ITW Maxime Bézin : « Coacher à Lille, c’était presque une évidence »
Tout juste promu coach du Lille Métropole Basket après 4 années passées en tant qu’assistant de Jean-Marc Dupraz dans le Nord, Maxime Bézin s’est livré sur son attachement aux valeurs du club et sur les objectifs qu’il aimerait accomplir lors des prochaines années. À 36 ans et après 6 ans à la tête du Limoges ABC (2011-2017) en LF2, le jeune technicien s’apprête à vivre sa première expérience en tant qu’entraîneur principal chez les hommes.
Quel bilan tires-tu de ces 4 saisons en tant qu’assistant à Lille ?
Un bilan très positif. Jean-Marc (Dupraz) m’a donné l’occasion de rentrer dans le monde du basket masculin, moi qui venait du basket féminin. De plus, on a vécu de belles années ici, notamment la première au terme de laquelle on accède en demi-finales de playoffs face à Roanne. On a toujours eu la chance d’avoir de bonnes équipes avec, au-delà du basket, des valeurs humaines importantes. Bien sûr qu’on est jugés sur ce qu’il se passe sur le terrain, mais finalement les 40 minutes ne représentent qu’une infime partie de notre travail et j’ai également apprécié tout le reste.
« Coacher à Lille, c’était presque une évidence »
Quel est ton ressenti à la veille de ta première saison en tant que coach principal du LMB ?
J’aborde cette saison assez simplement. Évidemment, ce sera ma première expérience de head coach (coach principal) chez les hommes, mais j’en ai déjà 6 derrière moi chez les filles donc ce n’est pas quelque chose qui est totalement nouveau pour moi, l’environnement est nouveau mais le métier reste le même. À la veille de cette saison, je suis déjà plus riche de mes expériences sur les 4 dernières années et de ce que j’ai pu apprendre au côté de Jean-Marc et en côtoyant les joueurs du LMB. Je suis aussi forcément impatient de retrouver la compétition, après ces 2 saisons qui ont été un peu frustrantes et compliquées. Nous avons la chance d’être tous en bonne santé aujourd’hui mais c’est un métier de passion et quand on ne peut pas pratiquer cette passion dans des conditions optimales, ce n’est pas évident à vivre. Je suis impatient de mettre sur le terrain et sur cet effectif ma personnalité, faire sentir qui je suis en tant qu’entraîneur, mais aussi et surtout en tant qu’homme.
Te tenait-il à cœur de faire ta première expérience en tant que coach chez les hommes à Lille ?
Je ne l’aurais pas forcément fait ailleurs qu’à Lille. Je suis jeune, je n’ai que 36 ans et je n’ai pas connu beaucoup de clubs, je suis longtemps resté dans les clubs par lesquels je suis passé. Coacher à Lille, c’était presque une évidence, parce que je me sens bien ici, mais aussi parce que ça a été une sollicitation des dirigeants qui savent comment je suis au quotidien ainsi qu’une sollicitation des joueurs. C’est un soulagement de savoir que les gens ont confiance en la personne et en le professionnel que je suis, c’est pour cela que Lille m’a paru évident.
Maxime Bézin, au centre, en pleine discussion avec Jean-Marc Dupraz et Tony Dorangeville (photo : Christophe Delrue)
À l’annonce de ton arrivée au poste de coach, le président Djomatin n’a pas caché sa satisfaction. Quelles relations entretiens-tu avec lui et les autres dirigeants?
Ce sont des relations de travail et de confiance. Je pars du principe que les entraîneurs, tout comme les joueurs, sont des personnes de passage dans les clubs, et donc mes 10 années à Limoges chez les femmes et mes 5 années ici à Lille sont déjà des exceptions. Je construis mes relations dans les clubs en désirant que le club soit plus riche au moment où je pars qu’au moment où je suis arrivé, c’est pour cela qu’on a établi une relation de construction, de confiance. On veut faire les choses ensemble, je ne vois pas quel serait mon intérêt de faire les choses de mon côté. L’idée est que la structure se solidifie, qu’elle grandisse ensemble avec les dirigeants. On a fonctionné de cette manière pour le recrutement également, la sélection des joueurs a bien entendu été orientée par mon regard mais construite main dans la main avec le président, les dirigeants et le reste du staff. L’idée est de renforcer une structure qui saura fonctionner si l’un de nous part demain.
