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Les coulisses du sauvetage du HTV racontées par Vincent Masingue

Un temps rétrogradé en ligue régionale, Hyères-Toulon a finalement obtenu en appel le droit d'évoluer en Nationale 1 à la rentrée. Un redressement impulsé par un homme, Vincent Masingue, qui n'a pas fui ses responsabilités au moment où le navire varois sombrait, criblé par les dettes. L'ancien intérieur du HTV est revenu en notre compagnie sur le sauvetage du club hyérois.
Les coulisses du sauvetage du HTV racontées par Vincent Masingue
Crédit photo : 8eme Art Studio

Du rêve au cauchemar. Quatre ans après la vente des droits sportifs au Paris Basketball, qui continue de défrayer la chronique dans le Var, le HTV croyait avoir fait un grand pas de plus sur le chemin de la rédemption en accédant à la Nationale 1. Mais en quelques jours, tout a failli s’écrouler. Jusqu’à l’appel du 17 juin, pour changer : nouvellement nommé président, Vincent Masingue annonçait que le club avait quinze jours pour trouver 250 000 euros, ou mourir. La FFBB avait alors refusé l’engagement de Hyères-Toulon en NM1, renvoyant l’entité varoise en ligue régionale.

Pratiquement un mois plus tard, l’atmosphère est beaucoup plus légère sur les bords de la Méditerranée. En réalité, la situation financière était même encore plus compliquée que prévu avec 400 000 euros à éponger mais les quelques amoureux du HTV à la barre ont réussi à assainir la situation financière pour éviter le pire. Ainsi, la Commission de Contrôle de Gestion de la FFBB a autorisé lundi Hyères-Toulon à s’engager en Nationale 1. 24 heures après la bonne nouvelle, le président Masingue est revenu sur ces semaines éprouvantes.

Vincent Masingue au premier rang d’un match de 1/8e de finale de la Coupe PACA entre le HTV et Sorgues en octobre 2021 (photo : 8ème Art Studio)

Vincent, comment avez-vous accueilli la décision de la CCG ?

C’était un énorme soulagement car on était dans un état de tension permanente depuis le changement de présidence. On a eu un énorme défi à relever. Il y a eu plein de rebondissements : on pensait qu’on y était, on n’y était plus, il y a eu des trucs que l’on a découvert, de nouvelles choses à rembourser, etc… La liste des cadavres s’est multipliée. Ça s’est pratiquement joué au buzzer (il rit). On a tout bouclé à la dernière minute de la dernière journée. On avait trouvé les fonds pour pouvoir repartir avec une situation nette positive. Il fallait justifier cela après auprès de la chambre d’appel car il faut tout un tas de documents, de preuves de financement, de chèques encaissés, de conventions de mécénat. On a apporté tout ce qu’il fallait et on a eu le résultat lundi. Donc oui, on est soulagé d’avoir sauvé le club de la banqueroute.

Revenons en arrière : il y a un mois, le HTV est logiquement sacré champion de France Nationale 2. On croit que tout va bien puis les mauvaises nouvelles s’enchaînent. Comment s’est organisé votre arrivée à la présidence du club ?

Ce n’était pas prévu comme ça (il rit). En fait, le président sortant, Monsieur (Gilles) Garcia, a décidé de ne plus être président du club, sans prévenir personne, juste après le titre. À la dernière Assemblée Générale le 8 juin, il a convoqué tout le monde et ne s’est pas représenté. Il a laissé le club avec un déficit estimé à 250 000 euros. En réalité, c’était beaucoup plus que ça. On s’est tous regardé, on était tous très surpris. Surtout qu’il n’a même pas fait d’annonce, il ne s’est juste pas représenté au bureau. Personne n’a trop compris, il a fait ça d’une manière un peu étrange, pour ne pas dire bizarre. Personnellement, j’étais membre du comité de direction depuis 2018, au moment où William Dumas a repris le club suite à la rétrogradation en Nationale 3. Je m’y suis vite rendu compte que si je n’y allais pas moi, personne ne reprendrait le flambeau. Donc j’y suis allé. Accompagné de William et Aurélie Dumas, on a essayé de remuer le cocotier et de faire tomber les quelques bonnes noix qui restaient encore accrochés.

