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Yannis Mendy, de la NM1 à Marc Gasol : au nom de sa grand-mère

« Marc Gasol en deuxième division espagnole, c’est le truc complètement irréaliste », lâche Yannis Mendy. « Un peu comme si Nicolas Batum revenait jouer en Pro B. » Ou comme si Boris Diaw, président-joueur de Bordeaux, venait donner un coup de main aux JSA lors du lock-out NBA… À bientôt 37 ans, à la suite d’une dernière saison discrète avec les Los Angeles Lakers, Marc Gasol a décidé de tirer un trait sur le championnat américain où il s’est bâti un palmarès de légende : champion en 2019 avec les Raptors, triple All-Star, défenseur de l’année en 2013 et meilleur pivot en 2015. Mais le Barcelonais n’en a pas encore totalement terminé avec le basket : depuis la fin du mois de novembre, il défend en LEB Oro les couleurs du club qu’il a fondé, le Basquet Girona.

Évidemment ultra-dominant dans l’antichambre du basket espagnol (17,3 points à 55%, 13 rebonds et 2,7 passes décisives pour 26,3 d’évaluation en trois rencontres), Marc Gasol a croisé le chemin d’un joueur français au cours de sa dernière sortie : Yannis Mendy (1,98 m, 25 ans, n°55 de dos sur la photo de une). Mais la rencontre n’a bien failli jamais se faire, le Lorrain ayant été frappé par un drame familial quelques heures avant l’entre-deux. « Juste après la sieste, j’ai appris que ma grand-mère était décédé », nous confie-t-il. « Je ne pensais plus du tout au match, à plus rien. Je n’avais plus envie de jouer, j’étais juste au téléphone avec ma famille pendant tout l’avant-match. Finalement, même si je ne m’en sentais vraiment pas capable, j’ai pris la décision de jouer. C’est ce qu’elle aurait voulu. »

« Gasol m’a dit qu’il était honoré que j’ai pris cette décision pour lui »

Logiquement perturbé, l’ancien ailier-fort de Pau-Lacq-Orthez et du Havre n’a pas fourni une grande opposition au double champion du monde : une ligne de statistique vierge en 8 minutes, contre 21 points à 7/12, 10 rebonds et 3 passes décisives pour le géant catalan, vainqueur 98-77 ce soir-là. « J’ai été inexistant sur le match », admet-il sans détour. « J’étais ailleurs, complètement. Mais je voulais au moins mettre la tenue et rentrer en jeu, participer, même si c’était difficile. » Tout juste s’il se souvient d’une situation où il s’est retrouvé directement face à Gasol après un switch. « On va dire que j’ai essayé de le gêner », rigole-t-il.

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Pour sa seconde expérience professionnelle, Yannis Mendy a disputé 12 matchs avec Palma
(photo : Palmer Alma Mediterránea Palma)

Même loin dans ses pensées familiales, Yannis Mendy a tout de même pu observer de près le talent de l’homme aux 990 matchs NBA. « C’était impressionnant de le voir. Même à son âge, il est encore au-dessus, clairement. Il est grand, il est puissant. Il ne fait rien d’incroyable mais tout ce qu’il fait, c’est propre, ça rentre dedans (il souffle d’admiration). » Également agréablement surpris par la disponibilité de l’ancien Grizzly avec les supporters après le match, le Mosellan a surtout pu partager un moment privilégié avec la star géronaise dans la foulée du buzzer final. ¯« On a échangé quelques mots, ça m’a fait plaisir. Je lui ai dit que je n’avais pas prévu de disputer ce match et qu’il était la raison pour laquelle j’avais joué. Je lui ai expliqué que ma grand-mère était partie dans la journée et que l’affronter est quelque chose que j’aurais voulu lui raconter. Il m’a présenté ses condoléances, il m’a complimenté d’avoir joué quand même et m’a dit qu’il était honoré que j’ai pris cette décision pour lui. J’ai apprécié ses paroles. »

Marie Mendy, « [sa] motivation »

Un bel hommage pour une dame, qui aurait soufflé sa 80e bougie au mois de février, qui a évidemment compté dans la jeunesse de Yannis Mendy. « C’était ma grand-mère paternelle », dit-il. « Elle me parlait beaucoup de mon côté africain. Quand j’étais loin de chez moi, elle était ma motivation, notamment lors de mes premières années aux États-Unis où c’était compliqué. Quand je n’avais pas trop envie de m’entraîner ou de faire quelque chose, je pensais à elle et j’arrivais tout de suite à changer mon mood. Elle était toujours fière de moi, comme de tous ses petits-enfants évidemment. »

De là-haut, Marie Mendy sera sûrement fière d’observer la suite de la carrière de son petit-fils. Sauf qu’il ne sait pas encore où elle s’écrira. Le match à Gérone, le 17 décembre, marquait la fin de son contrat de trois mois à Palma. Le deuxième engagement de son parcours professionnel, démarré la saison dernière à Avignon (NM1) dans un contexte bancal, plombé par de graves problèmes de gouvernance et des résultats sportifs qui se seraient soldées par une relégation sans une décision fédérale. « La saison a été catastrophique car on a été sauvé par le Covid mais je retiens le positif. Comme le fait d’avoir joué avec mon meilleur ami, Maxime Djo Ebala, comme la bonne relation établie avec Vincent Lavandier qui m’a fait confiance, comme le fait qu’on n’a jamais lâché alors qu’on aurait vraiment pu le faire au vu de tout ce que l’on a traversé. »

