LF2 : Le débat autour des joueuses trans dépasse le cadre du basket féminin

Julie Tetard est n°1 à l’évaluation de LF2, avec son équipe de Monaco
En Ligue Féminine 2, le cas de Julie Tétart et d’Aurore Pautou n’est plus seulement un sujet de vestiaires ou de couloirs de salles. La présence et les performances de ces deux joueuses transgenres, premières au classement de l’évaluation moyenne du championnat (35 et 22,4), ont ouvert un débat de société, repris par plusieurs médias nationaux.
🤫 C’est le sujet dont tout le monde parle. Mais personne ne veut en causer, micro ouvert.
💪🏽 Cette saison, les deux meilleures joueuses en #LF2 sont des femmes trans.
🗣️ Cela fait débat et nous avons interrogé de nombreuses personnes sur le sujet… ⤵️ https://t.co/PRDVQgS2Kx
— Kevin Cao (@kevincao87) December 16, 2025
Une domination statistique qui interroge en LF2
Depuis le début de la saison, Julie Tetart (1,90 m, 33 ans), du Monaco Basket Association (5e sur 14, avec 6 victoires et 6 défaites) et Aurore Pautou (1,88 m, 42 ans), de La Tronche-Meylan (2e, avec 9 victoires et 3 défaites), occupent les deux premières places à l’évaluation moyenne en LF2. La première tourne autour de 20 points et 19 rebonds par match, quand la seconde, professionnelle depuis 2021, figure elle aussi parmi les joueuses les plus dominantes du championnat.
Le Populaire du Centre a lancé le débat en recueillant divers témoignages. Plusieurs acteurs du basket féminin reconnaissent, souvent anonymement, un malaise. Une ancienne joueuse de Ligue 2 résume ainsi l’ambiance : « C’est une injustice, elles ne devraient pas jouer dans le championnat, mais si tu écris ça, je risque d’être attaquée pour propos transphobes. »
Certains dirigeants ou entraîneurs acceptent néanmoins de s’exprimer à visage découvert. Fabrice Courcier, entraîneur de Saint-Amand-les-Eaux, constate : « Julie Tétart a une dimension athlétique qui ne se voit pas beaucoup sur les terrains de LF2. C’est quelque chose de nouveau, sur laquelle on doit réfléchir. » D’autres vont plus loin, comme Stéphane Serve, président de Feytiat Basket 87 : « Par rapport à l’équité sportive, je ne vois pas comment quelqu’un né homme peut évoluer dans un championnat professionnel féminin. »
Entre équité sportive et inclusion
À l’inverse, des voix rappellent que les règles actuelles sont claires. Le règlement fédéral se base sur le genre mentionné sur la carte d’identité. Un cadre que la FFBB a de nouveau rappelé, tout en précisant que le sujet était étudié par ses services médicaux, juridiques et éthiques, sans décision attendue en cours de saison.
🗯️ « Je prends la parole car je ne veux plus qu’on embête les autres personnes trans qui souhaitent vivre leur rêve » https://t.co/LcIbWjCwfn
— Kevin Cao (@kevincao87) December 16, 2025
Pour Morgane Villareal, présidente de l’association Limogenre, dédiée à l’inclusion des personnes transgenres, le débat manque de connaissances médicales : « Une femme trans subit un traitement qui l’affaiblit énormément. Sa musculature ne correspond plus au genre assigné à la naissance. » Elle ajoute : « Même entre les femmes cisgenres, les différences physiques sont immenses. »
Sur le terrain, certaines joueuses tentent de recentrer le débat. Stella Mavuanga (1,68 m, 21 ans), meneuse de Saint-Amand, explique : « Pour moi, il n’y a que des joueuses que j’ai envie de battre. Mais ceux qui gèrent les règles doivent juger si l’intégrité physique est respectée. »
Julie Tétart sort du silence
Face aux diverses réactions sur Internet, Julie Tétart a choisi de prendre la parole, d’abord dans Le Populaire du Centre, puis sur RMC Sport. Confrontée à de nombreuses insultes sur les réseaux sociaux, elle assume sa position : « Venez prendre mon sang si vous voulez. J’ai beaucoup moins de testostérone qu’une femme cisgenre. » Elle précise également avoir perdu « 30 à 50 % de [sa] force et de [son] endurance » avec sa transition.
🏀 Meilleure basketteuse de la deuxième division féminine, Julie Tetart (Monaco Basket Association) rêve d'être la 1re joueuse transgenre de l'équipe de Francehttps://t.co/GdVdBW9z01 pic.twitter.com/ZIcWH7B3XH
— RMC Sport (@RMCsport) December 17, 2025
La joueuse monégasque reconnaît néanmoins sa supériorité physique actuelle : « Physiquement, je suis au-dessus. Je travaille énormément, je vais à la salle de muscu en plus, je fais très attention à mon alimentation. » Et insiste sur le caractère collectif du basket : « Je ne suis pas toute seule sur le terrain. »
Sur RMC, elle évoque aussi son rêve, même lointain, de l’équipe de France : « Pourquoi pas aussi ! Même s’il y a des meilleures joueuses qui ont largement leur place. Ne serait-ce qu’être partenaire d’entraînement, j’irais clairement avec grand plaisir. »
Un sujet désormais sociétal
Au fil des semaines, le débat a quitté le seul cadre de la LF2. Il touche désormais à des questions plus larges : d’abord l’inclusion, la lutte contre les discriminations et les discours de haine, qui touchent de plein fouet Julie Tétard, mais aussi celles soulevées par divers acteurs plus haut, l’équité sportive et protection des joueuses. Julie Tétart déplore notamment l’absence de sanctions face à certaines insultes entendues dans les salles : « Quand il y a du racisme, il y a des sanctions et là, il ne se passe rien. »
Pour l’heure, la FFBB reste sur sa ligne réglementaire, tout en poursuivant sa réflexion selon le dossier complet du Populaire du Centre. Une position attentiste, qui laisse coexister des points de vue opposés, que l’on peut comprendre tant ce sujet est complexe. En attendant, le débat continue, souvent à bas bruit dans le monde du basket, mais de plus en plus exposé sur la place publique.


























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