Tout comme tes dirigeants, as-tu senti que c’était le bon moment pour toi d’obtenir un rôle de coach principal dans le championnat masculin ?
La vie est faite d’opportunités. Je suis friand de films et j’aime bien le monologue du scribe dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre pour définir ce que je pense (rires). J’en rigole mais finalement c’est un peu ça, notre vie est faite de rencontres et d’opportunités. Parmi les options qui se présentaient à moi, celle-ci était, dans le timing, celle que je considérais la meilleure et la plus en adéquation avec ce que j’avais envie et besoin à ce moment-là. Peut-être qu’un mois plus tôt ou plus tard, ça aurait été différent. Le timing dans lequel ça s’est proposé et la façon dont ça s’est proposé fait que c’était le moment pour moi de répondre favorablement à cette sollicitation.
À Lille, tu seras épaulé par Mohammed Aoun pour la saison à venir. Comment s’est fait le choix de son arrivée en tant qu’assistant ?
Il s’est fait par deux biais. Le premier était de savoir comment je voulais fonctionner au quotidien, en termes de contenu de travail et d’accompagnement de joueur. Je voulais vraiment que l’on puisse proposer un accompagnement individuel approfondi avec les joueurs, une volonté qui est forte de par le campus LMB aussi qui cherche à grandir dans le développement de jeunes joueurs. On a donc essayé de mettre cela en exergue dans le groupe professionnel. Sur la short-list d’entraîneurs assistants qui pouvaient me rejoindre, il m’a semblé que Mohammed répondait le mieux à ce que je cherchais. Des personnes de totale confiance, tels que Bertrand Parvaud qui m’a lancé dans le basket féminin et qui travaillait avec Mohammed à Boulazac, m’en ont dit le plus grand bien et m’ont dit que ça matcherait également sur le plan humain.
Cinq prolongations ont été annoncées au sein de l’équipe, y avait-il une volonté de garder une ossature solide pour favoriser des connexions déjà existantes ?
La prolongation de ces 5 joueurs est liée à plusieurs facteurs. Le premier étant le facteur de performance, puisque c’est là-dessus que l’on sera jugés à la fin de la saison, on a donc essayé de conserver le maximum de joueurs qui ont performé ici durant ces dernières années. On a également voulu conserver quelques connexions qui fonctionnaient bien lors de la deuxième partie de saison 2020-2021, dans l’optique de gagner un peu de temps dans la mise en place de ce que l’on voulait.
« C’est une fierté d’avoir réussi à attirer tous ces jeunes »
Cinq recrues au profil plutôt offensif ont également été annoncées. Ces arrivées composent-elles un changement d’identité d’un club essentiellement caractérisé par sa solidité défensive ?
Je vais faire une réponse de normand, oui et non (rires). Oui parce que les dirigeants ont souhaité qu’il y ait un basket un peu plus plaisant offensivement. En revanche, quand on regarde les dernières saisons ici, on nous a aussi posé cette question avant la reprise, je pense notamment à ma première saison au LMB, quand on a recruté des joueurs comme Florent Tortosa, Alexis Desespringalle, Marcos Suka-Umu. On nous avait posé cette même question, en pointant du doigt le fait que ces joueurs avaient un profil offensif, alors qu’au final on avait terminé avec l’une des meilleures défenses. Je considère que c’est plus une question d’investissement que de qualités intrinsèques. Évidemment, certains joueurs plus athlétiques auront des facultés à se déplacer latéralement et à réagir plus rapidement, ce qui leur sera précieux en défense, mais dans ce qu’on veut mettre en place avec cet effectif et dans l’investissement qu’on leur demandera, on cherchera à conserver cet ADN défensif qui perdure depuis de nombreuses années à Lille et qui devrait nous permettre de performer. On cherchera à mettre plus de vitesse dans le jeu, avec un peu plus de possessions et donc forcément un peu plus de points encaissés par match, mais ce qu’on veut, c’est garder un bon ratio de points encaissés par possession. Ce qui fera que notre performance défensive, on sera toujours aussi bons que les années précédentes.