Si le déficit n’était pas de 250 000 euros, à combien s’élevait-il alors ?

C’était plus de l’ordre de 400 000 euros.

« Un énorme soulagement »

Au premier abord, Gilles Garcia semblait être un président sérieux, désireux de faire table rase du passé et d’impulser une nouvelle ère au HTV. Avec sa casquette de chef d’entreprise, comment a-t-il pu laisser un tel déficit ?

Quand il est arrivé l’année dernière à la tête du HTV, il a mis de l’argent pour que le club puisse repartir. Sans son intervention, cela n’aurait pas été possible. Ça, c’est sûr. Maintenant, il est arrivé en disant qu’il allait mettre 400 000 euros en deux ans, essayer de monter le club en Pro B, il a annoncé des budgets de sponsoring et de mécénat qu’il n’a jamais atteint. Il a dit qu’il allait mettre tant et il manquait tant à la fin. En plus, il réclame aujourd’hui l’argent qu’il a mis dans le club pour le sauver. Donc en fait, ce n’était pas un don, c’était un prêt. C’est ça qu’il nous a mis dans une situation très difficile car il demandait 110 000 euros, la somme qu’il avait prêté au club pour se sauver. Il en demandait la restitution immédiate vu qu’il n’était plus président. Donc on s’est retrouvé assez vite face à une situation assez simple : soit on trouve l’argent, soit le club meurt. Et comme ce n’était pas possible de laisser ce club mourir, on a trouvé l’argent.

Concrètement, comment avez-vous fait ?

Ça a commencé le lendemain par un restaurateur qui nous a filé 1 000 euros, un copain qui nous a aussi filé 1 000 euros, etc. Au fur et à mesure, on a décroché les numéros d’entreprise qui nous soutenaient déjà, d’autres qu’on n’avait pas encore sollicité. On a été les démarcher, on a été vendre le fait de ne pas laisser couler le basket dans la région, et les 500 licenciés qui vont avec. On a reçu un accueil assez favorable dans bon nombre d’entreprises. Les collectivités (mairie de Hyères, mairie de Toulon, Toulon Provence Méditerranée) ont aussi fait des efforts pour nous aider à résorber le déficit. Plus de la moitié vient de partenaires privés. C’est ce qui est important à souligner car ce club doit exister aujourd’hui à la hauteur des moyens des partenaires privés qui vont être les siens.

Trouver 400 000 euros en quinze jours, c’était…

(il coupe) Mission impossible ! Mais je n’arrive pas encore à réaliser. Je suis très content de l’avoir fait mais on a tellement galéré, douté, tellement cru que c’était bon, que ce n’était pas bon. Je crois qu’on a fait une belle chose. J’en serais fier après, oui.

« Je n’étais pas censé me retrouver ici »

Vous avez donné une interview à Var Matin où vous avez dit que le club avait quinze jours pour survivre. Ce sont des mots forts, qui étaient sûrement destinés à provoquer un électrochoc. Avez-vous pu vous rendre compte de l’importance du club localement avec cet ultimatum ? 

C’est ça. En me mettant dedans à 100%, j’ai bien vu aussi que le HTV était un nom connu, une histoire, un club qui était dans les premières divisions françaises depuis 30 ans. J’ai réalisé qu’il y avait vraiment un affectif pour ce club, beaucoup de gens qui en ont de bons souvenirs. C’est ça que je voulais sauver aussi : tout ce que le basket peut donner aux gamins, aux gens d’une région. Je sais ô combien le basket peut apporter de belles choses, de belles émotions, des cadres pour l’éducation. C’est ce qui me tenait à cœur. Le basket permet à des joueurs de s’amuser et de rendre des gens heureux à côté. Il y a beaucoup de belles choses à partager autour de ce sport. Je pense que les gens ont senti aussi que William, Aurélie et moi étions de vrais passionnés, qu’on essayait de se battre par amour du basket et pas pour placer notre société sur un panneau.

Vincent Masingue lors de la Semaine des As 2008 à Toulon (photo : HTV Basket)

Avant cet épisode, que représentait Hyères-Toulon dans ta carrière, dans ta vie ?

