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Mathieu Guichard – Jonathan Hoyaux, clap de fin pour le duo le plus capé de LNB : « Je ne pouvais pas le blairer avant ! »

Associés depuis neuf ans à Saint-Chamond, Mathieu Guichard et Jonathan Hoyaux sont les coéquipiers ayant disputé le plus de matchs ensemble en LNB. Ce mercredi, contre Fos-Provence, ils connaîtront leur 306e rencontre commune... et l'une des dernières, puisque le SCABB a officialisé lundi leur départ. Nous les avions auparavant réunis pour une interview croisée.
Mathieu Guichard – Jonathan Hoyaux, clap de fin pour le duo le plus capé de LNB : « Je ne pouvais pas le blairer avant ! »

Après plus de 300 matchs en commun, Mathieu Guichard et Jonathan Hoyaux vont voir leurs chemins se séparer dans quelques jours

Crédit photo : Cécile Thomas

Mathieu et Jonathan, savez-vous combien de matchs vous avez disputé ensemble ? 

Mathieu Guichard : Ça fait neuf saisons ! Vas-y, estime…

Jonathan Hoyaux : Alors, on compte Leaders Cup, saison régulière et playoffs ?

Et Coupe de France également…

JH : Ça fait à peu près 30 par saison. Donc 270 sur neuf ans. Avec les blessures, je dirais 250 peut-être, quelque chose comme ça (Mathieu acquiesce) ? 260, je ne sais pas ?

Il y en a 305…

MG : Ah ouais, 305 quand même ?!

JH : C’est pas mal ! Je ne pensais pas autant…

« Ah ouais, il peut encore faire ça ! » 

Plus de 300 matchs joués avec un seul coéquipier dans une carrière, qu’est-ce que cela vous inspire ?

JH : Qu’il y en a beaucoup trop (ils rigolent)

MG : Ça fait plaisir. Ça met en valeur notre longévité au club donc c’est cool. Plus de 300, je ne me rendais pas forcément compte.

JH : Je comprends pourquoi je connais Guich’ par cœur. Sur le terrain, on a tellement l’habitude qu’on ne doit pas être loin de pouvoir jouer ensemble les yeux fermés.

Vous arrivez encore à vous surprendre quand même ?

JH : Ça peut arriver oui ! Surtout sur la fin, ces derniers temps. Ça m’arrive parfois de voir Mathieu sur le terrain et de me dire : « Ah ouais, il peut encore faire ça ! » Ça me rappelle le Guich’ d’il y a cinq ans. Mais la panoplie complète de l’autre, on la connait.

Accompagnés par Juwan Staten, Jonathan Hoyaux et Mathieu Guichard lors de leur deuxième saison commune en 2017/18 (photo : Laurent Peigue)

Le duo Kahudi – Lighty a joué plus de matchs ensemble à l’ASVEL si l’on ajoute les Coupe d’Europe mais en LNB, vous êtes les deux coéquipiers les plus anciens, devant eux (255 matchs) et le duo Holston – Julien à Dijon (213 matchs)…

JH : Je n’avais jamais pensé à ça.

MG : Moi non plus, mais c’est bien ! Ça veut dire qu’on est resté longtemps dans le même club et c’est de plus en plus rare. J’espère qu’il y en a d’autres qui feront ça mais vu comme le basket évolue, je ne suis pas sûr que l’on tende vers ça. Quand je suis arrivé à Saint-Chamond, j’avais 24 ans donc c’est rare de faire plus de la moitié d’une carrière dans une seule équipe. C’est beau.

Cette fidélité, était-ce quelque chose de voulu ou plus une histoire d’opportunités ?

JH : Je pense que c’était plus une histoire d’opportunités. Quand je suis arrivé à Saint-Chamond, Mathieu était déjà là depuis deux ans. Je me rappelle qu’on signait les contrats en même temps, on se concertait. Je ne sais pas si c’était une volonté du club mais on signait toujours en même temps. Et on s’est rapidement retrouvé à signer des prolongations de trois ans.