Comment se passe l’adaptation des nouveaux joueurs au sein du collectif ?
On a commencé l’entraînement un peu plus tôt avec une partie de l’effectif et sans nos joueurs étrangers. En revanche, ce que je peux déjà observer de ce groupe au complet, c’est qu’il manifeste une importante éthique de travail. C’est un groupe très à l’écoute et très appliqué, capable de venir une heure avant pour commencer à s’entraîner et de rester une heure plus tard pour terminer l’entraînement. Au final, on a des plages de travail qui s’élèvent à presque 5 heures d’entraînement sans que ce soit sollicité par les entraîneurs. Ça montre une réelle volonté des joueurs de progresser et de s’inscrire dans le projet de performance qui est le nôtre. Bien sûr, cela n’assure en rien que l’on gagne nos matchs, mais c’est tout de même très plaisant de voir qu’une valeur comme le travail, qui est très importante à mes yeux, est partagée par tout un effectif. De toute manière, on a plus de chance d’aller dans le bon sens en travaillant que sans travailler. Et cela nous amènera à notre objectif. Je suis très satisfait de ce retour à l’entraînement autant sur le plan de l’éthique que sur le plan humain.
Beaucoup de jeunes composent l’effectif du LMB cette saison, pourquoi ce choix ?
La première raison est d’ordre administrative, puisqu’on a su mi-juillet seulement que notre centre de formation était de nouveau labellisé. Sans cette labellisation, nous aurions dû recruter 4 joueurs de moins de 23 ans au sein de l’effectif pour ne pas être sanctionné par la Ligue. La deuxième raison, c’est parce que je veux que les joueurs et les hommes sortent grandis de leur expérience à Lille. Je voulais des gens qui aient envie de travailler, de progresser, pour leur carrière mais aussi pour le projet collectif qui nous intéresse. Notre choix s’est donc porté vers de jeunes joueurs puisque ce sont eux qui ont le plus répondu à ce critère de recrutement. De ce fait, ça aussi porté une deuxième partie de notre recrutement vers des joueurs un peu plus expérimentés pour communiquer avec eux, les encadrer et leur permettre d’évoluer.
Votre programme quotidien comporte notamment du travail individuel. Cet argument ainsi qu’un rôle véritable dans la rotation, c’est ce qui vous a permis de les convaincre de venir ?
Totalement. On a des jeunes joueurs qui ont fait les Équipes de France, tels que Yohan Choupas qui est un des leaders de sa génération pour ne pas dire le leader. Le fait qu’il ait choisi Lille est un signe fort de la reconnaissance du projet que l’on met en place. Idem pour Essomé Miyem qui est un gros prospect de sa génération. C’est une fierté d’avoir réussi à les attirer avec nous. C’est aussi une fierté d’avoir pu conserver Louis Rucklin et Lorenzo Thirouard-Samson, tout comme c’est une fierté de mettre en avant un jeune du pays et même du club en la personne de Louis Lefevre, qui fera partie du groupe des 11 pros cette saison. Je pense sincèrement que le projet qui leur a été présenté a été déterminant dans leur choix de venir à Lille, et j’ose espérer qu’on répondra aux attentes qui sont les leurs pour leur permettre d’exploser dans ce championnat de Pro B qui le permet.
Dans un autre registre, le club perd cette année Nico Taccoen, son capitaine emblématique. Comment gérer l’après-Taccoen en débarquant fraîchement au poste de coach ?
