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ITW Jean-Denys Choulet (partie 2) : « J’aime être un underdog et renverser des gros »

Dans la première partie de notre entrevue – à retrouver en cliquant-ici -, Jean-Denys Choulet, technicien actuellement au chômage, s’est confié sur son objectif de retrouver un club et son rêve de remporter un troisième titre de champion de France. Après avoir évoqué son non-retour à Roanne et sa fin de cycle à Chalon, il s’exprime sur le championnat de France actuel, sa façon d’utiliser les joueurs et sa relation avec les autres entraîneurs.

Pensez-vous qu’il est encore possible d’être champion de France avec un budget de deuxième partie de tableau, comme vous l’avez fait avec Roanne et Chalon ? Par rapport à cette époque, il y a deux poids lourds, l’ASVEL et Monaco.

Vous avez 200% raison. C’est pour ça que je disais que si je veux atteindre mon rêve, ce n’est malheureusement pas avec Roanne ou avec des équipes de bas de classement. C’est aujourd’hui très compliqué de rivaliser avec l’ASVEL et Monaco. Si des clubs comme Strasbourg, Le Mans ou Limoges n’y arrivent pas, c’est sûr que les autres clubs vont avoir beaucoup de difficultés à le faire. Mais il y a encore une part de rêve possible et je pense qu’il y a moyen de faire une année exceptionnelle, en se cassant le tronc niveau recrutement, en allant chercher ce que les autres ne vont pas chercher et en arrivant à les bouger (les joueurs).

Après, on a eu la chance d’être champion à Roanne en 2007 parce que c’était sur un match sec. On n’aurait jamais été champion au meilleur des cinq manches. Par contre en 2017 avec Chalon, c’était exceptionnel. Gagner au match 5, c’était fantastique. On aurait jamais pu faire ça avec Roanne parce qu’on n’avait pas l’équipe pour. Mais à Roanne, avec les trois fous (Dewarick Spencer, Aaron Harper et Marc Salyers), personne ne pouvait nous arrêter quand les trois étaient dans un grand jour. Le petit Marco (Pellin) était là quand il fallait serrer, (Laurent) Cazalon pour mettre des paniers improbables, Pape (Badiane) pour prendre des rebonds… On peut refaire ça ! Après aller au bout en cinq matchs, c’est plus difficile… Mais c’est ça qui est beau (la voix émue) ! C’est ça qui me fait dresser les poils ! Être champion avec le plus gros budget, les plus gros joueurs… ce n’est pas gagné d’avance. Mais c’est quand même un peu plus facile !

« J’ai toujours pensé qu’à Limoges… »

Il faut aussi pouvoir compter sur un vrai public. Vous rêvez d’être dans un bastion comme Limoges…

Limoges, c’est une histoire… On a eu beaucoup de contacts avec Limoges, du temps de Fred Forte. Lorsqu’il a pris (Panayotis) Yannakis, il m’avait appelé, lorsqu’il a pris (Jean-Marc) Dupraz, il m’avait appelé aussi. Il avait un peu peur de ma personnalité. J’ai toujours pensé qu’à Limoges, on aurait vraiment pu faire un truc. Après, ce sont des choix. Quelque fois, le train vous attend 2 minutes. Des fois, même en courant, vous ne l’attrapez pas. Je ne dis pas que ça aurait marché… Mais j’aime ces ambiances-là, j’aime être un underdog et renverser des gros. Oui le public, c’est quelque chose d’important pour moi. Coacher 12 joueurs du même niveau d’EuroLeague, c’est intéressant, mais ce n’est pas vraiment mon ADN quoi.

Vous aimez pouvoir vous appuyer sur trois ou quatre gros talents et compléter l’équipe avec des joueurs de rôle.