MG : Et il y a tout ce qui est stabilité familiale aussi… J’ai deux enfants, nos derniers sont nés la même année.

JH : À un moment, quand on a des enfants, des femmes qui ont un travail, on ne pense plus qu’à nous. On était un peu dans la même situation.

MG : Et puis le club évoluait. On savait qu’il y avait un projet de salle. Cela est vraiment rentré en compte. S’il n’y avait pas eu ce projet d’Arena, je ne sais pas si je serais resté aussi longtemps à Saint-Chamond.

JH : Moi aussi…

MG : Arrivé à un âge, on n’a plus forcément envie de bouger. On était bien ici.

JH : On a toujours été bien !

MG : Sinon on ne serait pas resté. Les dirigeants ont fait les efforts derrière et tout a suivi.

« Je ne me voyais pas partir pour 400 euros de plus ailleurs »

La salle a été un facteur aussi déterminant que cela ? 

Les deux en chœur : Oui !

MG : Au bout d’un moment, on allait stagner à Boulloche. On n’avait pas de salle de musculation pour travailler, rien. À l’Arena, on a tout sur place, à tel point que je ne suis pas sûr de retrouver cela ailleurs. Et même, personnellement, le fait d’avoir vécu cette entrée dans la salle, je ne vais pas dire que c’était un nouveau challenge mais ça m’a donné un nouveau souffle. Je sortais de la routine. Nouvelle salle, nouvelle dimension, nouveau projet…

JH : Cela signifiait automatiquement une évolution du club. Quand je suis arrivé, il n’y avait qu’une salariée extra-basket.

MG : Et moi zéro !

JH : Il n’y avait que des bénévoles. Ça a tenu un petit moment ! Mais dès qu’on est entré dans l’Arena, il y a eu une petite dizaine de salariés. Ça s’est vite développé dans le bon sens. Le budget aussi : on devait être à 1,6 million à l’époque, on a fini à 3,6 avant que David Despinasse n’arrive. Ce n’est plus le même club. On est passé d’association à SAS. C’est toute une nouvelle structure qui a vu le jour. Depuis un an, la direction a changé. Il y a encore d’autres perspectives bien plus élevées. Rester dix ans dans un club qui n’a pas spécialement d’évolution ou de projet, je ne pense pas que ce soit réellement faisable.

Avez-vous eu des opportunités pour aller voir ailleurs ?

MG : Oui, on en a eu ! On aurait même pu toucher plus d’argent dans d’autres clubs. Mais personnellement, je ne me voyais pas partir pour 400 euros de plus ailleurs, surtout quand cela implique de quitter l’école de mes enfants ou le travail de ma femme.

JH : Failli partir, non, mais avoir des opportunités, oui. Après, le club a aussi été très intelligent à un moment en nous signant très tôt dans la saison, parfois dès février, avec un contrat de trois ans sur la table.

À Aix-les-Bains vendredi, Jonathan Hoyaux et Mathieu Guichard ont disputé leur 305e match commun (photo : Cécile Thomas)

La belle histoire va s’arrêter cette saison… Comment l’avez-vous appris ? 

JH : Je suis au courant depuis le week-end dernier. Je l’ai appris lors de notre road trip entre Évreux et Caen par notre directeur sportif.

MG : Je l’avais compris depuis un mois à peu près. Je n’ai jamais su officiellement qu’ils ne comptaient plus sur moi en tant que joueur mais ils m’avaient proposé une reconversion, à propos de laquelle les discussions avancent bien. Je me doutais bien que c’était parce qu’on ne comptait plus trop sur moi pour la suite.

Auriez-vous aimé prolonger ? 

