Jonas Boulefaa, le prospect qui a choisi l’ÉLITE 2 plutôt que la NCAA : « Je me suis rappelé pourquoi je jouais au basket »

Le prospect Jonas Boulefaa fait ses armes avec l’ADA Blois
Combien sont-ils, l’été dernier, à avoir cédé aux sirènes de la NCAA ? Impossible d’établir un chiffre exact, mais 20 jeunes Français, au moins, sont partis gonfler les rangs du basket universitaire américain. Et ils auraient encore pu être un peu plus, puisque certains ont opéré un choix à contre-courant de la nouvelle tendance.
Refuser des sommes mirobolantes à 18 ans :
« Forcément pas évident ! »
Parmi eux, Jonas Boulefaa (2,07 m, 18 ans), longtemps dans le viseur de plusieurs facs, à commencer par Illinois, l’une des plus sérieuses sur le dossier. Tombé sous le charme de l’enfant de Meilhac lors de la finale 2024 du Next Generation Tournament (NGT), le tournoi U18 de l’EuroLeague, où il était monté à 33 d’évaluation contre le Real Madrid, le recruteur des Fighting Illini, Geoff Alexander, est venu le rencontrer à deux reprises en France, en septembre puis en novembre. S’en est suivi une invitation pour une visite officielle aux États-Unis fin décembre.
Juste après Noël, accompagné notamment d’un « tuteur » spécialement choisi pour l’occasion, le double champion de France Trenton Meacham (diplômé d’Illinois en 2009), Jonas Boulefaa a donc pu découvrir les installations démesurées du campus d’Urbana-Champaign. Prendre place dans l’immense salle qui serait devenue sa seconde maison, le State Farm Center, et ses 15 544 sièges. « J’ai été impressionné par les structures », souffle-t-il.
New #Illini GM Neal Ganta (left) is here. Meanwhile, former Illini Trent Meacham (on the call for BTN) was just chatting up French 6’9” forward Jonas Boulefaa. pic.twitter.com/sPVggXwA6a
— Derek Piper (@DPiper247) December 29, 2024
Difficile, face à un tel gigantisme, de s’imaginer revenir démarrer sa carrière en France, surtout quand on y associe le côté financier. Les revenus promis en NCAA, grâce à la révolution NIL, sont hors-normes, de l’ordre de six ou sept chiffres annuels. « De telles sommes à cet âge-là, il n’y en a nulle part ailleurs qu’en NCAA », poursuit Boulefaa. « Forcément, il y a un moment où ce n’était pas évident [de refuser]. » Surtout qu’Illinois n’était pas seul sur le dossier : Louisville, Cincinnati ou encore Fresno State lui faisant également une cour assidue.
Les raisons de sa signature à Blois
Quelques mois plus tard, Jonas Boulefaa n’évolue pourtant pas au State Farm Center, plutôt dans la salle du Jeu de Paume, et sa capacité exiguë de 2 339 places. Si les infrastructures de l’ADA sont novatrices, notamment grâce au centre de performance, son salaire est encore relativement modeste, de l’ordre de cinq chiffres la saison. « Mais je me suis rappelé pourquoi je jouais au basket », indique-t-il. L’histoire de sa signature avec l’ADA Blois, c’est avant tout celle d’un feeling rapidement partagé. « Ça a vraiment matché entre nous quand on a échangé », apprécie le coach, David Morabito.
« C’est un joueur que l’on avait bien dans l’œil depuis trois ans, que j’ai vu évoluer lors de chaque saison à l’INSEP », explique le manager, Julien Monclar. Mais les bruissements sur la NCAA et la longue indisponibilité du Lot-et-Garonnais, out six mois à cause d’une opération de la hanche, ont quelque peu distendu le fil. « Dès son retour sur les parquets, on est allé le voir jouer avec David. On a vu ses performances, on a regardé le NGT. On savait qu’on avait une recherche sur ce poste et on a pu retisser le contact, d’autant plus qu’il a changé de représentant avec un agent plus proche du marché français. Dès qu’il est revenu du NGT, on lui a proposé de venir nous voir, à Blois. »

