme je le disais, 50% de notre budget vient des sponsors, et aussi, vis-à-vis des collectivités, mettre en avant notre sport et reconnaître notre sport. »
Vincent Bot et lui s’accordent sur le fait que le TBC subit une forte concurrence au niveau sportif et surtout sur le fait d’obtenir des subventions auprès de la mairie : « Le Toulouse Basket Club fait face à une ultra-concurrence pour l’obtention des subventions de la ville et par son historique est le dernier servi (création en 2005 sur les cendres des Spacer’s Basket). De plus, le Toulouse Metropole Basket (Ligue 2) joue également son ascension en Ligue 1. Les 165 000 euros de subventions cette saison positionnent le club comme un des plus petits budgets du championnat avec 650 000€. Le club bénéficie d’un apport important de « Cercle des Partenaires » qui inscrit le club dans les standards de la division sur ce type de revenus. »
Au niveau du développement futur, la ville de Toulouse est une force pour le club. En effet, c’est la quatrième plus grande métropole de France et c’est une ville qui aime beaucoup le basket. Avec leur passage au meilleur niveau dans les années 90, le TBC a encore une « fan-base » et peut compter sur le côté cosmopolite de la ville, comme le souligne très bien Nicolas Biondo. Il relève cependant le fait que le club soit bloqué par les strucutres de la ville : « Si je resitue le contexte, Toulouse c’est « le melting-pot » de la France. Aujourd’hui, c’est à peu près, 12 à 15 000 arrivées par an, avec énormément d’étrangers, de tout horizon, Espagne, Moyen-Orient, Afrique, Outre-Mer, pays du Nord etc, et le basket est tout de même le deuxième sport mondial en terme de pratique, donc mécaniquement, on augmente notre nombre de licenciés, mais on est plafonné par nos structures et par nos subventions. Quand je parle de structure, je parle évidemment de gymnase. Cette année j’aurais pu faire 3 équipes U17, j’ai pu en faire que 2. On aurait pu recevoir, 60 U7/U9 de plus. Ce sont des exemples, mais ça illustre le fait qu’on n’a pas la place pour faire jouer tout le monde. »
Vincent Bot, lui, voit de nombreuses possibilités au niveau techologique puisque Toulouse est très développé au niveau digital, de l’aéronautique et de l’aérospatiale. Il souligne aussi le fait que la communauté étudiante est très présente à Toulouse (environ 200 000 étudiants) et que le club doit en faire sa cible principale. De plus, la ville est très bien desservie par les transports (metro, bus, tramway, téléphérique) ce que consititue un bel avantage sur lequel travailler étant donné que le TBC sera contraint de changer de salle nous explique le responsable marketing qui pense à plusieurs solutions : « On va devoir quitter le Palais des Expositions en décembre pour L’Ile Du Ramier, salle de 3 500 places, taille Pro B. Il y a aussi le Palais des Sports mais c’est le hand et le volley qui y sont pour une raison de tracé. L’avantage c’est qu’il est en plein centre ville, mais il y a très peu d’informations sur ce qu’il s’y passe. Donc l’objectif sera déjà de remplir les 3 000 places de l’Ile du Ramier et ensuite à terme jouer au Palais des Sports et que la population sache ce qu’il y a. »
Une croissance du club très rapide et des perspectives de développement sur le long terme
Le Toulouse Basket Club a connu une croissance assez rapide et plutôt exponantielle étant donné qu’il y a seulement 7 ans, le club était encore en Nationale 3 et s’est retrouvé en 2021 à jouer les premiers rôles en Nationale 1. Nicolas Biondo explique cela avec plusieurs raisons : « Avec le très bon travail de Vincent Bot et de Cédric Grenet, qui ont su trouver les solutions pour augmenter le merchandising, refaire une identité visuelle du club, ce qui est vraiment très important, et qui est d’ailleurs beaucoup aimé par notre public. Malgré le fait qu’on n’en reçoive pas, on a quand même des ventes sur les sweat-shirts, maillots, qui se font régulièrement et on imagine qu’avec le retour du public en salle, nos ventes vont complètement exploser l’année prochaine. C’est vraiment un très bon travail qui a été fait en parallèle avec les réseaux sociaux puisqu’en fait, notre trafic sur les réseaux a augmenté de 61% rien que sur cette année. Aujourd’hui, le modèle économique d’un club de basket, c’est 42/45% de partenaires privés, 35% de subventions locales et le reste c’est du merchandising et de la billetterie. Nous, on est plutôt dans un modèle où on est à plus de 50% de partenaires privés et où on est sur des subventions municipales qui sont, par rapport à notre budget, de l’ordre de 25%. »
Les produits dérivés du Toulouse Basket Club font un carton
Vincent Bot va même un peu plus dans les détails concernant le renouvellement de l’identité visuelle du club : » Nous avons créé la marque Toulouse Basket Club : nouveau logo en adéquation avec l’Occitanie côté Catalan. Il paraissait évident de partir sur les couleurs locales alors qu’aucun club de ne le faisait. Les couleurs sont ancrées dans la tête de gens (infrastructures, métro). Nous sommes partis de l’existant, un taureau, c’était d’ailleurs évident de le conserver (région où il y a beaucoup d’arène et Toulouse est au cœur de ces arènes, minotaure géant etc). Beaucoup de choses se réfèrent au taureau dans la ville. Nous avions à coeur de faire rayonner le territoire, nous sommes le seul club professionnel à arborer « TOULOUSE » en gros sur le maillot. Sur tout ça, j’ai travaillé avec Laurent Rullier (illustrateur reconnu) avec qui je collabore depuis une dizaine d’année et 5 clubs différents avec lui, donc la collaboration est de plus en plus facile entre nous. Nous avons aussi développé la billetterie avec des offres grand public adaptées, ainsi que le lancement des produits de la marque cette année, qui ont d’ailleurs très bien fonctionné, que ce soit sur les pulls, les t-shirts, les maillots ou autre. La position sportive du club et le travail d’image réalisé doivent permettre de booster la structuration du club pour atteindre l’objectif d’évoluer en Pro B d’ici 2024. »
Une restructuration totale avec la création d’une SAS pour regarder vers l’avenir.