MG : Parfois oui, parfois non. Cela allait dépendre de pas mal de choses, à commencer par l’identité de l’entraîneur, si Maxime Nelaton va rester ou pas. Il y a des moments où j’avais encore envie de jouer pour le club, d’autres non. Je voulais voir ce que le SCABB pouvait me proposer en tant que joueur.

JH : Oui, pourquoi pas ! J’aurais bien aimé. Après, c’est une décision de la direction, que j’accepte totalement. Ils voulaient peut-être tourner une page, avoir de nouveaux joueurs.

C’est impossible de résumer autant d’années en une réponse, mais que retiendrez-vous de votre passage à Saint-Chamond ? 

JH : Saint-Chamond, c’est une partie de ma vie ! Une longue partie même. Il y a tellement de choses que je pourrais retenir que c’est compliqué de n’en garder qu’une. Je retiendrai mes années avec Alain Thinet, mes années avec Max (Nelaton), Mathieu Guichard, tous ces bons moments avec les dirigeants, le public à Boulloche, etc.

MG : Le mot que je pourrais dire, c’est fierté. Je suis fier de ce que j’ai accompli à Saint-Chamond. Je suis arrivé dans un club en Nationale 1 il y a onze ans, j’ai été champion de France dès la première saison. Derrière, j’ai fait partie des gens qui ont fait évoluer ce club. Je suis fier d’avoir fait partie de cette aventure-là. En onze ans, j’ai créé des liens forts avec des gens, beaucoup d’amitiés parmi les partenaires, les bénévoles, les supporters. C’est ça qui rend l’histoire encore plus belle.

« Si l’on était monté en 2022, on aurait fait une saison comme La Rochelle »

Peut-on parler de petit regret sur la saison 2021/22, lorsque vous manquez le titre de champion de France à cause du panier-average contre Nancy ?

MG : Je ne sais pas si c’est un regret car on a quand même fait une saison exceptionnelle, avec un budget qui n’était pas le même qu’aujourd’hui. Cela aurait forcément été la cerise sur le gâteau. Imaginez un titre de champion de France Pro B pour Saint-Chamond. En plus, l’année d’après, on rentrait dans l’Arena ! C’était la dernière saison à Boulloche. Cela aurait été sûrement dur de monter…

JH : Je pense effectivement qu’on aurait fait une saison comme La Rochelle. En termes de budget ou de structure, le club n’était pas prêt. Le déménagement vers l’Arena a été un bordel monstre. La montée en Betclic ÉLITE aurait été très difficile à gérer en plus. Mais pour nous, c’est vrai qu’on aurait évidemment aimé…

MG : C’est sûr qu’on aurait voulu avoir le titre ! J’aimerais bien savoir si un titre de champion décerné au panier-average est déjà arrivé, et si oui quand… Je serais curieux de savoir tellement c’était improbable (trois fois d’affilée entre 2021 et 2023, avec Fos, Nancy et Saint-Quentin champions devant Paris, Saint-Chamond et Chalon, alors que ce n’était plus arrivé depuis Rouen – Bourg en 2008 auparavant, ndlr).

JH : Ça nous a tués !

MG : Improbable, je ne sais pas si c’est le mot mais ça nous a fait super mal. Derrière, on se fait sortir dès le premier tour des playoffs (par l’ASA, ndlr).

Il n’est évidemment pas le seul à avoir compté, mais votre ex-entraîneur Alain Thinet a joué un rôle majeur dans votre histoire au club…

JH : Oui, c’est Alain qui nous a fait venir tous les deux. C’est Alain qui nous a emmené dans cette salle. On avait une confiance aveugle en Alain Thinet, il ne nous racontait pas des bobards. Il ne nous a jamais trahis et on a toujours tout donné pour lui. Derrière, on a suivi avec Maxime Nelaton. C’était la meilleure passation dont on pouvait rêver. Alain a fait ça en douceur. La plupart des idées étaient les mêmes : Max a juste apporté quelques nouveautés, de basket un peu plus moderne.

