John Roberson, le Bosnien du Kansas
« Tu nous as pris pour le Real Madrid ou quoi ?! » : comment le HTV a réussi à signer… John Roberson !

Légende de l’Élan Chalon depuis le titre de 2017, John Roberson va jouer un mois en ÉLITE 2 !
Avez-vous suivi l’EuroBasket ? Si vous lisez BeBasket, la réponse est sûrement oui. Alors, vous avez peut-être vu John Roberson passer 18 points à la rugueuse défense grecque, ou virevolter en 1/8e de finale face à la Pologne (19 points à 70%), faisant miroiter à la Bosnie-Herzégovine la perspective de son plus gros résultat historique…

Dès lors, comment imaginer le voir un mois plus tard signer un contrat de pigiste médical de quatre semaines en… ÉLITE 2, avec Hyères-Toulon ?! Car non, ce n’est pas une blague, John Roberson (1,80 m, 36 ans) va bien rejoindre le HTV jusqu’au 8 novembre. « Si j’en suis le premier surpris ? Oui, oui », sourit le manager, William Dumas. « Une telle opportunité, c’est inespéré. »
Blessé lors du 1/8e de finale à l’EuroBasket
Pour que John Roberson devienne Varois, tout a démarré le 7 septembre dernier, au cœur de son festival à Riga face à la Pologne en 1/8e de finale. Alors que la Bosnie-Herzégovine pouvait encore rêver d’un exploit (-4 à la 34e minute), le meneur naturalisé, convoqué cinq jours avant la compétition, s’est blessé tout seul aux ischios-jambiers, mettant brutalement fin à son EuroBasket et le privant des grosses propositions qui n’allaient pas manquer d’affluer après son championnat d’Europe réussi, ayant entraîné les remerciements publics de la star Jusuf Nurkic (voir ci-dessous). « Sans cela, c’est sûr et certain qu’on ne l’aurait jamais eu », acquiesce Dumas.
Nurkić:
„I want to say something. We’re proud of this guy who came five days before the tournament; without him, we really couldn’t have done it.
Thank you John for being with us.“
Roberson almost shed a tear after hearing this, but Nurk is right. Thank you legendo 🫡 pic.twitter.com/88z4Uzc88Z
— BiH Basketball (@BiHBasketball) September 7, 2025
Très loin de l’effervescence lettone, lors du même week-end, le HTV préparait sa saison à Tarare, dans le Rhône, avec une jolie victoire en amical contre Roanne (79-74), marquée par les 16 points d’Ikenna Ndugba. Sauf que l’infirmerie toulonnaise n’a pas tardé à se remplir, avec la déchirure aux adducteurs de l’Américano-Bosnien et l’entorse de son compère Mathis Keita à la mène, forçant le club à se mettre sur le marché des transferts.
« C’est déjà difficile de trouver un meneur pendant l’intersaison alors pour seulement un mois, à cette période de la saison, je vous laisse imaginer », glisse William Dumas. « Depuis l’IRM d’Ikenna, on a une semaine pour se pencher sur le marché et les profils que l’on nous proposait, c’était compliqué… »
« Je pensais que c’était une blague… »
Un meneur retient tout de même l’attention du coach Stéphane Dumas qui appelle son homologue de Minorque, une vieille connaissance, pour des renseignements. Mais dans leur conversation, c’est un autre nom qui ressort : celui de John Roberson. « Quand Steph m’en parle, je rigole », raconte William Dumas. « Je pensais au début que c’était une blague. Je lui dis : « Tu nous as pris pour le Real Madrid ou quoi ?! »
Mais qui ne tente rien n’a rien… Un petit tour sur Instagram convainc le manager toulonnais de tenter le coup, au cas où. Sur ses réseaux sociaux, John Roberson s’affiche en pleine rééducation, à Paris. « Je vois qu’il a repris le terrain, qu’il a travaillé dans un centre très professionnel, qu’il est sur le territoire, que sa femme est Française. Ce serait bête de ne pas le tenter. »
Mardi, 14h30, première prise de contact entre Stéphane Dumas et le représentant du joueur. Contre toute-attente, celui-ci ne raccroche pas au nez du club. « Parfois, au bout de 10 secondes, on nous répond : « Pas intéressé. » Là, quand on a vu qu’il nous écoutait… »
Il a donné son accord en quelques heures
Demeure un écueil, et de taille : les finances du HTV, toujours étriquées, avec 800 000 euros de masse salariale, la 15e d’ÉLITE 2. Autant dire que Roberson, qui était le deuxième meilleur salaire de Pro A en 2017/18, n’a sûrement pas connu cela depuis son année rookie, partagée entre la Slovénie, l’Équateur et la Suisse (2011/12). « J’ai dit que je ne voulais pas lui manquer de respect mais qu’on ne pouvait pas s’aligner sur ce que gagne John. J’ai été franc et honnête sur ce que j’avais, c’est-à-dire pas beaucoup. Surtout pour un mec référencé, qui sortait d’un gros championnat d’Europe. »
La réflexion avance toutefois très vite dans le camp Roberson et l’ancien chalonnais donne son consentement quelques heures plus tard à Hyères-Toulon. Une première prise de contact en début d’après-midi, l’accord verbal le soir avant le match de Coupe de France contre LyonSO, un dossier éclair ! « John est une personne intelligente », souffle William Dumas. « Il a sûrement vu une opportunité de se remettre en selle. Il vient pour se remettre en route pendant un mois avant de reprendre son chemin après. »
Arrivé à 14h10 cet après-midi en gare de Toulon, John Roberson sera présent ce vendredi soir au match contre l’ADA Blois en civil. Il pourra alors découvrir un championnat à des années-lumières des hauteurs qu’il a eu l’habitude de tutoyer au cours de sa carrière, jusqu’au mois dernier avec une phase finale de championnat d’Europe.
Son quatrième club en France
Passé par de multiples pays lors de ses 14 saisons professionnelles (Slovénie, Équateur, Suède, Hongrie, Russie, Australie, Turquie, Espagne, Égypte), John Roberson n’a toutefois jamais laissé ailleurs un tel impact qu’en France, excepté sûrement en Suède (MVP et triple champion).
Sorti de l’anonymat de la Basketligan par Jean-Denys Choulet en 2015, l’ancien étudiant de Texas Tech est devenu une légende de l’Élan Chalon. Meneur shooteur, capable d’énormes cartons à longue distance (10/12 contre Nancy en 2015/16, 11/16 avec l’ASVEL contre Gran Canaria en 2016/17), il a tenu une importance fondamentale dans le titre de champion de France de Chalon en 2017 (16,3 points à 48% et 6,6 passes décisives).