Oui, je pense qu’il faut une hiérarchie. Je pense que dans une équipe de basket, les gens doivent savoir pourquoi ils sont là, leur demander de faire ce qu’ils savent faire et ne pas leur demander de faire ce qu’ils ne savent pas faire. Par exemple, quand j’ai pensé que je pouvais faire d’Adam Smith un poste 1, c’était la pire des conneries que j’ai faite dans ma vie. Ça m’a plombé la saison. Par exemple, Justin (Robinson) était le meilleur passeur de Jeep ELITE la saison dernière, ce n’est pas un mauvais joueur. Il sait bien faire des choses et moins bien en faire d’autres. Il faut essayer de lui faire faire des choses qu’il sait faire et tirer la quintessence de ce qu’il sait faire. C’est ça notre boulot à nous les coachs. On ne va pas demander à Bastien Pinault de péter des dunks toutes les cinq minutes… Par contre Bastien Pinault, c’est un des meilleurs bras que j’ai vu en Europe. A Chalon, on avait deux systèmes pour lui et c’était filoche à chaque fois. C’est ça qui me plait, c’est qu’un petit gars comme Bastien Pinault, il joue face à n’importe qui, bien mis en place, il met dedans. C’est ça qui est intéressant !

Tout le monde réclamait une locomotive dans le basket français. L’ASVEL et Monaco sont en train de le devenir. Est-ce que cela retire une dose de charme au championnat de France ?

Je vois le fait d’avoir une ou deux locomotives comme un bonne chose s’il y a des résultats en EuroLeague et en EuroCup. Si les résultats sont les mêmes qu’avant, alors non. Le basket français est un bon basket. Ce qui me dérange le plus, c’est que les coachs français ne sont pas assez mis en avant. On a toujours l’impression que pour qu’il y ait une progression, il faut prendre des coachs étrangers. Il y a de très bons coachs étrangers et de très bons coachs français.

Est-ce que le coaching français ne souffre pas de l’image du basket français à l’étranger ? En cas de bons résultats sur la scène européenne, on pourrait enfin voir des coachs français s’exporter, non ?

Je pense que les coachs français font du bon travail. Il y a des coachs étrangers qui sont moins bons mais à une époque, nous les coachs français n’avions pas la cote… On a fait quelques gamelles au niveau international qui nous ont fait du mal. Cette année, on fait un truc super contre les Ricains (en quart de finale de la Coupe du Monde, NDLR) – même si ce n’est pas la Dream Team de l’époque – et derrière on fait une cagade énorme contre les Argentins. Pour le basket français, si on était passé ça aurait pu être fantastique.

Vous pensez qu’elle est venue d’où cette défaite ? Du relâchement ? De la fatigue ? Un peu des deux ?

Honnêtement, je ne veux pas juger car quand on n’est pas à l’intérieur du groupe on ne peut pas savoir. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé. Si j’ai quelque chose à dire, je peux simplement dire que c’est dommage. La médaille de bronze ne rattrape pas la défaite en demi-finale. Quand on regarde le résultat final, c’est intéressant. Mais ça aurait pu être magnifique… C’est dommage.

La déception affichée par Evan Fournier, qui ne visait que l’or, a du vous plaire cependant.

Oui, c’est pas mal. Après, je pense que la NBA fait du bien et fait du mal. Ce n’est pas simple d’être sélectionneur face à la NBA. Le basket français n’est pas si mal que ça. On souffre d’un manque de budget cruel. Avant on arrivait à faire des coups mais maintenant c’est de plus en plus difficile. La G-League paye plus qu’avant. Ce qui est très important désormais, c’est le relationnel qu’on a avec les agents, le fait de se déplacer, d’aller les voir, de leur montrer de l’intérêt.

Ce qui peut plaider en faveur d’un coach, c’est ce que deviennent les joueurs que vous avez coaché. J’ai cette chance que bien souvent les joueurs que j’ai coaché ont eu une carrière derrière inespérée et financièrement très intéressante. Les agents sont toujours enclin à les mettre où ils vont gagner un peu plus d’argent.

« Il y a toujours des choses à tirer d’un joueur et des faiblesses à masquer »

Oui, certains font une énorme carrière, comme Devin Booker…

(Il coupe) Devin Booker, il avait été viré de Nancy parce qu’apparemment il n’était pas au niveau. Brandon Davies qui était aussi à Chalon, on me disait « lui on ne peut pas le prendre », derrière il fait une carrière fantastique. C’est toujours pareil, il faut laisser les joueurs s’exprimer et ils le rendent. En début de saison 2016/17, on m’a dit « Cameron Clark ne peut pas jouer intérieur en Pro A ». Il a fini meilleur marqueur du championnat. Pour John Roberson : « le championnat suédois c’est faible, il s’est fait couper en Slovénie ». On est champion avec lui.