Alain Thinet, ici dans les bras de Jonathan Hoyaux, a joué un rôle clef lors de leur aventure commune au SCBVG (photo : Laurent Peigue)

Que vous inspire le projet actuel du SCABB ? 

MG : J’ai hâte de voir ce que ça va donner ! Aujourd’hui, ça fait rêver. J’ai envie de voir comment ça va évoluer, si ça va aller dans le sens prévu. Pour répondre à cette question, il faudra se revoir dans 3 ans. Dans la période qu’on vit, je pense que tous les clubs rêveraient d’avoir un actionnaire qui arrive en mettant autant d’argent.

Y-a-t-il des choses qui ont concrètement changé ? 

JH : Nous, on n’est pas trop impactés par ce genre de choses. Dans le fonctionnement, à part l’arrivée d’un directeur sportif, on n’a pas vu de grands changements. Mais la structure du club, l’organigramme de l’administratif ont été complètement repensés. Il y a le fameux projet Coupe d’Europe 2030, c’est énorme. La faisabilité, on ne peut pas savoir mais ça fait rêver les gens !

Jouer ensemble depuis longtemps, c’est une chose… mais êtes-vous amis en dehors du terrain ? 

JH : Non, on ne peut pas se blairer !

MG : Je ne peux pas le voir ! (ils rigolent)

JH : En vrai, on va aller faire la sieste ensemble tous les deux après l’interview là (entretien réalisé vendredi en début d’après-midi, jour de match à Aix-Maurienne, ndlr) !

MG : Vu qu’on passe tous les jours ensemble depuis des années, bien sûr qu’on est potes, qu’on se voit en dehors. Mais on a aussi nos vies à côté. On n’habite pas au même endroit, on est à 20 minutes de route. Il a son cercle d’amis, j’ai le mien, on a des amis en commun. Ma première fille a l’âge de son deuxième et nos troisièmes sont nés la même année.

JH : Dès qu’il y a un grand anniversaire, ou un rassemblement, on se voit. Les familles sont là ! Mais c’est vrai qu’on ne peut pas toujours être ensemble. On a parfois besoin d’espace par rapport à ses collègues. Là, on vient de passer cinq jours en road-trip entre Évreux et Caen (il souffle)… Au bout d’un moment, que ce soit Guich’ ou les autres, je n’ai pas trop envie de les voir à la maison (il rit)

Vous partagez la même chambre en déplacement… 

MG : Oui ! Mais ce n’est pas depuis le début. À l’époque, il était avec Jean-Stéphane Rinna et moi avec Grismay Paumier. Et quand ils sont partis (en 2020), on s’est dit qu’on allait se mettre dans la même chambre.

« 5-0 pour moi, il faudra bien le mettre en gros ! » 

Vous vous souvenez de l’époque où vous étiez adversaires ? 

JH : Il faut savoir une chose, c’est que je ne pouvais pas le blairer avant ! (Mathieu rigole) On est exactement de la même année, on s’affrontait en Espoirs lors des Chalon – Clermont. À propos de Mathieu, beaucoup me disent : « Sur le terrain, je ne peux pas ! » Et je réponds que ça me faisait aussi ça avant, mais dès qu’on apprend à le connaître, c’est le mec le plus gentil au monde.

MG : Ce sont tes parents qui ont envoyé une photo de cette époque, non ?

JH : Mon père, oui ! On a les maillots de match beaucoup trop longs. Ça devait être en Espoirs, ou en professionnel quand on commençait à entrer dans le garbage-time. Ça commence à dater.

La fameuse photo d’un duel Chalon – Clermont-Ferrand, en Espoirs ou amical, à la fin des années 2000

Jonathan, pourquoi aviez-vous du mal avec Mathieu au début ? 

JH : Ce n’est pas que j’aimais pas, mais…

MG : De l’extérieur, sur le terrain, je pense que je suis un joueur agressif. J’avoue que je suis un râleur (Jonathan rigole). Donc je peux comprendre l’avis des gens.

