La NCAA siphonne la jeunesse du basket français, et la LNB ne peut rien faire

Un jeune impliqué en Betclic ELITE comme Nathan De Sousa n’avait jamais envisagé de passer par la NCAA avant cette année, mais les contrats qui lui sont proposés outre-Atlantique peuvent difficilement se refuser
Le basket français est à un tournant. Longtemps saluée pour sa capacité à former des jeunes talents, avec un slogan équivoque (« révélons le basket français »), la LNB voit son modèle mis à mal par une NCAA en pleine mutation. Grâce au NIL (Name, Image and Likeness) et à une liberté totale sur les transferts, le championnat universitaire nord-américain attire de plus en plus de prospects français. La tendance est déjà bien entamée, et les conséquences pour les clubs tricolores pourraient être majeures.
La révolution NIL : des millions pour les étudiants-athlètes
Jusqu’en 2021, la NCAA interdisait à ses athlètes d’être rémunérés. Mais depuis, tout a changé. Les étudiants peuvent désormais tirer profit de leur nom, image et ressemblance (NIL), avec des deals commerciaux pouvant atteindre plusieurs millions de dollars. Ce système, combiné à la flexibilité totale offerte par le transfer portal, a transformé la NCAA en véritable eldorado pour les jeunes joueurs. Et ce, sans que les clubs européens, ni même la NBA ou la FIBA, ne puissent intervenir légalement.
Un simple exemple : Yohan Traoré a évolué dans trois universités différentes en trois saisons. Ce genre de parcours illustre la fluidité du système américain, bien plus souple que l’environnement contractuel européen, souvent rigide et faiblement rémunérateur à ce stade de carrière.
Un exode massif de la LNB vers la NCAA
Le phénomène s’accélère. En 2025, la liste des départs déjà actés vers les États-Unis donne le tournis :
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Ilias Kamardine (Dijon)
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Roman Domon (Gravelines-Dunkerque)
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Wilson Jacques (JL Bourg)
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Evan Boisdur (Gravelines-Dunkerque)
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Clarence Fondeur Massamba (Monaco)
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Yohann Sissoko et Paul Mbiya (ASVEL)
Et la vague pourrait se poursuivre avec des départs envisagés pour :
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Illan Pietrus et Brice Dessert (Strasbourg), avant Maxence Lemoine en 2026 ?
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Nathan De Sousa (Cholet)
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Mathis Courbon (Roanne)
- Mohamed Diakite (Saint-Quentin)
- Alexandre Bouzidi (certes déjà en D3 allemande)
Les clubs ne peuvent rien y faire. La NCAA, non affiliée à la FIBA, ne demande pas de lettre de sortie pour qualifier un joueur, même s’il est sous contrat. Résultat : les clubs formateurs français perdent gratuitement leurs meilleurs éléments.
Agents, un rôle logique dans une dynamique favorable
Dans ce contexte, les agents jouent leur rôle pleinement. Leur mission étant de servir au mieux les intérêts de leurs clients, il est parfaitement cohérent qu’ils orientent les jeunes vers des opportunités aussi attractives que celles offertes par la NCAA. D’autant que le système NIL s’avère aussi avantageux pour eux, avec des commissions oscillant entre 10 et 20 %, soit plus que les 8 à 10 % généralement pratiqués en Europe (et encore, en l’absence d’intermédiaires étrangers). Un écosystème qui incite naturellement les représentants à pousser leurs prospects vers les États-Unis.
Vers une remise en cause du modèle de formation français
Ce raz-de-marée pourrait pousser les clubs LNB à revoir leur copie. Pourquoi investir dans la formation si les talents partent avant même de contribuer au projet sportif ? Le risque est clair : proposer une formation au rabais, peu coûteuse, car non rentable sur le long terme. Une tendance qui pourrait à terme impacter également la LFB, si la NCAA féminine suit la même évolution.
La Draft NBA aussi impactée
Le phénomène a également des répercussions sur la Draft NBA. En 2025, seuls 106 joueurs se sont inscrits en early entry, le chiffre le plus bas depuis 2015, contre 363 en 2021. Les étudiants restent plus longtemps à l’université, bien payés et bien entourés, au lieu de tenter l’aventure pro dans des conditions précaires.
La NCAA devient ainsi une voie royale, non seulement pour le développement, mais aussi pour l’enrichissement. Un joueur bien entouré, bon sur le terrain et actif sur les réseaux peut signer des deals avec Nike, Amazon ou T-Mobile. À tel point qu’un late pick NBA pourrait gagner moins qu’un joueur vedette de Kentucky ou Texas.
Que peut faire la LNB ? Pas grand-chose… seule
Face à cette déferlante, la LNB est impuissante. Aucune clause contractuelle, aucune indemnité de formation, aucun recours juridique ne peut freiner ce mouvement. À moins que la NBA, voyant une partie de son vivier se stabiliser en NCAA au lieu d’arriver prématurément dans sa ligue, ne décide d’intervenir à son tour.
Cela fait des années que j’alerte. Les cas Kamardine et Domon sont encore pires que ce que j’imaginais. Même en signant des contrats pros nous sommes ruinés….. maintenant les filles vont suivre c’est dramatique pour le basket français https://t.co/Qk5fBugU5n
— Remy Delpon (@RemyDelpon) April 30, 2025
Car aujourd’hui, la NCAA n’est plus ce sanctuaire amateur de l’époque. Elle est un marché à part entière, avec ses codes, ses agents, ses millions. Et la France, ex-leader de la formation basket en Europe, pourrait bien n’être plus qu’un simple fournisseur, sans pouvoir de rétention.
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