« C’est maintenant ou jamais » : Mam’ Jaiteh face à la plus grande opportunité de sa vie chez les Bleus

Mam’ Jaiteh et les Bleus ont rendez-vous avec l’Espagne ce jeudi soir à 21h
En débarquant à l’INSEP il y a trois semaines, Mouhammadou Jaiteh a interrogé certains de ses coéquipiers. « Et toi, tu es né quand ? » 2002 pour beaucoup, parfois 2004, et même 2005 pour Zaccharie Risacher et Alexandre Sarr… « D’entendre autant de dates de naissance au-dessus de 2000, ça m’a rendu dingue », rigole le futur pivot du Dubaï BC, du haut de ses 30 ans. « Avec Vincent (Poirier), on s’est vite rendu compte qu’on était les plus vieux du groupe. »
Une seule compétition avec les Bleus
Pourtant, il y a quelques temps, c’était lui qui était dans le rôle inverse, à rendre fou les anciens avec un âge dérisoire. On revoit encore le sourire béat, quasi enfantin, de Mam Jaiteh pendant les hymnes de l’EuroBasket 2015 à Lille. Sa seule compétition internationale avec les Bleus, où il avait remplacé au pied levé Alexis Ajinça, à neuf jours du début des hostilités.
Troisième pivot de l’équipe de France, il n’avait pas joué, ou si peu (trois apparitions à six minutes de moyenne). « J’y suis allé pour prendre tout ce qu’il y avait à prendre, comprendre, observer, continuer à faire mon chemin », nous disait-il en 2022. « J’ai vécu cet EuroBasket à fond. Ça reste une expérience inoubliable. Je ne jouais quasiment pas, quelque part je ne ressentais pas la pression. Je savourais ces moments-là et mon but était de me rendre utile. Ce que je pouvais apporter au groupe avant tout, c’était ma joie et ma bonne humeur. Il fallait que j’essaye de leur montrer du positif. »

Il en était reparti avec une médaille de bronze, un peu amère sur les bords. Mais la première d’une longue série, pensait-on. Raté… En un été, quand il avait 20 ans, Mam Jaiteh a connu autant de sélections (18) que pendant les dix années suivantes de sa carrière (18). Et plus aucune compétition internationale. Pour une multitude de raisons entre une carrière qui a un temps battu de l’aile, une concurrence XXL dans la raquette et des pépins physiques qui l’ont privé de plusieurs opportunités (TQO 2016, fenêtre de novembre 2020, fenêtre de février 2025)… « J’ai fait face à des hauts et des bas en équipe de France », synthétise-t-il.
Le sentiment d’être légitime
Cantonné aux matchs de qualification, simplement appelé pour la préparation de l’EuroBasket 2022 en roue de secours suite à l’incertitude concernant Moustapha Fall, le Francilien a pourtant l’opportunité de révolutionner son histoire bleue cette année. Entre la dimension qu’il a prise ces derniers mois à Monaco, avec un printemps exemplaire (décisif en demi-finale de l’EuroLeague contre l’Olympiakos), et la cascade de forfaits à son poste (Victor Wembanyama, Rudy Gobert, Mathias Lessort), l’ancien MVP de l’EuroCup débarque en équipe de France avec un sentiment nouveau : celui d’être à sa juste place.
« C’est un peu un accomplissement pour moi d’être ici et de me sentir légitime. Ça me permet de franchir un palier. J’arrive dans un autre rôle, un autre registre et je suis totalement à l’aise. Je peux mixer entre mon extrême motivation et un certain vécu accumulé depuis des années. »
Une forme d’expérience qui lui confère aussi une vraie lucidité. Désormais dans la trentaine, à deux ans de la prochaine compétition internationale qui servira de rampe de lancement aux JO 2028, Mouhammadou Jaiteh est pleinement conscient qu’il se trouve face à la plus grande opportunité de sa carrière internationale. Considéré par Frédéric Fauthoux comme l’un des quatre leaders, « avec un cursus EuroLeague qui ferait envie à beaucoup de nations », l’ex-intérieur de la Virtus Bologne devrait tenir un rôle majeur lors du prochain championnat d’Europe, pour lequel il a déjà gagné sa place suite aux évictions de Yoan Makoundou et Moussa Diabaté, qui ont définitivement scellé la raquette française (Yabusele – Hoard – Poirier – Sarr – Jaiteh).
« Il n’y aura pas de campagne plus ouverte pour moi ! »
« Le niveau du secteur intérieur en équipe de France a tellement évolué au cours des dernières années qu’il n’y aura pas une campagne plus ouverte pour moi dans mes années restantes », était-il déjà conscient le 29 juillet. « Il faut aller chercher ma place, je ne pense pas que j’aurai de nouveau une occasion aussi grosse. Il faut la prendre. S’il y a quelque chose à saisir, c’est maintenant ou jamais ! »
Arrivé au début de la préparation après un mois de « décompression totale » à l’issue d’une saison éreintante avec l’AS Monaco, Mam’ Jaiteh a utilisé les premiers jours de la campagne pour recouvrer la forme. « J’ai été transparent avec le staff », souffle-t-il. « J’ai fini la saison en roue libre et ça a été rendu plus difficile encore psychologiquement par l’absence de trophée. Donc j’ai clairement coupé, je n’ai rien fait du tout en juillet. »
Ce qui ne l’a pas empêché d’être au four et au moulin lors de son match de reprise vendredi dernier contre la Grande-Bretagne (12 points à 5/9, 5 rebonds et 1 passe décisive en 15 minutes), malgré quelques petites carences dans son jeu (plusieurs tirs sous le cercle manqués et 2/6 aux lancers-francs). Ce jeudi, contre l’Espagne qui avait brisé ses rêves d’adolescent en 2015, il aura l’occasion de monter en puissance. Car la chance d’une vie, ça se mérite…


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