JH : Je n’avais pas de problème avec lui directement. Mais le voir en face et jouer contre lui, il me rendait fou ! (Mathieu explose de rire). Il était toujours en train de râler. Il s’est un peu calmé avec les années mais il garde le même fond quand même. Après, quand tu le connais de l’extérieur, il n’est pas du tout pareil, bien plus posé, bien plus calme.

MG : Lui a toujours été l’inverse, beaucoup plus tranquille.

Sauriez-vous dire le dernier match que vous avez joué l’un contre l’autre ? 

MG : L’année en N1, quand on est monté avec Saint-Chamond et que tu étais à Saint-Vallier. Quoique… Peut-être pas car tu n’étais pas là au premier match, tu avais pris une béquille…

JH : Alors le match retour !

MG : Eh non, car je m’étais pété la main… Donc cette saison-là, on n’a pas joué l’un contre l’autre alors.

JH : Quand j’étais à Limoges ?

MG : Ah non ! Peut-être quand j’étais avec Bordeaux et toi à Saint-Vallier…

JH : Exact !

C’est ça, un Saint-Vallier – Bordeaux en novembre 2012…

JH : Oh la la, ça fait 13 ans ?!

MG : Eh oui, puisque ça fait 11 ans que je suis là, et qu’on ne s’était pas affronté la saison suivante. Je m’en rappelle très bien, c’est l’année où l’on descend avec Bordeaux.

En tout, il y a cinq confrontations en pro, cinq victoires pour l’équipe de Jonathan Hoyaux…

JH : (il s’exclame) 5-0 pour moi ?! Haha, improbable !

MG : Parce qu’on ne s’est pas affronté en Nationale 1 ! On avait mis 35 points à son équipe quand il était blessé (92-57, ndlr).

JH : Oh la vache, oui…

MG : Et on avait perdu chez vous (88-98), je m’en rappelle. Mais tu n’avais pas joué, c’était Anthony Christophe à ta place. 5-0 pour toi, ça se peut…

C’est aussi parce que c’était l’époque de vos trois relégations d’affilée, Mathieu…

MG : Quand j’étais jeune…

JH : Ah oui, tu étais le chat noir pendant un moment !

MG : On a perdu les deux fois avec Vichy contre Limoges. Du coup, il y a Saint-Vallier – Bordeaux et la dernière doit être Aix-Maurienne – Clermont.

JH : 5-0, c’est magnifique ! Ça, il faudra bien le mettre en gros hein (il rit).

« On n’est pas encore à la ramasse, loin de là ! » 

Comment pouvez-vous présenter l’autre en tant qu’homme ? 

JH : Mathieu, c’est quelqu’un de très assidu dans tout ce qu’il fait. Il met un point d’honneur à ce que tout soit parfait, peut-être parfois un peu trop, parce que ça va lui bouffer de l’énergie et il va trop réfléchir. Cela concerne sa vie professionnelle et sa vie privée. Il aime bien que tout soit en ordre. Que ce soit dans le basket et ses relations amicales, c’est aussi quelqu’un de très fidèle.

MG : Je dirais aussi que Jonathan est quelqu’un de fidèle, proche de sa famille, de ses trois enfants. Dans le basket, il est peut-être un peu moins carré que moi mais il est stable. Il n’a pas trop de haut et de bas. Il est sobre et posé. C’est sûrement pour cela que l’on se complétait bien sur le terrain.

Et le basketteur ? 

JH : Toutes les années où j’ai joué avec lui, Mathieu était le métronome de l’équipe. Le jeu a évolué depuis mais au début, il avait le ballon 20 secondes en main et il la mettait au bon endroit, au bon moment. Pendant plusieurs saisons d’affilée, il a fini meilleur passeur de Pro B. Et après, il y a ce petit côté excessif, nerveux. Il n’aime pas l’injustice. Ça le rend fou.