Triple All-Star de Pro A, MVP de l’édition 2016 à Bercy, il avait ensuite connu un tournant manqué dans sa carrière en rejoignant Villeurbanne. Le choix de l’ASVEL n’était pas en cause, lui permettant de se hisser en EuroCup après cinq campagnes de FIBA Europe Cup, plutôt le niveau décevant affiché à l’Astroballe (12,1 points à 45% et 4,5 passes décisives), sans parler d’une mise à pied en raison d’une sortie nocturne peu appréciée par les dirigeants.

Au lieu de pouvoir rêver de l’EuroLeague, que l’ASVEL allait prochainement intégrer, John Roberson avait vu son contrat de deux ans être rompu et avait été contraint de s’exiler au fin fond de la Sibérie. Passé par la SIG Strasbourg en 2021/22, où il a laissé une belle image (16,1 points à 44% et 4,5 passes décisives), l’international bosnien sort de deux saisons très erratiques. Seulement 14 matchs disputés en Turquie depuis octobre 2023 (18,6 points à 47% et 5,4 passes décisives en 5 rencontres de D2 l’an dernier avec Erokspor).

« À ce moment-là du marché, pour seulement un mois, la prise de risque au niveau physique est minime pour nous », tempère William Dumas. « Il a toujours son bras, ses stats à 3-points ne baissent pas (49% en Turquie la saison dernière, 40% à l’EuroBasket, ndlr). Il m’a aussi assuré qu’il était plus en forme que lors du championnat d’Europe ! » Si c’est vrai, les défenses de ses cinq adversaires en ÉLITE 2 (Pau, ASA, Nantes, Aix-Maurienne, Vichy) peuvent trembler…









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