Cameron Clark a été coupé dans son élan par une grosse blessure mais John Roberson ou même Moustapha Fall n’ont pas forcément la trajectoire de carrière que l’on imaginait après le titre de 2017. Ça vient d’où, le fait qu’ils aient un peu de mal à confirmer à meilleur niveau que le championnat de France ?

Je ne sais pas. Je pense que Moustapha Fall aurait du être en NBA suite à la saison qu’il a fait avec nous. S’il n’est pas là, on n’est jamais champion. Jamais, jamais ! C’était le joueur à garder. Malheureusement ce n’était pas possible financièrement. Encore que… Point d’interrogation. C’était la personne à garder, comme Cameron Clark. On ne l’a pas fait. Par le passé, il y a des efforts qui ont été faits sur certains joueurs à Chalon. C’est peut-être là que Chalon a raté le coche. On avait une équipe en 2017 dont il fallait conserver deux ou trois joueurs, quitte à prendre un peu moins de joueurs à côté. Cela n’a pas été le choix pris parce que financièrement ça coûtait beaucoup d’argent. C’est comme ça. Moustapha Fall aurait du être soit à l’ASVEL soit en NBA. Au niveau du talent offensif, il est largement aussi fort que (Rudy) Gobert, si ce n’est plus. Je parle de niveau offensif, pas du niveau défensif, et je ne pense pas me tromper là-dessus. Il y a toujours des choses positives à tirer d’un joueur et des faiblesses à masquer. On sait très bien que certains joueurs ont un certain talent d’un côté et moins de l’autre. Il ne faut pas croire que parce qu’on s’appelle Pierre, Paul ou Jacques, on va arriver à changer les gens comme ça et rendre un joueur d’attaque un défenseur numéro un.

« Je ne souhaite absolument pas de mal à Chalon »

A l’image de Justin Robinson qui était rayonnant en début de saison passée et semble en difficulté cette saison.

Il était rayonnant presque toute la saison, il finit meilleur passeur du championnat. Je ne peux pas juger parce que je ne suis pas sur place. Justin, je ne veux surtout pas lui parler parce que je ne veux pas qu’on dise que l’ancien coach parle aux joueurs. Je sais quand les gens sont contents et quand ils sont un peu moins contents. Je sais ce qu’ils aiment faire et je sais ce qu’ils n’aiment pas faire aussi. Chalon est dans une situation extrêmement compliquée. Il y a un peu de désaveux du public, c’est très, très chaud. Même si les gens disent qu’ils ne regardent pas les réseaux sociaux, ils les regardent quand même. Quand vous êtes abonné à la page Facebook de l’Élan Chalon et que vous voyez les commentaires… Quand on est coach, on regarde aussi (rires), que ça soit bien ou pas. Malheureusement les réseaux sociaux ça fait partie de la vie actuelle. Je ne souhaite absolument pas de mal à Chalon. Je vois les commentaires qui disent « Choulet doit rigoler ». Non, ça ne me fait pas rire du tout. Je ne suis pas content des mauvais résultats de Chalon. Chalon est un endroit où j’ai passé de très bonnes années, où il y a un très bon public, où il y a des conditions de travail fantastiques. Je me suis très bien entendu avec tous les gens du bureau. Je m’entends très bien avec Rémy Delpon qui est un gars passionné, plein d’idées… Après il y a des gens avec qui on s’entend moins.

Il y a quelqu’un avec qui vous vous entendez bien, du moins sur qui vous dites toujours du bien, c’est Pascal Donnadieu, l’entraîneur de Nanterre. Il a été nommé assistant de Vincent Collet en équipe de France masculine après les Jeux olympiques de 2016 et il semble être le favori pour succéder à ce dernier après les JO de Tokyo. Vous verriez sa nomination d’un bon œil non ?