MG : C’est bien résumé ! Jo, on le connaît, c’est l’un des meilleurs shooteurs vus en Pro B, l’un des plus gros bras avec qui j’ai joué ! Je pense qu’on s’est mutuellement facilité la vie : je pense que j’ai eu beaucoup de passes décisives grâce à lui, lui a eu des shoots grâce à moi. Le brassard de capitaine lui allait bien car il avait cette sérénité, il était capable de calmer les choses. Personnellement, je reconnais que le fait d’être excessif n’était pas idéal pour cela. Mais chacun son tempérament. Mais si tu demandes à n’importe quel basketteur la caractéristique majeure de Jo, on te dira que…

JH : (il interrompt) Que je n’étais pas un athlète (il rit) ! Je n’étais pas celui qui montait au dunk !

MG : … c’est un très gros shooteur.

Photo de la saison 2019/20, signée Laurent Peigue

Pendant de nombreuses saisons, vous avez été le duo moteur de l’équipe. Comment avez-vous vécu la baisse des responsabilités du temps de jeu, des responsabilités, des statistiques, même si ce n’est pas ce qui doit vous animer…

MG : Les statistiques, je n’en clairement rien à cirer ! Le reste, ça s’est fait naturellement au fil des ans. Cela fait quatre saisons que Théo Magrit est là. Au début, il prenait ce qu’il avait à prendre puis il a gagné en confiance au fil des années, il a grandi. Logiquement, il a été beaucoup plus responsabilisé ensuite. Si je voulais vraiment continuer à avoir des grosses responsabilités, il fallait partir en Nationale 1 ou dans un autre club de Pro B. Je savais que ça allait se passer comme ça. À 37 ans, je n’ai plus envie de me prendre la tête. Il y a dix ans, j’aurais dit l’inverse. Quand tu es jeune, tu es compétiteur. Mais désormais, juste de transmettre et de faire partie du truc, ça me va. Si je fais des bons matchs, tant mieux. Si je fais des mauvais matchs, ça me fait chier un peu quand même mais c’est différent, je me prends moins la tête qu’avant.

JH : On a un rôle de transmission. On est beaucoup plus focus sur l’équipe, sur le reste des joueurs, qu’on peut l’être sur nous. Il n’y a plus de frustration individuelle, ou juste à la marge. Toute ton énergie est vraiment tournée vers l’équipe. On n’est pas là pour faire des stats afin d’aller chercher un nouveau contrat. Et encore, je trouve qu’on est bien utilisé par le coach et qu’on lui rend encore quelques services, donc tant mieux.

Ça reste le but quand même…

MG : (il rigole) Oui…

JH : Non mais voilà, on n’est pas encore à la ramasse, loin de là. Sur le terrain ou dans le vestiaire, on est encore utile !

« O’Darien Bassett m’a rendu fou » 

Vous avez quasiment passé 15 ans en Pro B. Comment jugez-vous l’évolution du championnat sur la période ? 

JH : Pour moi, c’est beaucoup plus athlétique et rapide qu’avant ! Il y a 15 ans, on jouait moins de possessions. Aujourd’hui, je suis sûr qu’il y a au moins 6 de plus par match, largement. Ça court tout le temps. À l’époque, on était sur du jeu plus posé, du demi-terrain, avec des systèmes plus longs, où l’on jouait plus les post-up avec les grands, on prenait le temps. Maintenant, on n’a plus le temps. Ça envoie, ça va à mille à l’heure. Et tant mieux pour le spectacle ! Nous, il faut juste s’adapter. Les gamins sont tous des avions, ils sautent de partout. Ils n’ont peut-être pas énormément besoin de beaucoup de talent mais ils ont une telle activité et de telles qualités athlétiques que s’ils sont un minimum cérébraux, ils vont en Betclic ÉLITE.

Quand on n’est déjà pas les plus athlétiques de base et qu’on arrive à 37 ans, comment compense-t-on le décalage alors ? 