Le tournant dans l’une des décisions les plus importantes de sa jeune carrière. « J’ai fait beaucoup de visites mais j’ai immédiatement adhéré aux valeurs du club. Le projet sportif présenté m’a de suite plu, le discours de David, aussi, qui veut me faire avancer et faire avancer l’équipe. Cela m’a poussé à signer à l’ADA. Je n’ai pas vraiment hésité à venir ! »
Au milieu de la concurrence mondiale qui existait autour de Boulefaa, « avec également quelques clubs européens et surtout Français » sur le coup, selon le principal intéressé, son accord vient apporter une nouvelle crédibilité au projet blésois, axé depuis quelques années sur la post-formation avec Mbaye Ndiaye, Brice Dessert, Armel Traoré, Maxime Sconard ou Talis Soulhac.
« On prouve depuis plusieurs saisons qu’on met les jeunes sur le terrain », glisse David Morabito. « Désormais, nous sommes reconnus comme cela. Cela nous donne forcément du crédit et de l’écoute dans ce type de dossier, même si ce n’est pas une garantie. Mais cela a forcément été l’un des aspects majeurs de sa signature. »
Parmi les deux 2007 à plus de 20 minutes en LNB
Depuis son arrivée à Blois, dans la foulée du crève-cœur absolu de la finale de l’EuroBasket U18, Jonas Boulefaa n’a pas à regretter son choix. Pour une simple et bonne raison : il joue. Avec son compagnon argenté de Belgrade, Maxence Lemoine, il est le seul 2007 (ou moins) à dépasser la barre des 20 minutes de jeu en LNB (7,6 points à 41% et 3,2 rebonds en 13 matchs toutes compétitions confondues). « Pour l’instant, j’ai ce que je voulais mais ce n’est que le début« , anticipait-il à la fin du mois de septembre.
Reste que s’il demeure assez irrégulier (de 15 à 2 points d’un match à l’autre), il semble avoir pris le pli des spécificités de l’ÉLITE 2 ces dernières semaines, avec des fiches statistiques en nette hausse. Il a notamment été très bon au Havre lundi soir en Coupe de France (19 d’évaluation en 15 minutes).
« Il monte en puissance sur les points mais son travail depuis l’entame est remarquable, avec une capacité à de suite apporter des choses », note Julien Monclar. « C’est un plaisir de bosser avec lui, je suis ravi de le voir bien évoluer. Il a l’air bien dans ses pompes et c’est la base. »
« Il a connu des difficultés en début de saison, mais c’est une bonne chose : ça veut dire qu’il a encore une marge de progression », positive David Morabito. Au centre des attentions du joueur, notamment, « l’attaque en dribble et la défense » : « j’y travaille chaque jour », certifie-t-il. « Il peut encore être meilleur dans le jeu, notamment dans un rôle de facilitateur inhérent à son poste actuel », encourage le GM.
« Je suis un contre-exemple !
Tout ce qu’il ne doit pas faire, je lui montre aussi… »
Le tout dans un environnement propice à l’épanouissement individuel. « Tout le monde est bienveillant et me pousse à avancer », apprécie Jonas Boulefaa. « J’essaye aussi de prendre l’expérience des anciens : les Romu (Morency), Timothé (Vergiat), Jacques (Alingue)… » Le même Jacques Alingue qui, au même moment, passe à côté de nous, s’arrête et lui lance en plein interview : « Ah ouais, c’est parce que tu me vois que tu prononces mon nom, OK… »
Du coup, la question s’imposait : « Est-ce que tu prends les lancers-francs de Jacques, aussi ? » Réponse de l’apprenti : « Ah non, ça, c’est un truc à ne pas faire ! » Pendant que le vétéran de l’ADA renchérit : « Justement, je suis un contre-exemple ! Tout ce qu’il ne doit pas faire, je lui montre aussi. » Sourire des deux. « Le groupe vit bien, c’est cool », dit, plus sérieusement, l’international juniors.

« Il va aller très haut, et très loin ! »
Pur produit du Garonne Avenir Basket, issu d’une vraie famille basket avec un père, Kader, aperçu à une reprise en Pro A (avec Montpellier, à Bourg-en-Bresse, en février 2002), qui est une vraie figure locale (encore joueur de NM3 en 2022-2023 avec la CTC Agenaise et désormais coach de l’équipe NF2 du GAB), Jonas Boulefaa aspire à faire de Blois un tremplin vers les sommets. « Forcément, la NBA est un rêve de gamin ! Mais il y a aussi l’EuroLeague. »
Poste 4 shooteur, son jeu semble davantage profilé pour le basket européen, à l’image de la trajectoire suivie par Adrien Moerman, même si l’ancien intérieur de l’Anadolu Efes disposait de plus de qualités athlétiques. « C’est un gamin qui va aller très haut et très loin », clame David Morabito. « En plus du basket, la tête est bien en place. Pour un jeune, il est incroyable. Je l’appelle le jeune vieux. Il a une énorme maturité sur et dehors du parquet. » La preuve : il faut déjà une sacrée dose de sagesse pour renoncer au rêve américain au profit des charmes plus discrets de l’ÉLITE 2…



























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