Oui je m’entends bien avec Pascal, c’est un bon gars. C’est un mec bien. C’est un gars qui vit le basket comme moi. On a un peu la même philosophie d’attaque. Défensivement, on n’est pas des peintres. On ne gagne pas de titre sans défendre. Il n’y a pas beaucoup de gens que je n’aime pas dans le milieu. Je m’entends bien également avec (Zvezdan) Mitrovic, je trouve qu’il fait du très bon travail. Sasa Obradovic, je ne le connais pas malheureusement. Je connais les anciens, je connais aussi les nouveaux.

Je sais une chose par contre avec l’expérience, ça fait quand même un moment que je suis dans le métier : on ne devient pas coach du jour au lendemain. Ça serait trop facile de penser que l’on va être efficace de suite en prenant une place de coach. Il y a 10/15 ans, on n’était bien moins fort que ce qu’on est maintenant. Ce qui fait la différence pour les coachs, c’est la passion. Si on n’a plus la passion mais qu’on a le savoir, il faut arrêter. Les anciens coachs ont toujours le savoir… Mais est-ce qu’ils ont le même en train à travailler le matin après 25 ans ? S’ils ne l’ont plus, il faut qu’ils arrêtent. J’ai beaucoup de respect pour les jeunes coachs car on a tous débuté un jour. Mais il ne faut pas non plus penser que ça va révolutionner le jeu, parce que ce n’est pas le cas.

« Heureusement qu’il y a le blues et la moto »

Est-ce qu’en cette période d’inactivité professionnelle, vous avez visité ou prévu de visiter des clubs afin de voir travailler vos homologues ?

Non. Déjà, je n’aime pas aller emmerder les gens, je suis assez pudique à ce niveau-là. Le coach qui travaille la semaine n’a pas forcément envie d’avoir un coach dans les tribunes qui regarde ce qu’il fait. Cela ne me dérangeait pas que les gens viennent (assister à mes entraînements). J’aurais arrêté trois/quatre ans, je ne serais pas à la page, je pourrais vous dire oui. Mais j’ai assez de travail en regardant les matchs, en essayant de regarder des systèmes de jeu pour m’occuper. J’ai pensé partir aux États-Unis car j’ai des connaissances là-bas. Mais si tu pars aux États-Unis, que tu es demandé en France et que tu n’es pas là, c’est compliqué.

J’espère qu’on me fera des propositions sportives intéressantes. Je sais très bien que les équipes qui ne sont pas bien classées, ça va commencer à être chaud parce qu’il y a trois descentes. Est-ce que Choulet pourrait lui, avec son esprit commando et sa grande gueule, venir donner un coup de main ? Ça s’est passé comme ça à Chalon. Trois ans après on était champion (sourire). Moi j’ai envie de travailler. C’est tout. Oui on regarde les résultats à droite à gauche. Ce n’est pas une envie de voir les gens se casser la gueule.

Quels seraient les bonnes conditions pour pouvoir accepter un job ?

Il n’y aurait pas grand chose que je refuserais mis  part Roanne qui est pour moi très compliqué. Roanne, c’est mon club de cœur, je suis arrivé en 2000 ici. Comment peut-on envisager que je revienne à Roanne avec une possibilité de descendre ? Je ne pourrais pas, c’est au-delà de mes forces. Faire descendre mon équipe de cœur, je ne pourrais pas. Si jamais je revenais à Roanne, c’est pour faire quelque chose de sérieux. Je ne dis pas que ce qui est fait actuellement n’est pas sérieux… Après, les autres équipes, franchement, peu importe. Evidemment une équipe qui a un peu de moyens, c’est plus intéressant. On peut chercher autre chose que le maintien même si maintenant il y a Monaco et surtout l’ASVEL qui sont des clients extrêmement difficiles à manœuvrer.

Pour finir, avez-vous quelque chose à ajouter ?

Non, non… Si ce n’est que je trouve le temps long. Heureusement qu’il y a le blues et la moto parce que sinon ça serait compliqué. Le moment le plus dur pour moi c’est le samedi à 17 heures. C’était le moment la douche, celui où je mettais le costard et la cravate et que je partais au boulot. On bosse toute la semaine mais le vrai boulot, c’est de gagner des matchs. Tous les samedis il y a un petit pincement qui fait que c’est compliqué. Je fais toujours autre chose dans ces moments-là pour ne pas y penser.

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