JH : La tête. Le cerveau, l’expérience. Ce qu’on appelle le QI basket. On sait qu’on ne rivalisera jamais avec des gamins qui vont à mille à l’heure donc on essaye de tout anticiper.

MG : Après, nous, on est dans une équipe où on essaye de vraiment jouer au basket. On n’a pas que des athlètes. Il y a vraiment une ADN basket, on arrive à s’en sortir quand même. On court beaucoup mais on a des systèmes où on sait où il faut mettre la balle. On ne joue pas du hourra-basket. C’est intense mais structuré.

JH : D’où notre intérêt, aussi, à rester avec un coach comme Max, qui aime bien le jeu, qui est subtil. Le fait d’avoir une réflexion basket nous anime. Jouer avec des gars qui ne réfléchissent pas, qui courent en permanence, qui balancent…

MG : Qui vont tout droit…

JH : … Je ne suis pas sûr de trouver ma place là-dedans.

Mathieu Guichard et Jonathan Hoyaux ont un dernier objectif à accomplir ensemble : se qualifier pour le play-in (photo : Laurent Peigue)

Y-a-t-il des joueurs marquants en Pro B qui vous reviennent en tête ? 

MG : Je me rappelle de deux – trois gars très forts à l’époque. Je dirais Derrick Obasohan. C’était un vrai joueur !

JH : Ah, celui qui m’a marqué, c’est O’Darien Bassett !

MG : J’ai joué avec lui à Clermont (en 2010/11).

JH : C’était un athlète. Oulala ! Quand j’étais à Aix-Maurienne, je jouais au poste de meneur et je défendais sur lui. Mais quel enfer, il m’a rendu fou…

MG : Il était tellement rapide. Je l’ai eu un an à l’entraînement et c’était la même chose. Pourtant, j’étais jeune à l’époque ! Avec son in and out là…

JH : Tu savais qu’il allait le sortir, mais tu ne pouvais rien faire…

MG : Il y a eu d’autres gros joueurs. Ronald March, il n’y a pas si longtemps, quand il était à Aix-Maurienne.

JH : Il a eu une ascension impressionnante ! Toute mon équipe de Limoges en 2012 aussi, c’était une folie.

La fin de votre aventure à Saint-Chamond marque-t-elle la fin de votre carrière de joueur ? 

JH : Personnellement, je n’en ai aucune idée. J’ai des options, plusieurs idées, que ce soit dans le basket ou non. Pour l’instant, je préfère me concentrer sur la fin de saison et décider de mon sort quand ce sera terminé. J’y verrai peut-être un peu plus clair. Je pense que je suis encore capable de jouer au basket mais ce n’est pas une obligation de continuer. C’est une décision qui doit se prendre en famille.

MG : Moi, j’ai encore envie de jouer. Je ne vais pas continuer en pro mais je vais aller jouer en Nationale 2, dans un club du coin, afin de ne pas arrêter du jour au lendemain. Je n’avais pas forcément envie de refaire bouger toute ma famille loin d’ici. J’avais réfléchi à étudier de nouvelles pistes, pourquoi pas en NM1, mais ma femme a eu un projet et cette opportunité est aussi arrivée pour moi. Donc on a décidé de rester par là.

Avez-vous déjà préparé vos reconversions ? 

JH : Cela fait deux ans que je suis en diplôme universitaire à Lyon 1. Je fais tout en distanciel mais je dois finir cet été. C’est un diplôme de gestion des organisations sportives. Cela concerne tous les rouages d’une SAS, d’une association, d’un club sportif. C’est assez vaste mais on touche à tout : de la RH, du marketing, la stratégie.

MG : J’ai passé le Diplôme d’État cette année pour devenir entraîneur. Si tout va bien, cela se terminera en juin.

« Il fallait bien que ça arrive un jour… » 

Est-ce que Mathieu fera un bon coach, Jonathan ?