Le HTV, c’est un club que j’ai choisi de rejoindre pour des raisons extra-sportives. Pour être très honnête, j’ai privilégié la qualité de vie. C’était un rapprochement vital que j’avais besoin d’avoir avec la mer. Ça fait partie des atouts du club : à salaire équivalent, on peut faire venir des joueurs qui préfèrent être sur la Côte d’Azur plutôt que dans des endroits moins sexys. Le HTV n’a jamais eu des gros moyens, souvent vécu avec de l’argent public. J’y ai passé cinq ans et je me suis toujours senti bien ici. C’est sûr que le basket n’est pas le sport n°1 dans notre région mais le HTV, c’est aussi les 500 licenciés qui ont envie de continuer à jouer au basket et de faire vivre ce sport qui a toute sa place ici.

Justement, vous avez sauvé l’équipe de Nationale 1 mais quid des 500 licenciés. Le centre de formation était aussi menacé, qu’en est-il désormais ?

On ne pourra pas garder la même structure que l’on avait, non. On n’a pas les moyens d’avoir un centre de formation type, ça coûte trop cher pour nous pour le moment. On va quand même garder notre équipe U18 Élite et des gamins qui veulent continuer avec nous. Mais on ne pourra pas avoir les structures d’un centre de formation agréé. Pour le reste, il n’y aura pas de conséquence, malgré tous les problèmes qu’on a eu. Cette saison, on a quand même eu deux fois la salle qui a failli nous tomber sur la tête dans la même année. Au final, on a trouvé les solutions pour que chaque section puisse avoir ses créneaux, aussi bien à Hyères qu’à Toulon.

« Laurent Sciarra a voulu mettre un coup de pied
dans la fourmilière »

Les Rougières et l’Espace 3 000 sont fermés par arrêtés municipaux. Où allez-vous jouer la saison prochaine ?

On va avoir la chance d’avoir une superbe salle de 5 000 places pour nous : le Palais des Sports de Toulon. On sera là-bas pour les entraînements et les matchs. C’est un beau cadeau de la municipalité de Toulon. C’est aussi un bel outil pour développer des partenaires et vivre des soirées sympas.

Vincent Masingue président de Hyères-Toulon, était-ce une mission court-terme pour sauver le club ou est-un engagement qui a vocation à durer ?

L’avenir nous le dira. Je suis arrivé sur un bateau qui était en train de couler, j’ai pris la barre et j’ai essayé de le ramener à bon port. Aujourd’hui, on a mis des pinoches dans les trous et on arrive à flotter. Pour l’instant, je ne sais pas trop encore ce que ça va donner. Je ne sais pas combien de temps je pourrais faire ça. L’essentiel était de sauver le club et de présenter une équipe correcte en Nationale 1. On travaillait minute par minute, maintenant on est sur du semaine par semaine et on finira ensuite par y voir plus clair un peu plus loin. Mais pour l’instant, c’est encore un peu tôt. Je n’étais pas censé me retrouver ici : je suis là car je n’avais pas envie de laisser ce club mourir. On a agi dans l’urgence et dans la nécessité de trouver des solutions, je ne sais pas ce que ça va donner. Maintenant qu’on est en NM1, à nous de réfléchir à un peu plus long terme.

Concernant l’effectif pour la saison prochaine, vous avez inévitablement pris beaucoup de retard…

On avait quand même déjà une bonne base de joueurs sous contrat : Daouda Condé, Pierrick Moukenga, Oumarou Baradji, Raphaël Wilson. On garde aussi l’Américain (Clifford) Colimon. Maxim Eugene n’est plus sous contrat mais on va essayer de le conserver. Mais oui, forcément, il y a beaucoup d’inconnues. On ne sait pas encore si notre masse salariale sera encadrée ou non, on sera fixé en fin de semaine. Il est évident qu’on n’aura pas la même latitude que les autres clubs. Maintenant, on aura la base d’une équipe qui a déjà gagné un titre, qui était bâtie pour être compétitive à l’étage supérieur, avec des joueurs référencés. À nous d’être efficace en trouvant les bons compléments pour que cette équipe puisse représenter dignement nos couleurs.

« Le HTV doit arrêter de vivre au-dessus de ses moyens »

Quel sera le budget ?

Il sera en baisse par rapport à cette saison (il était estimé à 800 000 euros, ndlr), avec une masse salariale en baisse également. Mais il restera très correct pour la Nationale 1. Cependant, il n’a pas été complètement validé donc je ne préfère pas donner de chiffres exacts. Suite à l’appel, on passe encore devant la CCG vendredi pour présenter le budget.