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Mendy au Cosec Moretti, l’antre de l’USAP, avant la réception du Pôle France le 23 janvier 2021
(photo : Sébastien Grasset)

Peu connu en France du fait de son exil aux États-Unis, raconté ici, l’enfant de Metting n’a ensuite pas été convaincu par les quelques offres tricolores parvenues au cours de l’été. De quoi le pousser à reprendre son bâton de pélerin, direction l’île de Majorque. « Je ne savais pas du tout où j’allais atterrir », consent-il. Et de fait, après la galère vauclusienne, Mendy met cette fois les pieds dans l’un des clubs les plus atypiques du basket espagnol : une sorte de pépinière similaire à Mega avec l’agence Xspheres Basketball Management tirant les ficelles, chaperonné par Pepe Laso (83 ans, le père de Pablo, l’entraîneur du Real Madrid), le véritable « big boss » selon Mendy, mais avec deux coachs prête-noms les soirs de match, Alex Perez et Pau Tomas, l’un à tour de rôle… « La situation était un peu spéciale », ne cache pas l’ex-Avignonnais. Euphémisme…

Homme de confiance de Pepe Laso

Du haut de ses 25 ans, il se retrouve dans le costume du vétéran du CB Bahia San Agustin, alors même qu’il n’entamait que sa deuxième saison professionnelle… « Je me vois plutôt encore comme un jeune, je ne m’attendais vraiment pas du tout à être le plus vieux en deuxième division espagnole. » Un statut qui lui confère vite un rôle de leader, avec neuf premières sorties toutes au-dessus de 25 minutes de jeu. « Pepe a su me comprendre et a vu ma manière de jouer. Il m’a fait confiance. Il savait que je n’allais pas marquer 20 points par match et prendre 15 rebonds. Il utilisait beaucoup ma lecture de jeu. Il voulait que le meneur et moi ayons beaucoup la balle dans les mains. Au début, j’étais vraiment à l’aise. » Mais, aussi talentueuse qu’inexpérimentée, l’équipe insulaire enchaîne les défaites, elle qui pointe actuellement à la dernière place de LEB Oro avec une seule victoire en quatorze rencontres. « Au début, il parait que les gens riaient en voyant notre effectif mais on a tenu toutes les grosses équipes à moins de cinq points. Sauf qu’on n’a jamais réussi à passer ce dernier cap… Ces quelques points, c’est l’expérience qui nous manquait. » Avec son contrat court, l’intérieur français sert logiquement de fusible pour que Palma tente de changer les choses en 2022 : suite à la décision de ne pas le prolonger, il ne foule pratiquement plus le parquet en décembre (17, 7 et 8 minutes). Il a depuis été remplacé par un autre joueur bien plus expérimenté, Pavel Marinov (33 ans), un ancien de Caen, brillant en Pro B en 2017 avec Lille (17,3 points, 4 rebonds et 4,3 passes décisives). Après sa pige à Champagne Basket, Elijah Brown a également mis le cap vers l’Espagne.

De son côté, Yannis Mendy est lui rentré en France. S’il a refusé un autre projet en LEB Oro, dans la foulée de ce fameux match à Gérone, pour rester auprès de sa famille, il est désormais à la recherche d’une autre équipe. « Que ce soit en France ou à l’étranger, j’aimerais bien trouver un club avec un projet intéressant, qui me correspond. Tant que je peux jouer et apporter mon jeu, ce que je sais faire à une équipe, je serais heureux. » Avec un vrai handicap pour son agent dans sa quête d’un nouvel employeur : son refus, tel un Boris Diaw, de s’arrêter à ses statistiques, pas forcément très vendeuses, il est vrai (6,5 points à 44%, 4,6 rebonds et 1,9 passe décisive en NM1 ; 5,6 points à 42%, 4,5 rebonds et 1,2 passe décisive en LEB Oro). « Courir derrière des stats, me fixer un objectif de points pendant un match, ce n’est pas moi. Je n’ai jamais réussi à penser comme ça. Je joue comme j’ai appris à le faire : m’adapter à ce dont l’équipe a besoin, mettre dedans quand il faut mettre dedans et lire le jeu. » Dans cette valorisation du QI basket, le jeu espagnol pourrait ainsi parfaitement lui convenir, avec une équipe plus traditionnelle que la jeune escouade de Palma. « Je pense avoir été correct là-bas. Le niveau en LEB Oro m’a vraiment surpris, je ne pensais pas que ce serait aussi physique. Même si on n’a pas eu les résultats attendus, c’était vraiment une bonne expérience, j’en retire du positif. Affronter autant de grands joueurs, c’était clairement enrichissant. » En effet, l’an dernier, au moment de disputer son dernier match avec l’USAP contre Pont-de-Chéruy, comment aurait-il pu penser qu’il croiserait quelques mois plus tard la route de Marc Gasol ?

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