C’est une bonne question (rires). Je ne sais pas si on peut gérer un après-Taccoen. Nico a tellement apporté au club pendant tant d’années. Au même titre que Jean-Victor (Traoré), ce sont deux gardiens du temps, en plus ils sont reconnus pour tout ce qu’ils ont fait pour le club. J’ai le plus profond respect pour ce que Nicolas a apporté en tant que joueur et en tant que membre du club. D’ailleurs il sera toujours avec nous, il aura différentes missions au sein du club, notamment des missions sportives. Il viendra également véhiculer un message au groupe, pour que les joueurs comprennent ce qu’est ce club, ce qu’est cette ville et ce qu’est cette région. Je dis toujours qu’il faut mettre du sens sur ce que l’on fait, les joueurs doivent s’avoir où ils sont et pourquoi ils sont là, ils doivent connaître l’histoire du club et pourquoi on est au Palais Saint-Sauveur aujourd’hui. Je pense que c’est important que, au-delà de moi, ce message soit transmis par des personnes qui ont vécu ça, et c’est d’autant plus facile quand c’est fait par un Nicolas Taccoen avec son aura et la carrière qu’il a eue. Il y aura un après Nico Taccoen mais il sera « Taccoenéen ».
Ton rapport avec les joueurs est-il différent depuis que tu as pris les rennes de l’équipe ?
Non, c’est le même et ça restera le même. Au-delà des joueurs, du coach et de l’assistant, on est des hommes. Je n’ai pas envie de parler de rapports professionnels, j’ai envie de parler de rapports humains. Il nous faut des rapports personnels forts si on a envie d’aller le plus haut possible. Il faut que chacun comprenne pourquoi l’autre est là, que ce soit sur le terrain ou en dehors, quel est son rôle sur le terrain et ce qu’il anime dans le fait d’être là. Et là on ne parle plus de basket, on parle d’expérience de vie, et dans ce sens-là que je sois coach ou assistant, peu importe. Forcément, il y a un rapport un peu différent qui peut s’installer parce que les joueurs qui arrivent me voient en tant que coach et donc il y a une certaine forme de respect qui s’établit avec le coach et qui peut-être un peu moins présente avec l’assistant. Mais en soit les joueurs m’ont toujours respecté en tant qu’assistant, en tant qu’homme et en tant que professionnel, et très naturellement de la même façon en tant que coach aujourd’hui. Je ne vois pas réellement d’évolution dans les rapports humains, je veux continuer à être bienveillant, à leur dire les choses que ça plaise ou non comme je le faisais déjà les années précédentes.
Quelles sont les ambitions du club cette saison, au sein de ce championnat de Pro B toujours plus dense ?
C’est vrai que le championnat est une nouvelle fois très dense. Plus que les années précédentes ? Je ne sais pas, beaucoup diront oui au vu des descentes de Boulazac et Chalon. Maintenant, ceux qui sont montés, à savoir Fos et Paris, étaient déjà deux très belles équipes du championnat. À Lille, on a des objectifs de playoffs comme on l’a fait ces dernières saisons. On se doit de remplir ces objectifs-là parce que c’est ce qui nous fait vibrer au quotidien, tout simplement, et parce que je pense que quand on passe 15 saisons en Pro B et qu’on est l’un des clubs les plus anciens de Pro B, on se doit d’avoir ces objectifs de haut de tableau si on a envie de grandir et pourquoi pas titiller ce qui se passera plus haut. On voit aujourd’hui que le basket bouge un peu vers les métropoles là où il y a quelques années, on était plus sur un sport de villages ou de bourgades. Je pense qu’à Lille, on est servi en termes de métropole, donc on doit avoir des ambitions et des objectifs. A minima, l’objectif sera d’aller jouer les playoffs, après ce sera aussi des objectifs que l’on fixera avec les joueurs qui en auront peut-être d’autres et sur lesquels on se basera pour construire notre début de saison, pour l’instant on n’a pas assez de recul pour les évoquer mais c’est ce sur quoi on va travailler avant de reprendre le chemin des parquets.
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