D’un fast-food à l’EuroBasket : Travante Williams, le Portugais de l’Alaska qui a signé au Mans !

Travante Williams, le nouvel ailier du Mans, va jouer le plus grand match de sa carrière à l’EuroBasket ce samedi
Sept minutes chrono. C’est le temps imparti en fin d’entraînement du Portugal pour s’entretenir avec Travante Williams (1,97 m, 32 ans), l’ailier naturalisé, futur joueur du Mans, heureux de se présenter au public français pour le coup.
Cinq minutes, c’est peu aussi pour un tel parcours, des rues de l’Alaska jusqu’à un 1/8e de finale de championnat d’Europe face aux champions du monde, en passant par un magasin de burgers et un premier contrat à 300 euros par mois en Géorgie…

« Le basket, un bon moyen d’échapper à la neige »
« Je suis né et j’ai grandi en Alaska, à Anchorage. Il y a peu d’habitants en Alaska mais quand même une petite culture basket. Des gars comme Mario Chalmers, Trajan Langdon, Brad Oleson sont aussi originaires de l’Alaska. Ils ont été des modèles pour moi. Et le basket, c’était surtout un bon moyen de ne pas être dans la neige… (il sourit) Mes frères adoraient ce sport et mes amis jouaient aussi donc ça s’est fait naturellement.
En Alaska, je ne faisais pas vraiment partie des meilleurs joueurs, au contraire même. J’étais petit et un peu gros. Personne ne s’attardait trop sur mon cas, à tel point que j’ai dû me trouver une école sur Google ! Je me suis retrouvé en Californie pour deux ans, à régulièrement changer d’écoles, à cumuler les petits boulots. J’ai dû travailler dans une chaîne de fast-food, Jack in the Box, et dans une salle de sports, 24 Hour Fitness. Puis j’ai enfin obtenu une bourse universitaire dans le Colorado (mais dans les divisions inférieures, ndlr) avant de retourner en Alaska. À la fin de mon cursus universitaire, je suis resté de longs mois sur la touche avant de signer mon premier contrat pro !
« J’ai dû travailler pour un magasin de vêtements »
Par conséquent, en attendant, j’ai dû travailler pour un magasin de vêtements, Lucky Brand Jeans. J’y suis resté plusieurs mois. Aux États-Unis, tu dois charbonner. Il fallait bien que je me bouge pour pouvoir m’acheter quelque chose à manger. Il y a plein de fois où j’ai pensé que je ne ferais pas carrière dans le basket ! Je me revois dire à mes amis que c’était terminé, que rien ne viendrait pour moi. Tout le monde me demandait : « Alors, quand est-ce que tu pars jouer ?! » et je n’avais pas la réponse… Ça a été une période dure, presque déprimante. J’avais bossé toute ma vie pour devenir basketteur et je n’y arrivais pas. Je me demandais ce que j’allais faire, ce n’était vraiment pas facile à vivre.
Depuis cette époque, j’ai énormément de respect pour les gens qui font des jobs lambdas. Ça remet les choses en perspective, ça me permet d’apprécier beaucoup plus le fait de jouer au basket. Ce n’est pas toujours une vie facile : il faut se lever tôt le matin, aller bosser dur pendant 8h par jour pour assez peu d’argent…
300 euros par mois en D2 géorgienne !
J’avais un pote, Shakir Smith, un ex-coéquipier du Colorado, qui avait obtenu un premier contrat pro à Plovdiv, en Bulgarie. En août, je lui ai dit : « Parle à ton agent de moi ! » Il m’a répondu qu’il allait garder le nom, et plus de nouvelles… Puis en janvier, j’ai reçu un message sur Facebook : « J’ai un contrat de 300 euros par mois, avec deux repas fournis par jour, pour un club de bas de tableau de la deuxième division géorgienne, Tskaltubo.
J’ai presque pleuré en recevant ce message ! J’ai dit oui sans hésiter, je suis parti deux jours plus tard… C’était ma première fois en dehors des États-Unis. Je ne savais pas à quoi m’attendre. J’avais un petit sac, une paire de chaussures de basket, une de chaussures de ville et c’est tout. Je ne connaissais rien de la Géorgie.
Mais j’ai toujours été le type de mec qui va faire en sorte que ça marche, peu importe où je suis. C’est l’histoire de ma vie, j’ai connu des choses bien plus difficiles que ça. Mon père a été en prison pendant quatre ans pendant mon adolescence. Il a fallu se débrouiller sans lui, heureusement que j’ai été bien entouré. J’ai aussi vu de la consommation excessive de drogues, de l’alcoolisme dans ma famille. Donc du basket… Aller jouer en deuxième division géorgienne pour un petit peu d’argent, c’était facile pour moi.
« Super excité de défier Dennis Schröder »
Ensuite, j’ai signé au Portugal et le reste appartient à l’histoire (six saisons passées là-bas entre 2017 et 2023, ndlr), triple champion, ndlr)… J’ai bossé dur là-bas, j’y suis resté quelques saisons et les gens ont respecté mon travail. On m’a donné l’opportunité de vivre quelque chose de spécial et c’est comme ça que je me retrouve en équipe nationale. Je suis super excité d’affronter l’Allemagne ce samedi en 1/8e de finale de l’Euro, de défier Dennis Schröder et tous les autres, de voir ce qu’ils ont réellement dans le ventre. Ça va être un révélateur pour moi, c’est un bon test, un match vraiment particulier pour toute mon équipe.
Après l’Euro, je vais rejoindre Le Mans. Je m’attends à une bonne saison ! Je sais que c’est une bonne équipe, un club historique en France. Je suis heureux de pouvoir être en Betclic ÉLITE, de voir ce que je peux y faire. Pour moi, l’important est toujours de gagner afin de rallier le plus haut niveau. Je joue pour gagner des titres ! »
Propos recueillis à Riga,


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