Laurent Sciarra sera encore le coach à la rentrée alors qu’il avait annoncé sa démission dans la foulée du titre de champion de France. Comment s’est déroulé ce volte-face ?

Laurent Sciarra et Cliff Colimon seront encore Varois à la rentrée (photo : HTV Basket)

J’imagine que cela a pu sembler surprenant vu de l’extérieur mais Laurent a fait ça pour faire réagir le président Garcia. Lui-même ne savait pas ce qu’il allait faire la saison prochaine car le président ne savait pas, car personne ne disait rien, car on ne parlait pas du budget ou de rien du tout pour la rentrée. Laurent a voulu mettre un coup de pied dans la fourmilière. Après, quand il a vu que le président partait et que le club se retrouvait en difficulté, il a essayé de nous aider à trouver les fonds et de se servir de son image afin de faire en sorte que les gens aient envie de continuer à vivre l’aventure avec lui.

Donc lui aussi a joué un rôle dans le sauvetage du HTV ?

Bien sûr. On a fait un article dans Var Matin où on a fait un appel aux dons. Son nom porte aussi : quand tu veux présenter un projet et que Laurent Sciarra est l’entraîneur, cela sécurise et rassure les gens. Ils avaient envie de le voir continuer à entraîner le HTV. C’est quelqu’un pour qui j’ai toujours eu beaucoup de respect. On n’est pas de la même génération, on s’est croisé en équipe de France : il partait quand j’arrivais. On a appris à se connaître plus récemment.

« Pau, HTV : il faut arrêter de laisser
les clubs à des cow-boys »

Hyères-Toulon est sauvé de la rétrogradation en ligue régionale et va continuer à vivre. Cependant, on a l’impression de vivre le même refrain lors de chaque début d’été, avec toujours plus de problèmes découverts. Comment croire que c’est réellement la fin des ennuis pour le HTV ?

Je ne dis pas que c’est la fin des problèmes. Je dis simplement que le HTV doit arrêter de vivre au-dessus de ses moyens. Il faut qu’on le prouve, qu’on le fasse et qu’on arrive à survivre dans cette division. On a mérité de monter et par rapport à la place que le HTV a dans le basket, je pense que ce n’est pas délirant que le club soit en Nationale 1. Maintenant, c’est à nous de prouver que c’est viable économiquement. L’idée est de pérenniser ce club au niveau financier, et de vivre avec les moyens que l’on a réellement. Pas ceux que l’on espère avoir ou que l’on pense avoir. Que ce soit moi ou celui qui prendra ma place, le HTV doit être géré avec beaucoup plus de rigueur et de sérénité. C’est un des défis majeurs des prochaines années.

Lundi, vous avez eu une bonne nouvelle mais l’un de tes anciens clubs n’a pas eu la même chance : l’Élan Béarnais est rétrogradé par la DNCCGCP. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

De la joie et de la tristesse pour ces deux clubs-là. Ce sont deux destins opposés. Je suis extrêmement triste pour l’Élan Béarnais, pour le président Seillant, pour tous les gens qui ont œuvré dans ce club qui a été saccagé en un an. Là, on ne parle pas d’un trou de 200 000 euros mais de plusieurs millions… À un moment donné, il faut arrêter de laisser les clubs à des cow-boys. C’est ce qui s’est passé aussi au HTV : le mec a pris le club, s’en est servi, a eu ce qu’il voulait, il l’a jeté et il s’essuie par terre avec. Je ne connais pas le dossier de Pau mais ce n’est pas possible que les Ricains soient sans la moitié du budget prévisionnel à la fin de la saison. C’est un massacre. Je suis très triste pour tous les gens là-bas, pour ce club que j’ai beaucoup aimé, même si j’en ai assez peu porté les couleurs (il rit, pendant une saison demie, entre 1999 et janvier 2001, avant de partir se relancer à Montpellier, ndlr). Franchement, au vu de l’œuvre du président Seillant, ça fout les boules pour lui. Pau, c’est énorme, c’est la plus grande salle de France, il n’y a pas d’équivalent ! Il y a une histoire, une culture, c’est immense le basket à Pau !

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