Vous l’aurez compris, la structuration du club au niveau administratif et organisationnel est primoridale dans la potentielle accession au plus haut niveau. Dans cette optique, le Toulouse Basket Club a donc pris la décision de créer une société par actions simplifiée (SAS) dont Nicolas Biondo est le président. Il nous explique pourquoi avoir fait ce choix et en quoi elle va être très importante dans le projet de montée : « L’idée de la structure de la SAS, c’est déjà une reconnaissance en tant que club professionnel. C’est le premier facteur qui a joué dans le choix de cette structuration et surtout, c’est de structurer le club dans sa partie administrative et son fonctionnement. Aujourd’hui, le club est un club jeune, puisqu’il y a 7 ans, on était encore en Nationale 3, donc c’est une croissance rapide et la priorité aujourd’hui, c’est de structurer le club. Donc la création de la SAS, elle a un rôle de structuration du club. » Il continue en soulignant qu’ils devront essayer d’augmenter les subventions données par les collectivités, mais aussi et surtout, d’augmenter le nombre de partenaires privés : « Les travaux avec la mairie sont les mêmes depuis des années. On a de très bonnes relations avec eux sur ce sujet, on a fait des demandes auprès d’eux avec des scénarios sur de la Pro B et de la Nationale 1, parce que ce sont deux scénarios encore possible parce qu’on n’est pas encore premier du championnat (interview réalisée le 6 mai). Le but c’est d’avoir une augmentation de nos subventions, en N1, pour structurer le club ou en Pro B pour pouvoir monter. (…) On a qu’une seule solution, c’est d’augmenter nos partenariats privés. Aujourd’hui, on compte sur une augmentation des subventions de la mairie, ça c’est une certitude, c’est une demande que l’on fait. Mais, nous, de notre côté, factuellement, on compte sur nous, nos partenaires privés et le merchandising bien entendu, qui est très important, avec un branding, avec des choses vraiment intéressantes qui sont faites par Vincent (Bot), notamment. »
Nicolas Biondo
Il est certain qu’une montée en Pro B pour le TBC apporterait beaucoup, non seulemement au club, mais aussi à la ville, au niveau économique et de la visibilité. Nicolas Biondo explique cela avec plusieurs raisons : « Au niveau économique, c’est qu’on vient sur un système plus viable, puisqu’on va pouvoir vendre plus d’abonnements, vendre plus de produits liés au club, le club va pouvoir investir, pourquoi pas, dans des structures immobilières, il pourra se développer par énormément de canaux, d’entreprises, c’est pour ça qu’on a monté cette SAS aussi. Concernant la visibilité de la ville, c’est que la volonté de la fédération, aujourd’hui, c’est d’avoir les plus grandes métropoles de France, au plus haut niveau. Cela a été dit et redit par la Fédération Française de Basketball, pour avoir un maximum de représentativité du sport au niveau national, et d’avoir une assise financière etc. Nous on veut faire partie de ce groupe des 5, 6, 7 métropoles qui se positionnent sur le basket. Sachant que le basket se positionne, en terme de taux d’investissement/notoriété, un des sports les moins cher en France. Aujourd’hui, un gros club de Pro B, c’est 2,7 millions de budget, un gros club de rugby de Pro D2, c’est entre 5 et 10 millions. » Il ne manque pas de souligner le gros potentiel basket de la ville de Toulouse et explique comment et pourquoi ils comptent le développer : « On a un public très familial, on a beaucoup d’enfants, de jeunes. Quand on fait les matches, on a plus de 50% des personnes dans la salle qui sont mineurs. Ces enfants là seront les adultes de demain, en plus ils suivent de plus en plus la NBA etc. Il faut savoir que quand Rudy Gobert est venu avec l’équipe de France, en plein mois d’août, le Palais des Sports de 5 000 places était plein, un 15 août, sur un match contre la Tunisie en plus. Donc qu’on ne me parle pas de potentiel basket à Toulouse, il y en a clairement un. A la fin du match, Rudy (Gobert) était dans la cour avec les enfants et je crois qu’il a fait 500 photos à ce moment là. Quand on voit le plus gros salaire du sport français qui a une empathie énorme avec son public, c’est qu’on a un produit et nous on veut travailler ce produit là. On veut un produit familial, social, par contre ça passe par de la structuration, on ne peut pas tout mettre sur le sportif aujourd’hui. La fédération nous demande de remplir un cahier des charges bien précis au niveau de notre structuration, donc c’est important pour nous, de nous structurer administrativement et en terme de fonctionnement et c’est pour ça que la SAS voit le jour aujourd’hui.
En somme, avec une très belle saison 2020-2021 qui a mis le TBC en lumière, sur la scène locale et nationale, une forte croissance sur les dernières années, le potentiel économique et basket de la ville de Toulouse, le Toulouse Basket Club a tout pour retrouver sa place en Ligue Nationale de Basket. Il ne reste plus qu’à convaincre les collectivités de les suivre dans leur projet, à la hauteur de leurs ambitions. Mais rien n’est acquis et le chemin est encore très long.
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