Il y a un an, Matthew Strazel sauvait la France contre le Japon : « Comme si le monde s’arrêtait ! »

Matthew Strazel, l’action d’une vie
Mardi 30 juillet 2024, 18h56. Une chape de plomb s’est abattu sur les 26 900 spectateurs du Stade Pierre-Mauroy. Il reste 16,4 secondes à jouer et l’équipe de France, menée 80-84, va certainement s’incliner contre le Japon, l’équipe la plus faible du groupe, et hypothéquer son avenir olympique dès le premier tour, la chance d’une vie à la maison. À moins d’un miracle…
Cette main sur la hanche…
Un miracle nommé Matthew Strazel. Depuis, l’action est tellement rentrée au Panthéon du basket français qu’on la revoit presque les yeux fermés. Remise en jeu de Nando De Colo, qui trouve Evan Fournier dans le corner droit. L’arrière ne prend pas le shoot et envoie une passe hasardeuse vers Rudy Gobert, pas si loin d’être interceptée par Hirotaka Yoshii. Mais le pivot des Wolves a le bon réflexe : au lieu de tenter sa chance dos au cercle au poste, il ressort vers Matthew Strazel seul à 3-points à 45 degrés. Le meneur monégasque refuse une première position de tir, fait sauter Yuta Watanabe d’une simple feinte, se décale de trois pas sur sa gauche et envoie une prière, la main de Yuki Kawamura légèrement posée sur sa hanche. Trois-points, avec la faute – litigieuse – en prime. « J’ai bien joué le coup », admettra-t-il après coup. Une égalisation miracle sur la ligne de réparation (84-84). « Miracle », on aimerait trouver un autre mot mais il n’y en a pas…
#Paris2024 | 🇫🇷 😱 MATTHEW STRAAAZEEEEEEL 🔥
Mais quel shoot à 3 points plus la faute pour revenir à égalité 🏀
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— francetvsport (@francetvsport) July 30, 2024
« Un moment incroyable, fou ! »
« C’était un moment incroyable, un moment fou », retrace Guerschon Yabusele, énorme sourire aux lèvres à la simple évocation de cet instant suspendu de l’année dernière. « C’était comme si le monde s’arrêtait. On se dit : « Mais qu’est-ce qui vient de se passer ?! » J’étais très content qu’il puisse sortir cette action-là. Ça fait partie des moments mémorables des JO. »
Nous reviennent alors les images de cette folle séquence : le Stade Pierre-Mauroy qui chavire – et la section française de la tribune de presse avec, contrairement à toutes les règles déontologiques en vigueur -, Evan Fournier qui demande à Matthew Strazel s’il va encadrer ce shoot (spoiler : oui, au-dessus du maillot signé par toute l’équipe et de la médaille), Frank Ntilikina qui fait mine de déposer une couronne sur sa tête en zone mixte, les compliments appuyés de Victor Wembanyama, les 50 micros tendus vers un jeune meneur de 21 ans que le basket français a longtemps pensé surcoté… Pour finalement être épargné d’une immense catastrophe industrielle par ce même meneur.
Un énorme impact sur sa notoriété
« Peut-être que ça nous a sauvés », admet le natif de Bourg-la-Reine, un an après. « Mais avec des si, on refait le monde. Si on avait perdu contre le Japon, peut-être qu’on aurait montré un meilleur visage contre l’Allemagne et qu’on se serait qualifiés. Ça s’est fait comme ça. On ne saura jamais quel type de parcours on aurait eu sans ce tir. »
Pourtant, à l’époque, pas besoin de recul. « Il a quasiment sauvé le tournoi », clamait déjà Nicolas Batum quelques minutes après le renversement de situation. 365 jours plus tard, son potentiel successeur au capitanat, Guerschon Yabusele, n’a pas changé d’avis. « Il nous a un peu sauvés avec cette action ! » Avec un camouflet contre le Japon, les Bleus auraient effectivement eu la possibilité d’anticiper leur électrochoc mais autant ne pas imaginer ce qui se serait passé sans ce tir salvateur…

Un 3+1 qui accompagne désormais Matthew Strazel partout où il va, comme l’instantané qui résume à lui seul une carrière. Pas un jour, ou presque, ne s’écoule sans que quelqu’un n’aborde le sujet avec lui (comme BeBasket mardi lors de la conférence de presse des Bleus, on plaide coupable !). « On m’en parle très souvent, même encore maintenant », admet-il. « Dans le jeu lui-même, j’ai juste fait ce que je devais faire et ce que je travaille depuis six ans maintenant. Mais médiatiquement parlant, et en termes de notoriété, ce shoot m’a propulsé encore plus haut. »
« Quand on voit l’ampleur et la maturité qu’il prend… »
Le reflet, aussi, d’un début de carrière hallucinant, entamé avec fracas un soir d’octobre 2019 en enchaînant les ficelles longue distance (déjà) en EuroLeague contre Vitoria avec l’ASVEL et auréolé d’un palmarès à faire se pâmer de jalousie 99,9% des trentenaires du circuit : quadruple champion de France à 21 ans et déjà héros national. « Faire une telle action, à ce moment-là, ça a été incroyable pour lui dans sa jeune carrière », étaye Guerschon Yabusele. « Mais ça montre aussi beaucoup de choses sur lui, notamment qu’il est prêt. J’étais avec Matthew déjà à l’ASVEL. Quand je vois d’année en année l’ampleur et la maturité qu’il prend, c’est assez impressionnant. »
Ce même Matthew Strazel qui regarde sans ciller notre confrère d’Outre-mer la 1ère qui lui demande s’il peut être un leader dès cet été en équipe de France. « Oui, à 100% ». Reste, tout de même, un mystère à éclaircir : comment peut-on faire mieux qu’un shoot décisif aux Jeux Olympiques, à la maison, devant près de 27 000 spectateurs ? « C’est le plus beau tir de ma carrière pour l’instant mais j’espère qu’il y en aura d’autres », sourit-il. En attendant la suite, joyeux 30 juillet, Matthew !


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