JH : Oui ! C’est sûr que ce sera un bon coach. Il aura toujours ce recul de toute l’expérience acquise sur le terrain. Je ne sais pas pourquoi mais je le vois très bien en coach calme, au contraire du joueur nerveux qu’il était. Je pense qu’il aura beaucoup plus de recul sur le banc. Je ne suis pas inquiet pour lui.

Y-a-t-il plus de nostalgie à vivre vos derniers moments ensemble depuis que vous êtes au courant que cela va s’arrêter dans quelques jours ?

JH : Évidemment qu’on se le dit ! On sait qu’on ne jouera plus ensemble très bientôt. Potentiellement, c’est notre dernier match à domicile ce mercredi. Ensuite, le déplacement à Blois sera peut-être notre dernière rencontre ensemble la semaine prochaine. Il fallait que ça arrive un jour, on ne savait pas juste quand. Eh ben voilà… Il y a automatiquement plus de nostalgie depuis qu’on est au courant. C’est sûr qu’on en parle beaucoup ensemble vu qu’on est dans la même situation. C’est spécial, on fait avec, on essaye de tourner la page comme on peut, de penser à l’avenir tous les deux, sûrement différemment

MG : Ça fait un peu bizarre, surtout quand ça fait neuf ans qu’on joue ensemble. C’est plus global dans l’équipe, ça fait trois ans que Badr (Moujib) est là, quatre ans pour Théo (Magrit). C’est plus le fait de quitter le monde pro qui risque de me faire bizarre. Peut-être que je ne m’en rends pas compte, que j’aurais un contrecoup en septembre.

Comment appréhendez-vous la cérémonie d’après-match, où le club va vous mettre à l’honneur ? 

MG : J’essaye de ne pas trop penser à ce qui va se passer après, j’ai surtout envie de bien finir à domicile. Je ne m’en rends pas trop compte, je sais qu’il y a des choses qui se préparent. Je sais que ça va être un moment spécial mais je ne me fais pas de film. J’ai envie d’être focus sur le match, prendre du plaisir et gagner.

JH : Ça ne va pas être simple… Déjà que la vidéo n’était pas facile à tourner, j’imagine avec une salle qui sera pleine, ma famille à mes côtés en fin de match. Oui, ça va être compliqué… Je le sais. Mais il faut pouvoir dire au revoir correctement à tout le monde et c’est peut-être la meilleure manière de le faire.

L’œil de leur coach, Maxime Nelaton

« Il est extrêmement précieux d’avoir ces deux joueurs dans mon équipe. Pour moi, il existe trois types de leader : le leader combatif, le leader vocal et le leader carthésien. Sur deux joueurs, j’ai déjà deux leaders : le leader vocal et le leader carthésien. 

Mathieu est le garant du jeu qu’on va proposer. Jonathan est le leader vocal. À nous, coachs, de nous appuyer dessus. Ce sont des garçons qui ont connu des choses, ensemble mais aussi avant. Ils ont une carrière longue comme le bras. En tant que coach, il y a certains moments dans la saison où l’on doit s’imposer et certains autres où on doit être en ligne de communication directe, que ce soit pour des sujets basket ou non. La ligne de communication franche et de confiance, qui existe avec eux, est difficile à construire quand on n’a pas des joueurs qui présentent une telle stabilité émotionnelle ou de vécu dans un club. Donc oui, je m’appuie beaucoup sur eux. »

Commentaires


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drefui
Merci pour cet interview
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grant_5verdun
Bravo Mathieu.
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mick7142
Bel interview de basket pour ces deux joueurs mythiques de St Chamond... Bravo à eux pour leur fidélité au club, on y verra plus ça malheureusement. Et puis, merde à ces "Messieurs du basket" pour leur reconversion, mais je ne me fais aucun souci pour eux.
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joraberanto
Encore une belle interview d'Alexandre Lacoste !
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